Cinéma : l’Afrique a perdu une icône

Jeudi 7 Mars 2019 - 21:07

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Le Burkinabé Idrissa Ouédraogo, surnommé le maestro du septième art africain, a tiré sa révérence le 18 février, dans une clinique à Ouagadougou, à l’âge de 64 ans.

« L’Afrique vient de perdre l’un des plus valeureux ambassadeurs dans le domaine de la culture, un réalisateur à l’immense talent et profondément attaché à son pays », a déclaré le président Burkinabé, Rock Marc Kabore, dans son message de circonstance.

Figure emblématique du cinéma africain de 1980 à 2000, Idrissa Ouédraogo, surnommé maestro selon le témoignage du cinéaste Rasmané Ouédraogo, a marqué les esprits par ses œuvres. Auteur d’une quarantaine de films, il a été récompensé dans les plus grands festivals nationaux et internationaux, notamment le grand prix du jury au festival de Cannes pour son film "Talaï" en 1990, une transposition tragique grecque dans l’Afrique contemporaine, tournée dans un village Massi, au nord du Burkina Faso.

Artiste singulier, il a également imposé une esthétique qui a inspiré toute une génération de jeunes cinéastes africains, comme l’a indiqué Abdoulaye Dragoss, cinéaste et professeur d’ethnologie visuelle à l’université de Bordeaux. « Il a raconté la vie des gens ordinaires, plantant sa caméra dans les zones rurales plutôt que dans les villes. Il a su rendre la beauté des zones sahéliennes », a-t-il témoigné. Les grands discours politiques des années 1990 l’ont inspiré à aborder en profondeur des grandes questions de la société.

Formé à l’école du cinéma de Moscou, puis à l’Institut des hautes études cinématographiques de Paris, Idrissa Ouédraogo a réalisé son premier long métrage, "Yam Daabo" (le choix) en 1986 où il montre la pérégrination d’une famille de paysans quittant la zone aride du Sahel. Trois ans plus tard, il sort "Yaaba", chronique de la vie dans un village à travers l’histoire d’amitié entre un enfant et une vieille femme rejetée par la communauté, car tenue pour être sorcière.

Avec son film "Le cri du cœur" tourné en France, en 1984, il obtint le prix du public lors du cinquième festival du cinéma africain du Mali. Idrissa Ouédraogo a remporté le prix Ours d’argent à Berlin avec son film "Samba Traoré". Il a été le seul Africain à participer à la réalisation du film collectif "11-09-01"  sur les attentats du 11 septembre 2001 à New-York, aux Etats-Unis.

Amoureux et passionné du cinéma, il a produit et réalisé en 2001 la série "Kadi Jolie" qui a fait le plaisir de millions de téléspectateurs sur le continent africain. Il a également mis en scène à la comédie française "La tragédie du roi Christophe" d’Aimé Césaire. « Je déplore que l’image du Tiers-monde et de l’Afrique en particulier, véhiculée au cinéma, à l’étranger et même par certains cinéastes africains, soit trop souvent exclusivement liée à la misère des hommes. La joie, l’amour, la haine, le combat optimiste qui sont des éléments universels ne doivent pas être exclus », avait-il déclaré dans une interview, peu avant sa mort.

Cisse Dimi

Légendes et crédits photo : 

Idrissa Ouédraogo

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