Couleurs de chez nous: « Mosselebende »

Dimanche 10 Septembre 2017 - 2:05

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Un mot célèbre au Congo ! Si le mot a disparu du vocabulaire actuel, il fut jadis à la mode jusqu’au milieu des années 1980.  À l’époque, la Saint-Valentin n’était pas dans les habitudes des Congolais et gagner un « cœur » relevait d’un exploit. Pour les hommes comme pour les femmes. Si bien que chacun, disons chacune, usait de mille et une astuces pour conserver le déjà acquis.

C’était aussi l’époque où les femmes étaient tolérantes en acceptant la « rivalité ». Un homme pouvait faire cohabiter ses deux ou trois femmes ou les installer dans différents quartiers et y passer des nuits selon un calendrier défini par lui et unanimement accepté par ses femmes quand il n’était pas tout simplement imposé.

Craignant de voir le mari lui accorder peu d’attention, certaines femmes recouraient à des pratiques diverses dont le célèbre « Mosselebende ». En fait, même les hommes y recouraient pour retourner ou détourner le cœur d’une femme convoitée.

Difficile de dire les ingrédients qui composaient le fameux philtre appelé « Mosselebende ». Seuls les spécialistes le savaient. Parmi les dépositaires des secrets de la chose, il y avait des Congolais mais surtout les Haoussas ou Ouest-Africains qui avaient investi Poto-Poto. Un quartier que les femmes visitaient pour deux raisons principales : acheter une pièce de luxe chez « Seydou » ou « Doukouré & frères » tout en trempant la vigilance pour s’infiltrer chez un marabout du coin.

Les faits ici décrits, aussi fictifs soient-ils, ont longtemps nourri les débats et la vie au Congo au point de figurer comme thématiques des théâtres et autres productions audiovisuelles. Les écrivains en ont aussi fait de longs récits. Preuve que le phénomène est loin d’être banal.

Aujourd’hui, la pratique a pris des couleurs religieuses. En doutez-vous ? Rendez-vous dans les églises pour compter le nombre de femmes qui observent des jeûnes dans le dessein de voir le mari revenir aux bons sentiments.

« Je voudrais témoigner ma reconnaissance à notre assemblée pour toutes les prières. Car, grâce à vous, et au Très Haut, mon mari a regagné notre foyer qu’il avait déserté au grand bonheur des enfants et de moi-même», peut-on souvent entendre. Ce qui est légitime.

Dans tous les cas, les Congolais ont toujours pensé l’amour comme un « don de Dieu » mais jamais le résultat d’une manière de vivre, un art de séduction sur fond de vertus morales et de dispositions physiques et psychologiques.

À l’ère du numérique, comment fait-on pour gagner l’âme sœur ? Par la marque de son téléphone, son prix d’achat ou par les mots touchants envoyés à l’autre ? L’amour au rythme et aux couleurs de la société.

Van Françis Ntaloubi

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