Interview. Achille Bondo : « Nous avons besoin d’une diplomatie de paix pour développer l’économie et le commerce en RDC »

Lundi 29 Janvier 2018 - 17:45

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L' économiste et chrétien engagé a présenté au public son dernier ouvrage intitulé "Document des stratégies pour la gestion des ressources naturelles en RDC". Dans notre dernière livraison, nous avons présenté les nombreuses propositions de l’auteur, dont l’instauration d’un Pacte de gestion des ressources naturelles pour impliquer davantage tous les Congolais dans cette démarche. En marge de la conférence tenue à l’Église du Christ au Congo, Le Courrier de Kinshasa l’a approché pour obtenir toute la lumière possible sur les étapes restantes après la première communication devant les médias, les mécanismes d’approche du monde politique et la place de nombreux pays voisins, dont certains sont accusés d’être impliqués directement dans l’exploitation illégale des minerais du pays. Achille Bondo plaide pour une diplomatie de paix, capable de mieux sécuriser le pays.

Le Courrier de Kinshasa (L.C.K.) : Votre « Document » préconise une petite révolution dans la manière de gérer nos richesses nationales. Mais par où commencer, car le projet paraît trop complexe pour être mis en œuvre ?

Achille Bondo (A.B.) : Nous n’allons pas tout embrasser en même temps. Il faut une démarche ordonnée et des projets pilotes dans différents secteurs ainsi ciblés : forêts, agriculture, énergies, mines… Pour le secteur minier en particulier, nous jugeons important que l’État conserve une concession minière stratégique pour continuer à intervenir dans le secteur et ne pas se contenter d’un simple rôle de collecteur d’impôt. On ne peut pas tout mettre à la disposition des privés.

L.C.K. : Par rapport aux étapes restantes, comment comptez-vous élargir le débat, y a-t-il d’autres communications en vue dans les universités ou dans d’autres villes du pays ?

A.B. : Nous avons voulu donner une suite à ce travail. C’est la raison pour laquelle nous remercions le président de l’Église du Christ au Congo qui a accepté de faire don de cet ouvrage aux universités nationales pour aider nos étudiants à s’engager dans le domaine de la recherche appliquée en matière de gouvernance des ressources naturelles. Il s'agit déjà d’une piste intéressante qui donne des orientations pour la suite. Il y a également le projet de «Pacte national » pour la gouvernance des ressources naturelles. Cette sorte de protocole d’accord national vise à faire la cohésion nationale autour d’un thème qui nous unit au bout du compte. En effet, il s’agit d’une propriété commune. Si tout le monde se met d’accord pour dire que ces ressources doivent être profitables à tous, mettons-nous ensemble pour voir comment réaliser ce projet. Une telle initiative va contribuer à nous apporter la cohésion, la paix et même l’unité comme l’a si bien dit un expert lors des échanges. Pour l’instant, ces ressources naturelles nous attirent beaucoup d’ennuis. Il faut bien les gérer et tout le monde doit s’impliquer. Cela contribuera forcément à la stabilité du pays.

L.C.K. : Beaucoup d’experts ont relevé justement le fait que vous aviez « superbement évité » de parler des politiques au cours de votre exposé. Comment allez-vous alors faire la connexion avec le monde politique pour proposer votre « Pacte national » en matière de gouvernance des matières naturelles ?

A.B. : Effectivement, il y avait beaucoup de questions sur le monde politique. Nous visons plutôt les partis politiques. Très franchement, dans ce pays, on n’arrive pas toujours à cerner le rôle exact des partis politiques. D’ailleurs, on les entend dire très souvent que le rôle d’un parti politique est de conquérir et de conserver le pouvoir. Ce n’est pas vrai. Son rôle est d’abord de viser l’intérêt général, d’avoir un projet de société et, tout à la fin, d’accéder au pouvoir, après avoir établi des objectifs clairs. On place d’abord l’intérêt général en première place. Ensuite, on se dit que le moyen de faire profiter ce projet à la population est d’accéder au pouvoir. Chez nous, on se limite à conquérir le pouvoir et à le conserver. Il faut une vision véritablement de développement pour le pays et une organisation pour accéder au pouvoir par des moyens légaux pour l’exercer au bénéfice de la société.

L.C.K. : Au regard de sa position géostratégique, la RDC compte un nombre élevé de pays voisins. Vous avez parlé des politiques à mettre en œuvre pour mieux gérer les ressources naturelles. Quelle est la place des pays voisins dans votre vision ?

A.B. : La RDC est un pays qui compte actuellement dix voisins, si l’on ajoute bien entendu le Sud-Soudan. Nous avons des ressources partagées, notamment celles relatives à l’eau, au pétrole, à l’énergie, etc. Nous devons inclure ce volet dans le cadre d’une diplomatie visant à créer des relations de bon voisinage et des partenariats gagnant-gagnant. Nous avons besoin d’une diplomatie de paix dans les domaines de l’économie et du commerce. Il est important de promouvoir l’image du pays mais également nos valeurs.

Propos recueillis par Laurent Essolomwa

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