Félix Tshisekedi à l’ONU : un discours aux accents panafricanistes

Samedi 28 Septembre 2019 - 13:15

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Journée mémorable que celle du 26 septembre qui a vu le chef de l'Etat congolais, auréolé de son statut de cinquième président de la République démocratique du Congo (RDC), s’exprimer pour la première fois du haut de la tribune des Nations unies, à l'occasion de la 74e session de l’Assemblée générale.

 

 

Une belle opportunité saisie à bras-le-corps par Antoine Félix Tshisekedi Tshilombo pour évoquer les défis du développement auquel fait face le monde actuel, à la fois globalisé et en constante mutation. Aussi, pour se mettre aux diapasons des nouvelles réalités de l’univers et, surtout, relever durablement les défis qui plombent le progrès de la communauté universelle, le chef de l’Etat a préconisé une réforme intégrale de l’ONU, notamment du Conseil de sécurité et des agences du système des Nations unies.

Un processus de réforme qui, se convainc-t-il, devra être mené à son terme et prendre en compte la position commune africaine. Se faisant le porte-voix des nations africaines à ce forum mondial, Félix Tshisekedi a stigmatisé la marginalisation de l’Afrique dans cet organe stratégique de l’ONU où il reste le seul continent à ne disposer, en son sein, d’aucune représentation permanente « alors que l’essentiel des enjeux démographiques sociaux et environnementaux de la planète sont liés » à l'Afrique. D’où son plaidoyer pour un Conseil de sécurité juste, plus équitable et représentatif du peuple du monde. 

Halte aux inégalités !                         

Dans son souci de voir la communauté des nations jouer pleinement son rôle dans l’équilibre mondial à l’heure où l’humanité tout entière est engagée dans un élan sans précédent dans le cadre de l’agenda de développement à l’horizon 2030, Félix Tshisekedi prône l’unité, la solidarité, la tolérance et la coopération internationale, des valeurs essentielles de la Charte de l’ONU sans lesquelles le monde n’aurait peut-être jamais existé. Aucun pays, a-t-il soutenu, ne peut faire face à lui tout seul aux défis de l’humanité tels que ressortis dans les Objectifs de développement durable, dans le programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement de développement ainsi que dans l’Accord de Paris sur le climat. « Les inégalités et les sentiments d’exclusion sont à l’origine des principales menaces sur la paix, la stabilité et le développement », a-t-il déclaré en substance, sidéré par les flux migratoires incontrôlés des peuples entiers à la recherche d’un meilleur avenir aussi bien dans les pays du Nord  que ceux du Sud. Toute une interpellation destinée à faire reculer un peu plus « les reflexes xénophobes, la montée en force de populisme ainsi que la radicalisation des laissés-pour-compte ».

Abordant le volet sécuritaire dans la sous-région des Grands Lacs, le chef de l'Etat congolais a mis une emphase particulière sur la Mission des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) qui, dans son entendement, a encore de beaux jours dans son pays, quitte à réadapter sa configuration « à l’évolution de la situation sur le terrain, en concentrant davantage les efforts sur les capacités d’intervention opérationnelle des forces onusiennes aux côtés des Forces armées de la RDC ».

Bien plus, dixit le premier d’entre les Congolais, la Monusco réformée devra être « non pléthorique, bien équipée, forte et dotée d’un mandat adapté à l’image de la brigade d’intervention rapide qui avait jadis mis en déroute le mouvement rebelle du M23 ».  Et dans la perspective du rétablissement de la paix dans la sous-région en proie à l’activisme des mouvements rebelles et terroristes proches de Daech, le président de la République a réitéré sa proposition faite, en juillet dernier, au trente-neuvième sommet de la Communauté de développement d’Afrique australe, celle portant création d’une coalition régionale à l’image de la coalition mondiale contre le terrorisme, pour éradiquer le fléau de l’insécurité créé par les groupes armés d’origine interne et externe.

Partisan de la Zone de libre-échange continentale, Félix Tshisekedi est  convaincu que son pays a vocation à jouer la carte de l’intégration africaine. D’où l’impulsion donnée au programme de développement d’infrastructures en cours à la hauteur de son immense superficie de 2,3 millions de kilomètres carrés, l’objectif étant « de relier le pays d’ouest en est et du nord au sud, de faciliter le transit des biens et des personnes et de libérer le potentiel agricole » de ses provices. Dans le même ordre d’idées, il a plaidé pour une exploitation réglementée du sous-sol congolais dont il propose, par ailleurs, une utilisation rationnelle contre un accompagnement à l’industrialisation et à la production des batteries et des composants à plus haute valeur ajoutée. La République démocratique du Congo (RDC), a-t-il dit, « détient environ 70 % des réserves mondiales des métaux stratégiques indispensables pour réaliser la transition énergétique et numérique qui s’impose à l’humanité ». Et d’ajouter : « Le monde a soif de cobalt, de coltan et de lithium. Nous voulons des emplois industriels, de la formation et du développement ».

La RDC, la solution à la pauvreté

Dans la foulée, le président de la République a évoqué sa volonté de transformer le potentiel agricole congolais avec ses quatre-vingts millions d’hectares de terres arables et ses quarante millions irrigables. Deux milliards d’individus peuvent être nourris par le potentiel agricole de la RDC, a-t-il soutenu, convaincu que dans la dynamique de lutte engagée contre la pauvreté à l'échelle universelle, ce pays peut justement faire partie de la solution.

Parlant des acquis démocratiques engrangés depuis son investiture, Félix Tshisekedi, outre les garanties accordées à l’ensemble des droits et des libertés ainsi que la matérialisation de la décrispation politique, a mis en exergue la parité homme-femme dans les institutions, laquelle est passée de 6 à 18 % concernant le taux de participation des femmes. Autre dividende à mettre à son actif, l’effectivité de la gratuité de l’enseignement de base en RDC avec, à la clé, la perspective de porter le budget du secteur de l’éducation de 8 à 20%, soit à un niveau proche des standards internationaux tels que recommandé par l’Unesco.

Abordant enfin le chapitre de la maladie à virus d'Ebola, Félix Tshisekedi a salué la solidarité manifestée par les Nations unies et par l’Union africaine dans la lutte contre cette épidémie, tout en encourageant l’organe en charge de la riposte qu’il a mis en place, sous la coordination du Dr Jean-Jacques Muyembe. « La nouvelle stratégie de riposte commence à produire des effets, notamment à Goma qui est déjà à l’abri », a-t-il révélé, précisant que cette nouvelle donne sera renforcée par l’introduction de cinq nouveaux médicaments approuvés, en plus du vaccin contre la maladie à virus Ebola. Un pas dans la bonne direction.

 

Alain Diasso

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