(DOSSIER 15 AOUT). Processus démocratique au Congo : une avancée positive douze ans après ?

Vendredi 12 Août 2016 - 12:34

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L’occasion qu’offre les douze ans du programme de municipalisation accélérée, débuté en 2004 au Kouilou, interpelle les Congolais à jeter un regard rétrospectif sur les actions entreprises tant par les décideurs publics que par la société civile dans le cadre de la consolidation du processus démocratique.

En effet, peu avant l’élection présidentielle de 2009, les acteurs politiques et de la société civile étaient soucieux de toiletter le fichier électoral, de mettre en place une Commission électorale indépendante et de contrôler l’avancée du processus démocratique amorcé en 1991, à la faveur de la Conférence nationale souveraine. Ils exigeaient et obtenaient du gouvernement la tenue d’un dialogue national à Brazzaville auquel une partie de l’opposition refusait d’y prendre part.

En dépit de l’absence de quelques partis d’opposition, les assises de Brazzaville se sont tenues et se sont achevées dans le calme et la sérénité, assorties des résolutions et recommandations.

À l’issue du scrutin présidentiel organisé la même année, le président de la République, Denis Sassou N’Guesso est élu. Le cap est mis sur 2012, année des élections législatives. Avant cette échéance, un dialogue national est de nouveau convoqué à Ewo, chef-lieu du département de la Cuvette Ouest. 

Ces assises avaient connu, à la différence des premières, la participation de plusieurs partis politiques émargeant à l’opposition, notamment l’Union panafricaine pour la démocratie sociale(Upads) et le Parti pour l’alternance démocratique (Pad) ainsi que les partis et groupements du Centre.

               La longue marche vers l’amélioration du processus électoral

 La sempiternelle question de la révision des listes électorales, de la mise en place d’une Commission électorale véritablement indépendante, du bulletin unique et de l’introduction de la biométrie dans le processus sont revenues sur la table des discussions à Ewo, dans la perspective du scrutin législatif de 2012.  

Après ce scrutin marqué par une forte contestation des résultats du vote par l’opposition, une frange de partis de cette obédience politique créait le Collectif des partis signataires de la déclaration du 17 août 2012. Ce groupement politique contestait la légitimité des députés élus.

Malgré cette contestation de légitimité, l’Union panafricaine pour la démocratie sociale, dont une partie des membres, sont dans ce Collectif, autorisait à ses députés de siéger à l’Assemblée nationale. Un acte qui avait refroidi les relations entre le premier secrétaire, Pascal Tsaty Mabiala et les autres membres de sa formation politique, accrochés fermement à l’idée de rejeter le verdict des urnes.

Les décideurs publics animés par le désir d’apaiser le climat politique national, tendu depuis le scrutin législatif, avaient résolu d’initier en mars 2013 la concertation politique de Dolisie.  La délégation de l’Upads, principal parti d’opposition, était conduite par l’un des vice-présidents, le sénateur Gaspard Kaya Magane.

 Ces retrouvailles avaient inscrit à l’ordre du jour, entre autres, l’évaluation des recommandations prises à Ewo, notamment l’organisation d’un recensement administratif spécial ; l’introduction du bulletin unique et de la biométrie dans le processus électoral au Congo.

Le chef de la délégation de l’Upads interrogé par la presse avait condamné les membres de son parti ayant refusé de faire le déplacement de Dolisie. « N’en déplaise à une frange de certains vice-présidents qui se sont radicalisés dans leur ligne politique et qui pensent que le dialogue ne recèle pas de vertus d’apaisement dans le processus de démocratisation de notre pays », disait-il.

Pour sa part, le ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, Raymond Zéphirin Mboulou estimait : « Il est toujours difficile dans une société d’avoir tout le monde avec vous. Mais, je crois que nous avons intérêt à penser à notre pays, le Congo. Et si le gouvernement a voulu que tout le monde participe au dialogue, c’est parce qu’il est conscient des enjeux et veut que chacun de nous contribue à la consolidation de la démocratie ».

                        Partira ou Partira pas ?

Trois ans avant la fin du deuxième septennat du président de la République, Denis Sassou N’Guesso, en juillet 2016, les états-majors politiques commençaient à bouger. Une question revenait avec insistance sur toutes les lèvres, comme un leitmotiv : Partira ou partira pas ?

  Dans les coulisses, un débat est engagé à voix basse sur le changement de la Constitution du 20 janvier 2002. Deux camps diamétralement opposés s’affrontent sur la scène publique. « Touche pas à ma Constitution » lance l’opposition « radicale » et la majorité répond : « Touche pas à mon président ». Le débat commençait à prendre des allures périlleuses. Les partis du Centre, la société civile et l’opposition républicaine jouaient les sapeurs-pompiers.

Devant cet état de fait, le chef de l’Etat initie en mai-juin 2015 des consultations présidentielles pour recueillir les avis des Forces vives sur la question relative au changement ou non de la Constitution du 20 janvier 2002.

A l’issue de ces retrouvailles, le président de la République décide de la convocation du dialogue national de Sibiti du 13 au 17 juillet 2015, avec une question clé et précise, à savoir : faut-il, oui ou non, réformer les institutions actuelles ?  L’opposition « radicale » fronde et refuse d’aller à Sibiti. Elle opte pour un dialogue alternatif qui s’est tenu au quartier Diata, dans le premier arrondissement de Brazzaville.

Les délégués au dialogue de Sibiti ont fait ressortir trois tendances telles qu’exprimées tout au long des débats en commissions et en plénière. Une première tendance majoritaire a souhaité l’évolution des institutions par le changement de la Constitution ; une deuxième veut d’une évolution des institutions par la révision de la Constitution et enfin la dernière a plaidé pour le maintien de la Constitution du 20 janvier 2002.

Il faut tout de même noter que la concertation de Sibiti marquait une avancée dans le processus électoral au Congo, notamment l’introduction du bulletin unique, expérimenté pendant l’élection présidentielle du 20 mars 2016, et la promesse de l’usage de la biométrie, au cours des prochaines consultations.

                     La recomposition du paysage politique   

En vue de mener à bien le combat politique dans la perspective de l’élection présidentielle de mars, l’opposition « radicale » créé le Front pour le respect de l’ordre constitutionnel et l’alternance politique (Frocad) dirigé par Paul Marie Mpouelé et l’Initiative pour la démocratie au Congo, dont la présidence est confiée à un collège des membres.

 Le débat politique se raidit et le Congo est au bord de l’implosion. Devant cette situation, le président de la République convoque le référendum constitutionnel le 25 octobre en vue de départager les partisans de NON et du OUI.  A l’issue de cette consultation populaire, le OUI l’emporte sur le NON et la Constitution du 20 janvier 2002 est remplacée par la nouvelle loi fondamentale.  

 Denis Sassou N’Guesso est candidat à sa propre succession face à huit autres candidats. Le 20 mars 2016, Denis Sassou N’Guesso est élu, dès le premier tour du scrutin. La contestation des résultats du vote monte d’un cran et le 16 avril, le nouveau président prête serment devant la Cour constitutionnelle, les chefs d’Etats étrangers, les ambassadeurs accrédités au Congo et le peuple congolais.

Voici comment débute la nouvelle République avec un exécutif bicéphale composé d’un président de la République, chef de l’Etat et d’un Premier ministre, chef du gouvernement. Le processus démocratique au Congo poursuit son petit bonhomme de chemin.

 

  

 

           

 

Roger Ngombé

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