Désignation du porte-parole de l’opposition : le groupe parlementaire MS-G7 accentue la pression

Jeudi 10 Octobre 2019 - 18:30

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Les députés et sénateurs membres du regroupement politique ont saisi dernièrement les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat pour demander de faciliter la nomination de leur porte-voix. 

Après moult tergiversations, le dossier relatif à la désignation du porte-parole de l’opposition refait surface. Les lignes sont en train de bouger au sein de l'opposition parlementaire qui appréhende aujourd’hui la portée d’un tel poste dans le microcosme politique congolais. Après avoir raté le coach en 2006 et 2011, elle entend, cette fois-ci, donner un contenu réel à l’article 18 de la loi n°7/008 du 4 décembre 2007 portant statut de l’opposition, en se choisissant son représentant. Mais pour y arriver, les bureaux de deux chambres du parlement (Assemblée nationale et Sénat) doivent actionner le mécanisme, conformément à l'article 19 de la loi susdite en facilitant la désignation, par consensus, du porte-parole de l’opposition. Ce qui, pour l’heure, est loin d’être fait au grand dam des députés et sénateurs de l'opposition, décidés à en finir au plus vite avec cette affaire.

D’où la hargne, notamment du groupe parlementaire MS-G7, exprimée dans une récente lettre adressée aux présidents de deux chambres du parlement, invités à prendre des dispositions utiles pour organiser, dans les meilleurs délais, la nomination de ce porte-parole. Les groupes parlementaires et politiques de l'opposition ayant été déjà identifiés dans les deux chambres et le gouvernement de la République étant investi depuis le 7 septembre dernier, rien assurément ne peut empêcher, selon cette plate-forme, la mise en branle de la facilitation attendue des bureaux de ces deux chambres législatives sur cette question.

Ne plus tergiverser comme le régime précédent

Dès lors, continuer à tergiverser comme l’a fait le régime précédent qui redoutait la régénérescence d’une opposition qu’il avait laminée en affaiblissant politiquement  ses leaders n’est pas du tout bénéfique pour Félix Tshisekedi qui a intérêt à ne pas marcher sur les platebandes de son prédécesseur, pensent des analystes. Le fait pour lui de favoriser l’avènement dans l’espace politique congolais d’un porte-parole de l’opposition a l’avantage de consolider son statut de démocrate tout en exaltant son penchant républicain, soulignent-ils, ajoutant que le chef de l'Etat affiche, d’ailleurs, publiquement son enthousiasme à l’idée de voir ce prescrit de la Constitution être enfin appliqué sous sa mandature.

Dans ses dernières interventions médiatiques, en effet, le président de la République a réaffirmé son engagement à concrétiser ce qui, hier encore, relevait d’une simple vue de l’esprit. « C'est important d'avoir des interlocuteurs qui ne pensent pas comme nous et qui vont nous aider, par leurs critiques constructives, j'espère, à aller de l'avant et à faire avancer le pays », avait-il déclaré au détour d’une interview accordée à radio Vatican. En tout état de cause, Félix Tshisekedi est d’avis que c’est le pays qui va gagner dès lors que l’opposition jouera correctement son rôle de censeur vis-à-vis du pouvoir dans une approche républicaine qui privilégie le débat d’idées.  

Vu que l’opposition politique est reconnue en RDC et que les droits liés à son existence, à ses activités et à sa lutte pour la conquête démocratique du pouvoir sont sacrés, elle ne peut qu’être sous la protection du législateur en vertu de l’article 8 de la Constitution. Et, en ouvrant le champ politique, Félix Tshisekedi ne craindrait pas le retour de la manivelle. Il serait, d’ailleurs, prêt à affronter ses adversaires politiques sur le champ démocratique.   

Toujours pas de consensus dans les rangs de l'opposition

Cependant, au niveau de l’opposition en général et parlementaire en particulier, la tendance est plutôt à l’impréparation nonobstant la pression mise sur les bureaux de deux chambres du parlement. Les trois groupes parlementaires actifs à l’Assemblée nationale, à savoir AMK et Alliés, MLC-ADN, MS-G7 semblent évoluer en ordre dispersé, sans une coordination à la base susceptible de générer un consensus quant à la désignation par les députés nationaux et sénateurs du porte-parole de l’opposition. A défaut de ce consensus, le porte-parole de l’opposition, qui n’est pas obligé d’être nécessairement parlementaire, est élu par vote au scrutin majoritaire à deux tours dans le mois qui suit l'investiture du gouvernement, par les députés nationaux et les sénateurs, membres de l'opposition politique, précise la loi portant statut de l’opposition.

C’est ici que les "romains" vont, décidément, s’empoigner. Car à observer les tendances au parlement, la plate-forme Ensemble pour le changement de Moïse Katumbi tient le haut du pavé du point de vue du nombre des députés nationaux au sein de la coalition de l'opposition Lamuka. L’ex-gouverneur du Katanga est donc théoriquement mieux placé pour occuper ce poste, du reste taillé à sa mesure. Toutefois, les dessous des cartes au sein de ce regroupement politique, où chacun des leaders nourrit ses propres visées par rapport aux échéances électorales de 2023, risquent de plomber la démarche, en plus des égo déjà difficiles à gérer entre eux malgré l’unité de façade souvent affichée pour le besoin de la consommation extérieure.

Adolphe Muzito, Jean-Pierre Bemba et Martin Fayulu (déjà non partant du fait de sa fixation sur la présidence), seront-ils prêts à pousser au perchoir l’ex-gouverneur du Katanga qui, faut-il le souligner, aura à gérer les fonds destinés à l'opposition ? Rien n’est moins sûr dans une plate-forme où chacun est présidentiable, et donc porteur d'un agenda caché.  

Alain Diasso

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