Couleurs de chez nous : nouveaux villages

Samedi 28 Juillet 2018 - 12:17

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Derrière chaque village qui existe, il y a une histoire, une philosophie et, voire, des objectifs. Au Congo comme ailleurs dans le monde, les villages ont, tous, ce profil en dehors des autres commodités qui peuvent les distinguer les uns des autres telles que l’architecture, la démographie ou la position géographique.

Le nom, par exemple, renseigne assez suffisamment sur le village. Chez nous, on se rappellera des noms comme Marchand, Jacob, Dolisie, Fort-Rousset et Brazzaville qui deviendront par la suite de grandes et moyennes villes. Même si, plus tard, elles ont pris d’autres noms pour devenir Missafou, Nkayi ou Owando. Dans la première version, il s’agit des noms de leurs fondateurs. Des missionnaires français pour la plupart !

Interrogez les témoins de l’histoire, ils vous diront ce qui se cache derrière des noms comme Loukoléla, Mossendjo, Kinkala, Abala, Gamboma, Djambala, Sibiti, Zanaga ou Kakamoeka. Et migrations internes obligent, on a vu des peuples exporter les noms de leurs villages d’origine vers les nouvelles terres conquises. Un natif de la Bouenza qui migre pour la Sangha attribuerait au nouveau village qu’on lui a permis de créer le nom de son village d’origine et vice versa.

Aujourd’hui, les noms de villages épousent désormais d’autres réalités et obéissent à des enjeux autres que ceux énoncés plus haut. Une balade sur les routes nationales du Congo donnera une parfaite illustration sur les évolutions intervenues. Sur ce nouveau format, on découvre des villages avec noms tantôt provocateurs tantôt prospectifs mais souvent métaphoriques. Le cas du célèbre village appelé « Dieu le veut » entre Nkouô et Odziba.

A une trentaine de kilomètres plus avant, se trouve le village Mbandaka qui, longtemps, a suscité des commentaires avec une question principale. Serait-il créé par un ressortissant du Congo de l’autre rive ? A la manière des artistes, les nouveaux créateurs de villages recourent au jeu de l’esprit pour exprimer leurs ambitions ou étouffer certaines velléités avec des noms du genre : « Tala na miso » ; « Retour à la terre » ; « Simba Sengo » (tiens la houe !) ; « Dieu voit tout » ; « Boma l’heure » ; « La cigale et la fourmi » ; « Chez le laboureur » ; « L’oiseau fait son nid » ; « La marche vers le développement » ou « Article 15 ».

C’est donc fini avec l’ancienne logique d’attribuer des noms traditionnels. La mode est aux noms porteurs de messages même s’il faut froisser des susceptibilités. Petite anecdote avec le cas du village « Itaba ya basi », à environ 120 km au nord de Brazzaville. Une initiative de femmes célibataires ayant refusé de vivre dans des villages où elles seraient vues comme des emmerdeuses par des femmes mariées.

Enfin, il faut dire que ces nouveaux villages sont créés par une catégorie d’individus. D’abord les fonctionnaires frappés par la crise des années 1990 ; les retraités et les sans-emploi. Plutôt que de s’intégrer dans les villages existants, ils suggéraient aux fonciers de vivre à l’écart. Sauf que cette prolifération de villages fausse la politique de l’aménagement et de l’administration du territoire.

Van Francis Ntaloubi

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