Cinéma : En salle, « Félicité » force l'admiration

Samedi 1 Avril 2017 - 2:13

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Le film « Félicité » d'Alain Gomis a remporté l'Etalon d'or du 25ème Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco). A travers l'oeuvre du franco-sénégalais un hommage est rendu à toutes les femmes fortes africaines.
 

Alain Gomis nous plonge en République démocratique du Congo (RDC), au coeur de la capitale. Il brosse le portrait de Félicité, indépendante, libre et fière. L'héroïne est chanteuse de bar à Kinshasa. Sa vie prend un tournant émouvant avec l'accident de moto de son fils de 14 ans. Une opération est nécessaire pour sauver sa jambe. Pour se faire, une forte somme d'argent est nécessaire. Félicité sillonne alors la ville à la recherche de solutions. Cette femme à la tête haute qui n'accepte pas la compromission et ne plie pas sous les coups est forcée de revoir sa copie. Jusqu'où peut-elle aller pour obtenir les fonds ? Elle pousse ses limites toujours plus loin dans le but d'éviter l'amputation de son fils. On souffre avec Félicité car le temps joue contre elle.

La place de la musique

La narration tient en haleine. Musique  Kasaï et celle de l'orchestre symphonique kimbanguiste de Kinshasa cohabitent à merveille dans l'oeuvre du réalisateur franco-sénégalais. « La musique est capable d'émouvoir sans qu'on ne puisse l'expliquer. Dans mon cinéma, il y a une vibration, une corde que je cherche à faire trembler et cette sensation est plus forte avec la musique », confie le cinéaste franco-sénégalais. Pendant deux heures les scènes et chapitres tantôt dures, tantôt poétiques laissent une place importante aux rêves, et sont ponctuées de pauses musicales avec les répétitions de l’orchestre symphonique. « J'ai eu un coup de coeur pour cet orchestre né sur l'idée incroyable d'Armand Diengienda en 1994, à une époque où il n'y avait pas forcément tous les instruments ou même les instrumentistes à Kinshasa. Aujourd'hui l'orchestre compte près de deux cents musiciens, choristes et instrumentistes et plusieurs tournées en Europe et aux Etats-Unis  », explique Alain Gomis.

La musique du collectif Kasai Allstars appelle elle à la transe dans les nuits kinoises. Porté par le magnétisme de la musique, et l'intensité de ses acteurs, le récit est d'une époustouflante véracité. La chanteuse interprétée par Véro Tshanda Beya dont la caméra est au plus près, sans pour autant déceler tous les mystères. Elle donne la réplique à deux autres non-professionnels dont son prétendant Papi Mpaka et Gaetan Claudia dans le rôle de son fils.

Une réalité sans-fard

Pour être au plus près de la réalité, Alain Gomis a travaillé les scènes avec ses comédiens afin de proposer un récit crédible. « Il était important d'aborder la vie quotidienne et aussi la partie invisible. Qu'il s'agisse de l'amour, de la vie, les vraies choses passent dans ces moments immatériels », souligne Alain Gomis.

Félicité doit trouver sa voie entre lutte et acceptation.  De jour comme de nuit on est dans la réalité. « Aujourd'hui dans biens des cultures, la femme est le moteur de la famille. Faut savoir se battre pour survivre. Sans argent tu n'as pas accès aux soins médicaux. Nos dirigeants ne développent pas assez le social et on en souffre. Félicité représente les femmes africaines, courageuses et battantes. Je me devais d'aborder ce rôle avec justesse car il est dédié à toutes les femmes fortes en Afrique », avoue Véro.

Nimbée d'une lumière parfois grisâtre, les images de styles documentaires de Kinshasa sont d'une pure beauté.

Si la première partie du film est calfeutrée dans le drame, la seconde partie laisse place sous nos yeux à une histoire d'amour.

Alain Gomis a réussi son pari. Chacun d'entre nous est libre de se faire sa propre lecture. Félicité ne laisse personne indifférent. 

 

 

Ekia Badou

Légendes et crédits photo : 

cp/dr

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