Exploitation de l’or à l'Est : la contrebande s’installe dans la chaine de commercialisation

Mercredi 6 Juillet 2016 - 16:46

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Le gouvernement, du fait de la contrebande et du comportement répréhensible des autorités provinciales, n’a pas perçu les recettes fiscales qu’il aurait dû dégager des 38 millions de dollars d’or artisanal produit chaque année pendant cette période de ruée vers l’or le long de la rivière Ulindi, note un récent rapport de l'ONG américaine Global Witness. 

Un rapport de l’ONG Global Witness publié le 5 juillet s’indigne de la façon dont l’exploitation aurifère est en train de se réaliser dans la province du Sud Kivu, plus précisément dans le territoire de Shabunda. Des quantités produites  prennent régulièrement des destinations inconnues, échappant ainsi au trésor public, à cause de l’imbroglio installé dans le circuit de commercialisation. Selon ce rapport, les groupes armés seraient au centre de ce trafic illicite en se faisant offrir des armes et de l’argent, soit par quelques firmes étrangères, soit par des autorités provinciales, aux fins de racketter les mineurs locaux.

Ces groupes armés, à en croire la source, vont jusqu’à dégager autour de 25.000 dollars par mois en extorquant des mineurs locaux. La récente ruée vers l’or qu’a connue cette région pendant deux années s’est avérée une aubaine pour les groupes armés qui en ont profité pour imposer leur diktat auprès des mineurs locaux obligés de coopérer, bien malgré eux. Une entreprise chinoise Kun Hou Mining aurait, d’après la source, tiré une meilleure partie de ce business d’un type particulier allant jusqu’à engranger, en l’espace d’une année, une production d’or d’une valeur pouvant atteindre les 17 millions de dollars. De l’argent volatilisé « ayant probablement quitté le Congo en contrebande pour gagner les chaînes d’approvisionnement internationales », note le rapport.

Difficile par ailleurs d’avoir une traçabilité dans ce commerce avec, en toile de fond, des documents délibérément falsifiés par les autorités minières de la province. Objectif : dissimuler tout lien des minerais exportés avec Shabunda, question de brouiller les pistes et échapper au paiement des taxes légales. Ainsi, l’origine de l’or produit est modifiée, pour le besoin de la cause, sur les documents d’exportation officiels où les quelques mines artisanales du sud-Kivu opérant légalement sont présentées comme sources de provenance. Or, en sus de cela, des grandes firmes étrangères sont à la manœuvre, exploitant à peu des frais d’importants gisements au grand dam du gouvernement.

Au-delà, ajoute le rapport de Global Witness, il y a la main noire des autorités provinciales qui jouent aussi leur partition. Ces dernières, pourtant chargées de superviser la ruée que connaît Shabunda, coopèrent avec les groupes armés qui investissent les mines de la région à la recherche de l’or, quitte à s’accorder sur le partage des recettes fiscales, dénonce l‘ONG. Une situation qui, selon la source, « porte directement atteinte aux efforts internationaux ainsi qu’à ceux du gouvernement national visant à réformer le commerce de l’or artisanal de l’est du Congo ».  

Enfin en termes de recommandations, Global Witness suggère au gouvernement « d’appliquer ses propres lois pour veiller à ce que les entreprises dans son secteur aurifère ne produisent ou ne vendent pas d’or ayant servi à financer des groupes armés » et de sanctionner toute entreprise qui enfreint ces lois.

Alain Diasso

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