Guinée-Bissau : le président démet le gouvernement

Mardi 29 Octobre 2019 - 12:32

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José Mario Vaz a pris un décret dans lequel il limoge les membres du gouvernement, jetant le doute sur la tenue de l’élection présidentielle prévue fin novembre, au moment où son pays est confronté à une crise politique.

« Le présent décret présidentiel entre immédiatement en vigueur », stipule le second article du texte rendu public, le 28 octobre. Dans ce document, le chef de l'Etat relève avoir constaté une « grave crise politique qui empêche le fonctionnement normal des institutions de la République », le conduisant à démettre le gouvernement.

Certains observateurs sur place estiment que le décret publié est le dernier épisode en date d'une confrontation de plusieurs mois entre présidence et gouvernement, en ce sens aussi qu’il sème l'incertitude sur les lendemains politiques de la Guinée-Bissau, ce petit d'Afrique de l'ouest peuplé de moins de deux millions d'habitants. « Les effets pratiques de cette décision sont incertains, mais elle semble de nature à compromettre la tenue de la présidentielle à la date prévue du 24 novembre, malgré l'insistance de la communauté internationale sur le respect du calendrier », soutient l’un d’eux sous-couvert d’anonymat.

Le président José Mario Vaz a annoncé la dissolution du gouvernement, alors qu’il y a quelques jours, le Premier ministre, Aristide Gomes, dénonçait un projet de coup d'Etat, accusant le candidat de l’opposition, Umaro Sissoco Embalo, d’en être le commanditaire.

Dans son message, le chef du gouvernement, membre de la première formation parlementaire, le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), signalait que les instigateurs du projet prévoyaient de le mettre en prison, ainsi que plusieurs de ses ministres, « à la suite d’actions de vandalisme en préparation pour les prochaines heures ». Il écrivait sur sa page Facebook : « Un coup d’Etat est en préparation pour arrêter le processus de préparation de l’élection présidentielle du 24 novembre ».

Pour le Premier ministre bissau-guinéen, un pays chroniquement instable d’Afrique de l’ouest, « l’auteur de cet acte » est identifié « clairement et de manière univoque ». Il s’agit, avait-il poursuivi, de l’ex-Premier ministre, Umaro Sissoco Embalo, candidat à la présidentielle du Mouvement pour l’alternance démocratique, formé par des frondeurs du PAIGC.

Un coup d’Etat démenti

Le chef du gouvernement avait affirmé détenir des « preuves matérielles » pouvant être dévoilées au moment opportun. Malgré cela, il s’était dit déterminé à poursuivre la préparation du scrutin du 24 novembre, pour lequel douze candidats s’étaient déjà annoncés, dont le président sortant, José Mario Vaz.

Réagissant à ces accusations, le candidat de l’opposition les avait rejetées en bloc, les qualifiant de « cabales ». Umaro Sissoco Embalo avait confié à la presse:« Je ne suis pas un bandit et je n’entre jamais dans des actions subversives. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas violent. Cela fait un mois que je ne suis pas à Bissau. Ce sont des cabales montées contre ma personne par des gens qui ont peur de moi ».

En attendant la tenue du scrutin, la communauté internationale insiste toujours sur le respect de la date prévue, malgré les réticences de l’opposition, qui juge ce calendrier difficilement tenable.

Dans le but de favoriser le bon déroulement de l’élection présidentielle, l’Ecomib, la force de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao), a renforcé ses patrouilles dans la ville, selon des sources concordantes. Cette force avait été déployée en 2012 en Guinée-Bissau pour y sécuriser la transition politique, après le dernier putsch, qui avait interrompu la présidentielle cette année-là.

Le 10 mars dernier, les élections législatives s’étaient bien déroulées dans le pays. Malgré cela, la Guinée-Bissau tente encore de sortir de la crise qu’elle traverse depuis le limogeage, en août 2015, par le président José Mario Vaz, de Domingos Simoes Pereira, chef du PAIGC, jusque-là son Premier ministre et qui sera candidat, le 24 novembre.

L’actuel président a terminé son mandat de cinq ans, le 23 juin. Depuis lors, il est resté à la tête du pays, mais a laissé la conduite des affaires au gouvernement qu'il a formé début juillet, jusqu'à la tenue de la présidentielle, à la suite d'une décision de la Cédéao.

La Guinée-Bissau est une ancienne colonie portugaise, devenue indépendante en 1974, après une lutte de onze ans. Depuis lors, elle a connu quatre putschs, seize tentatives de coup d’Etat et une valse de gouvernements.

 

 

 

Nestor N'Gampoula

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