Couleurs de chez nous : ma famille

Dimanche 29 Avril 2018 - 20:32

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Loin d’évoquer la célèbre série télévisée ivoirienne, il s’agit, ici, de braquer le regard sur la famille congolaise. Avez-vous, comme moi, remarqué que celle-ci prend des coups et se fissure ? Non ?

Il y a deux grands rendez-vous pour mesurer la température d’une famille : la veillée mortuaire et la cérémonie de mariage coutumier. Ici, on peut observer deux individus assis, côte à côte, sans se parler parce qu’ils ne se connaissent pas. Et un troisième arrive, les salue et, constatant l’indifférence entre les deux premiers assis, se lance dans les présentations.

  • « Quoi ! Ne vous connaissez-vous pas ? C’est l’enfant de ta tante Maguy, la grande-sœur de maman.»
  • « Ah oui ! Je connais seulement son petit-frère Roger.» 

À ce type d’échanges s’ajoutent bien d’autres qui renseignent suffisamment sur la distance qui se crée entre des membres de famille. Les causes sont nombreuses pour expliquer cette réalité d’aujourd’hui qui tranche avec celle d’hier. La mobilité des individus et l’expansion de nos villes viennent en tête des raisons. Puis, l’égoïsme, le soupçon porté sur l’autre et l’influence du modèle occidental favorisent également la baisse de solidarité au sein des familles.

En effet, hier, chacun permettait à son enfant d’aller vivre chez son frère ou sa sœur et vice-versa. Le fait que tel enfant partait du village pour aller étudier en ville chez l’oncle paternel ou le fait pour le chef d’une famille de recevoir chez lui des enfants des autres membres de la famille favorisaient les rencontres et renforçaient la solidarité.

Or, mille raisons dont celles déjà évoquées faussent ce jeu. La cherté de la vie qui ne permet plus aux bonnes volontés d’abriter sous leurs toits des enfants des autres ; l’ingratitude de certains qui oublient vite à la moindre incartade ; la qualité de l’éducation des « enfants d’aujourd’hui » et l’appartenance à des religions différentes contribuent à cette destruction des liens de famille. Telle femme, adepte de l’église « Tongo etani », n’acceptera pas d’envoyer sa fille chez son frère athée ou membre de l’église « Moyi ebimi », parce que l’éducation ou la morale délivrée est différente d’une église à une autre.  De même qu’il y a des enfants, habitués à jouer dans la rue, qui ne supportent pas d’aller vivre chez un oncle ou une tante qui les contraint à vivre entre les murs et à ne suivre que des dessins animés.

Enfin, beaucoup de Congolais refusent d’envoyer leurs enfants passer ne serait-ce que le week-end chez les leurs dont ils ne s’expliquent pas l’ascension sociale. Encore le soupçon ! Il n’est pas rare que deux frères (même père et même mère) ne connaissent pas les épouses des autres. Incroyable ! Parce que les visites à domicile n’ont plus cours chez nous. Un appel ou un message suffisent pour repérer l’autre, le rejoindre, partager un pot et prendre les nouvelles de la famille qu’on ne voit jamais et qui, donc, reste inconnue. Une couleur manquante à ce tableau : la séparation de famille. Autrement appelée «la coupure de la corde » qui, souvent, est décidée dans les tribunaux coutumiers./-

 

Van Francis Ntaloubi

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