Couleurs de chez nous: « Cent pas »

Lundi 8 Mai 2017 - 10:02

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« Je fais juste les cent pas.» Une expression courante chez les Congolais pour signifier la disponibilité ou justifier l’envie de sortir de la maison et d’aller prendre de l’air.

En effet, cette culture des « cent pas » a nourri un mode de vie qu’affectionnent les Congolais : l’éternel passe-temps dans les bars même aux heures de travail. « Où vas-tu mon cher ? » « Que fais-tu ? » Des questions auxquelles les réponses sont connues : « Je fais les cent pas » ou « Je n’ai pas grand-chose à faire si tu peux me proposer ».

Et voilà un père de famille, sorti de chez lui pour une destination bien connue, contraint de s’asseoir dans la rue et boire jusqu’à des heures indues. Il n’est pas rare de voir des femmes se détourner du chemin du marché pour une escale dans un temple de Bacchus. Ou cette autre, panier de nourriture en mains, avec l’objectif d’aller visiter un parent malade à l’hôpital, au nom de la solidarité à la congolaise, qui finit par échouer dans une « cave » ou un « VIP ». Rappelez-vous ces sigles ! 

Il s’avère cependant que cette attitude traduit la paresse du peuple d’ici. Elle donne la mesure du comportement général des individus chez qui le travail n’a plus un plaisir, une vertu mais une souffrance.  Je n’invente rien en le déclarant, car le sujet est désormais inscrit aux débats des quartiers. Certains pensent qu’on a toujours quelque chose à faire : aller à son travail ; s’occuper des enfants ; faire du sport ; lire ou suivre la télévision. Les arguments sont légion et forts chez les individus qui critiquent.

Les « cent pas », disent-ils, sont l’expression affichée d’une oisiveté à condamner. Au nombre des critiques, il y a des artistes dont l’un d’eux, bien inspiré, a fait une parodie de cette pratique à travers la célèbre chanson « vieux Thomas ».

Laissons la musique pour continuer avec nos « cent pas » qui, au-delà de la paresse décriée, témoignent de la nonchalance, du manque d’ambitions et d’objectifs clairs chez certains citoyens à l’heure où des études poussent les uns et les autres à avoir un plan de développement personnel. À l’heure où la crise économique oblige à diversifier les sources et les ressources.

C’est ainsi que l’on voit des fonctionnaires toujours très engagés à vider les bureaux pour se rendre à des obsèques ou dans d’autres endroits de réjouissances alors qu’ils sont réticents quand il s’agit d’aller assister à une conférence-débats sur des problématiques actuelles. Peu de ces fonctionnaires sont capables de débourser un billet de cinq mille pour s’acheter un livre de poche sur « Les secrets des couples heures » ou sur « Le droit expliqué aux nuls ». Etc.

Ce manque d’empressement se lit à travers les arrêts et escales qu’observent les Congolais le long de leur itinéraire, d’un point à un autre. Tous les prétextes sont bons pour faire annuler à mes compatriotes une mission qu’ils s’étaient donnée même lorsqu’il est commis pour aller retirer ou déposer un document précieux.

Nombre de Congolais ont souvent regretté d’avoir trainé les pas au lieu d’aller droit au but, vers son objectif.

 

 

 

Van Francis Ntaloubi

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