Drame du PSP de Chacona : pas d’indemnisation pour les ayants droit

Samedi 9 Mars 2019 - 18:45

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La décision est tombée lors de l'audience du 8 mars consacrée au verdict prononcé par le président de la troisième Chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Brazzaville, Dan Ndé Ibara-Ibombo.

Depuis octobre 2018, six policiers ont été poursuivis pour « homicide volontaire » et « non-assistance aux personnes en danger », dans le cadre du drame qui a coûté la vie à treize enfants dans les geôles du Poste de sécurité publique (PSP) de Chacona, à Mpila, dans le sixième arrondissement de Brazzaville, Talangaï.

À l’issue du procès, la cour a condamné le commissaire principal de Chacona à deux ans d’emprisonnement ferme assorti de deux cent cinquante mille francs CFA d’amende, et son adjoint à trois ans d'emprisonnement ferme assorti d’une amende de trois cent mille francs CFA ; douze mois d’emprisonnement ferme aux trois autres policiers, et une année d’emprisonnement avec sursis pour l’unique policière suivie d’une amende de cent cinquante mille FCFA pour chacun des quatre policiers.

Quant à l’indemnisation des ayants droit, le président de la troisième chambre correctionnelle ne s’est pas prononcé là-dessus, jugeant que la faute est non détachable de l’administration. Alors que les parents et leurs avocats s’attendaient à une indemnisation conséquente.

« Pour nous, avocats des victimes, c’est un deuxième deuil, pour la simple raison que nous sommes désolés de cette décision. Le même tribunal avait pourtant ordonné la mise en cause de l’État congolais en qualité de civilement responsable. Mais aujourd’hui, nous sommes surpris que le tribunal ne puisse retenir la responsabilité civile de l’État congolais...», a déclaré Me Stève Bagne, avocat de la partie civile. Il a fait recours à l’article 353 du Code de procédure pénale qui dit : « Toute personne qui se sent lésée par une infraction doit se constituer partie civile ». Dès lors qu' il y a eu la responsabilité pénale des prévenus (policiers)  retenue par le tribunal, cela entraîne ipso facto la responsabilité civile, c’est-à-dire la responsabilité du préjudice causé. « Nous sommes très désolés. C’est une bataille judiciaire, nous allons faire appel de cette décision. Si au niveau de la Cour d’appel, nous n’obtenons pas gain de cause, nous allons pourvoir en cassation jusqu’à ce que nous épuisions toutes les voies de recours sur le plan national et aller sur le plan international (la justice internationale) », a-t-il fait savoir.

Durant les audiences, les avocats de la partie civile ont justifié et prouvé la responsabilité pénale des prévenus et la qualité de civilement responsable de l’État congolais. « Il est établi que les enfants sont décédés dans les geôles du commissariat de Chacona. Il est établi aussi qu’il y a eu maladresse, imprudence et vétusté des locaux que l’État a mis à la disposition de la police. Donc, la responsabilité tant des prévenus que de l’État congolais est engagée », a déclaré Me Yvon-Éric Ibouanga, un des avocats de la partie civile, lors des plaidoiries.

À titre de rappel, après ce drame, le gouvernement congolais avait accordé deux millions de francs CFA à chaque famille pour l’inhumation des victimes.

Les parents indignés

« Je suis très déçu de la justice congolaise. Comment expliquer que les policiers ont été condamnés et, curieusement nous, les parents des victimes, sommes rejetés. Dès lors, il fallait libérer les policiers. Mais lorsque les policiers sont condamnés, ça veut dire que l’État est responsable », a déclaré un parent qui a requis l’anonymat.

« Comment peut-on comprendre que quelqu’un qui a tué un éléphant dans la brousse est condamné à quinze ans d’emprisonnement ferme, mais celui qui a tué treize personnes dans les geôles n’est condamné que pour trois ans, voire une année. Ce verdict nous fait mal. Mon enfant était en classe de terminale, il a été tué à l’âge de 18 ans. La justice est vraiment faite pour les faibles », a-t-il dénoncé.

 

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo : Le Palais de justice de Brazzaville

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