Assemblée nationale : la démocratie du plus fort toujours de mise à l’hémicycle

Lundi 9 Octobre 2017 - 19:33

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À chaque session, des députés de l’opposition  sont déçus d’assister à une pseudo démocratie parlementaire  consistant à étouffer systématiquement tout débat sur des questions pourtant d’intérêt national.

L’actuelle session ordinaire de septembre à l’Assemblée nationale réputée budgétaire paraît plus politique que jamais au regard des enjeux politiques de l’heure. Alors que les propositions de loi essentielles censées booster le processus électoral sont en souffrance et ne font guère l’objet d’un traitement en urgence, les députés s’adonnent, pour l’heure, à cœur joie dans l’élaboration des motions de défiance pour obtenir la destitution de certains membres du gouvernement. Il est vrai que l’initiation d’une question orale avec ou sans débat fait partie de l’exercice parlementaire pour tout député qui a la latitude de la commuer en une motion de défiance ou non. Ceci entre bien dans le cadre de ses prérogatives en matière du contrôle qu’il est censé exercer sur le gouvernement.

Mais là où le bât blesse, c’est le caractère abusif desdites motions élaborées souvent à l’emporte pièce sans grande motivation, juste pour le besoin d’assouvir quelques appétences. L’initiative émane souvent de l’opposition parlementaire avec des députés qui ont difficile à sortir du carcan de la démocratie du plus fort à laquelle ils sont assujettis, bien malgré eux. Ces députés en nombre insignifiant sont étouffés systématiquement par leurs collègues de la majorité qui, à chaque motion initiée contre l’un d’eux, font intervenir la loi du nombre. Certaines motions sont même déjà rejetées en liminaire sans être soumises au débat parce que court-circuitées par des contre- motions incidentielles initiées séance tenante. Les vice-Premiers ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères, visés dernièrement par des motions de défiance, ont été sauvés de justesse par un député de la majorité qui a récusé la procédure sans toutefois polémiquer sur le fond des accusations à charge des deux ministres. La majorité mécanique aidant, les deux précités ont quitté l’hémicycle sans que lesdites motions ne soient soumises au débat.

Non satisfaite, l’opposition parlementaire est revenue à la charge cette fois-ci contre le ministre des Affaires étrangères dont les réponses, lors de la question orale avec débat lui a été adressée au sujet de l’invalidation des passeports semi-biométriques, ont été jugées peu convaincantes. C’est dans ce cadre qu’il faut situer la motion de défiance déposée à son encontre le 9 octobre par le député national, UNC Juvénal Munubo. Dans le même temps, l'on signale une autre motion en gestation contre le président de la chambre basse du Parlement accusé de violer intentionnellement le règlement intérieur de l’Institution et de la Constitution à travers une police subjective et orientée des débats. À ce jour, il est fait état de quarante-neuf signatures déjà récoltées, le temps d’atteindre les cinquante requises pour rendre la pétition opérationnelle.      

Au-delà, il y a lieu de s’interroger sur le sens desdites motions qui paraissent être réduites à une pure formalité lorsqu’on sait qu’une jurisprudence parlementaire renseigne qu’aucun membre du gouvernement ou un président de la chambre basse proche de la majorité n’a été destitué par cette voie depuis que cette législature existe. Un coup d‘épée dans l’eau pour les députés de l’opposition qui risquent à nouveau d’être tournés en dérision avec des motions qui, manifestement, n’auront aucune chance d’aboutir.  

 

Alain Diasso

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