Feuilleton collège Saint-Théophile de Lemba : la bonne foi de l’Église catholique mise à rudes épreuves

Lundi 18 Septembre 2017 - 17:01

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Alors que les trois audits diligentés au sein de cette école ont confirmé les revendications des enseignants signataires des lettres adressées aux autorités de l’Église et de l’EPSP sur le détournement de leurs dus qui ont conduit à la suspension du recteur « détourneur », lesdits signataires sont menacés de perdre leur boulot, même physiquement, en étant mis à la disposition de la sous-coordination.

 

L’affaire du détournement des dus des enseignants du collège Saint-Théophile de Lemba, évoquée dans notre édition du 30 août 2017, est loin d’être terminée malgré la suspension du frère recteur, auteur des faits décriés. Bien que les autorités étatiques et de l’Église attendent voir la fin de cette « sale » histoire, cette dernière prend des tournures inquiétantes pour l’EPSP, l’Église catholique ainsi que pour les parents d’élèves de cet établissement scolaire.

Selon les informations émanant de ces milieux, en effet, des stratagèmes sont en train d’être imaginés en vue de blanchir et de réhabiliter le recteur suspendu pour lui permettre de continuer sa besogne et de satisfaire une clique d’amis, membres de la Congrégation des frères joséphites de Kinzambi, qui partagent les mêmes intérêts. À en croire ces sources,  un autre audit est en préparation en vue de contredire tous les précédents, malgré les faits avérés, et lever la suspension du recteur Nico Kalulu. Aussi, les signataires de ces lettres sont-ils menacés de perdre leur boulot. La preuve ? Une lettre du 16 septembre 2017 numérotée SG/82/KP/2017 adressée au frère intendant Jean-Paul Mvula relatif à son changement de statuts qui fait de lui le nouveau directeur des études de ce collège en remplacement de M. Joël Malenda, alors que celui-ci, qui assume l’intérim du recteur, n’a pas été notifié. Et sachant qu’à la fin de cette mission (intérim), il va rejoindre son poste de directeur des études. Le péché du recteur par intérim est d’avoir rapidement organisé les élections des représentants des enseignants, et ces membres élus sont reprochés d’avoir rapidement fixé la base de la motivation des enseignants.

Le cardinal Monsengwo appelé à se renseigner à la bonne source

Cette situation qui prévaut au collège Saint-Théophile de Lemba risque de perturber la paix sociale au sein de cet établissement scolaire. L’année scolaire qui vient de commencer connaît déjà des problèmes. Mais il y également un fort risque d’éclabousser l’Église catholique et de ternir son image. La Congrégation des frères joséphites de Kinzambi ne rassure plus, étant donné que les plus hautes autorités de cette confrérie en RDC seraient dans cette mafia dont le bras agissant au collège Saint-Théophile serait le recteur suspendu. Pour avoir la bonne information sur ce qui se passe dans cette école, le cardinal congolais peut se ressourcer auprès des autorités de l’État dont le ministre chargé du secteur, la coordinatrice et le sous-coordinateur, l’IPP ainsi que les enseignants parmi lesquels ceux qui ont signé les lettres fustigeant cette situation.

Des dettes contractées au nom de l’école

Selon les informations glanées auprès de cet établissement scolaire, le nœud du problème serait les dettes contractées au nom du collège auprès d’une banque de la place ainsi que d’autres à charge de cet établissement scolaire sous diverses identités. La Fibank en liquidation, par exemple, a sommé le frère-recteur Nicodème Kalulu Manzumbu de passer à ses guichets, dans un délai de sept jours francs à dater de la réception de cette sommation du 10 août 2017, pour honorer ses engagements. Selon cette correspondance, la fiche des débiteurs de cette banque renseignait que le frère est resté redevable envers la banque d’un montant global de 62 808, 49 dollars américains…  « Ces dettes sont connues de ses supérieurs dont certains sont ses amis personnels. Pour lui permettre de s’en acquitter, ils veulent l’imposer au collège Saint-Théophile », accuse-t-on.

Un conglomérat qui vit au dépend des enseignants

Traçant le parcours du frère recteur suspendu, les informations récoltées note un parcours peu élogieux pour un religieux. Après sa radiation par les services de l’inspection à Kikwit, le frère est passé par Kisangani et retourné en famille pour des motifs que l’opinion hésite à dévoilé pour éviter de scandaliser la société. Récupéré par l’actuel supérieur de cette congrégation, il a été nommé recteur au collège Saint-Théophile. « Sa présence, quatre ans durant, a été un calvaire pour les familles des professeurs, administratifs et ouvriers du collège Saint-Théophile », se plaint-on.

Au sein de cette école, le frère Nico a tissait une toile d’araignée lui permettant d’avoir les informations sur tous les mouvements qui s’y passaient. Ce qui lui a permis de maîtriser ce collège qui compte plus de quarante licenciés et cadres universitaires. « N’importe quel professeur qui osait poser la question sur sa situation était soit révoqué ou il recevait une mutation punitive. Les professeurs étaient terrorisés. Les professeurs méthode Nkwa, Justin Pau, Jules Sona, Paulin Leta, Gaston Esoye, Magelan Mangela, etc. connaissent la force du frère-recteur », souligne-t-on à Saint-Théophile où trois audits ont confirmé sa mégestion telle que décriée par les professeurs, qui l’ont accusé du détournement de leurs dus.

De l’avis de ces sources, cette situation a connu le début de dénouement grâce à l’intervention personnelle de l’actuel ministre de l’EPSP, Gaston Musemena, qui a réagi à l’une des correspondances de ces professeurs, en ordonnant la suspension du frère incriminé. Aussi, la réaction du cardinal Laurent Monsengwo qui, mis au parfum de cette affaire, a également brisé le bras de fer entre les différentes pouvoirs afin d’obtenir la mise à l’écart du frère recteur. Ce qui a empêché les supérieurs de la congrégation des joséphites de Kinzambi de se comporter en protecteur du frère accusé.

Mais, après cette suspension du recteur, l’un des professeurs signataires de cette lettre, John Kipasa, a été enlevé par des personnes en civil, qui l’on amené dans les locaux des services de sécurité où il a été questionné sur des sujets politiques alors qu’il n’a jamais fait la politique. Des interventions, notamment du président de l’Association congolaise pour l’accès à la justice, Me Georges Kapiamba, ont fait que son innocence soit établie et qu’il soit libéré.

Un signal fort pour d’autres responsables d’écoles

Ce qui se passe au collège Saint-Théophile doit interpeller d’autres  responsables d’écoles qui s’adonnent à la mégestion des ressources humaines et financières. C’est le cas d’une école de Salongo où le préfet, une religieuse, a dit à ses agents : « Vous qui avez l’habitude d’écrire, avez-vous appris que les professeurs du collège Saint-Théophile qui réclamaient leurs primes ont été désillusionnés de voir leur préfet reconduit à son poste sans avoir satisfait à la réclamation de ses agents ? » Un autre, pas loin de Lemba terminus, a été contraint de revoir ses calculs à la suite des menaces des  enseignants qui ont promis de faire comme ceux de Saint-Théophile. Décidément, peut-on penser, le réseau des écoles catholiques est miné des loups vêtus en peau d’agneau, qui risquent de ternir l’image de cette Église et sa hiérarchie dont l’apport sur la vie des peuples n’est plus à démontrer.

Lucien Dianzenza

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