Interview. Bertin Nzangué: « Ma passion et ma fougue artistique s’inspirent beaucoup d’Antoine Létembet Ambili »

Jeudi 29 Février 2024 - 21:58

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Bertin Nzangué, artiste congolais multidisciplinaire, est conteur, crieur, griot, poète, comédien et s’essaie également dans le roman. Il dit avoir hérité sa démarche artistique de l’écrivain Antoine Létembet Ambili. Entretien.

Les Dépêches du Bassin du Congo (L.D.B.C.) : Pouvez-vous nous parler de vos débuts dans le métier de griot ?

Bertin Nzangué (B.N.) : Je dirai que c’est parti d’une histoire humanitaire. Je me suis retrouvé à Kinshasa, au camp des refugiés, pendant la guerre du 5 juin 1997. Dans le camp, je constatais que les enfants étaient là, malheureux et abandonnés à eux-mêmes. J’avais donc pensé à organiser, sur autorisation de l’Unicef, des soirées de contes. J’animais pendant trois jours dans la semaine. Arrivé à Kinshasa, j’étais dans la compagnie de théâtre les Intrigants et en ces jours-là, je faisais la même chose à Kinkolé. Rentré à Brazzaville, je suis appelé par des amis. Puisque je n’étais pas encore préparé au théâtre, je vais être remorqué par Loukaya Lua Ndouenga pour devenir comédien (…). Après là, je vais représenter le pays aux 4es Jeux de la Francophonie au Canada, et à la biennale de la langue française en tant que pionnier de cette langue. De là, je suis resté douze ans ne vivant que de l’art en échangeant de l’expérience avec ceux qui étaient mieux outillés que moi.

L.D.B.C. : Quels sont les thèmes qui reviennent dans vos interprétations ?

B.N. : C’est l’homme au centre de tout. L’homme dans ses droits, dans les conflits inter-hommes, le racisme, la discrimination à l’endroit des êtres vulnérables, et la sensibilisation à la citoyenneté, l’appel à l’amour, la motivation des jeunes, l’encadrement par la voix, le texte ou par le message. J’aborde presque tous les thèmes et aucun ne m’est étranger. Tout est en moi, et comme j’aime à le dire, l’intelligence est dans l’air.

L.D.B.C. : Quand on vous voit sur scène, vous emballez le public. De qui avez-vous hérité cela ?

B.N. : Il ne faut pas mystifier les choses. Je ne dirai pas que mon grand-père que je cite souvent quand je chante en langue. Je pense à ma mère, à ceux qui m’ont précédé. J’aime bien Tchicaya U’Tamsi ; je pense à Sony Labou Tansi. Mais j’ai le sang d’Antoine Létembet Ambili; c’est mon père, et techniquement mon oncle. Mais le jour où il a vu pour la première fois mon passage à l’émission « Autopsie » sur la chaîne de télévision DRTV, il s’est exclamé: « Ah, enfin j’ai un héritier !  ». Je me permets de dire que j’ai hérité cela de Létembet Ambili. Mais celui qui m’a beaucoup plus encadré c’est Jean-Blaise Bilombo Samba. Pour le reste, je crois en Dieu. Ce n’est donc pas moi seul qui amène les gens à se lever mais aussi ceux qui sont là.

L.D.B.C. : Vous avez une façon à vous de contextualiser les textes. Comment expliquez-vous cela ?

B.N. : C’est vrai. Comme je le dis souvent, un maçon se nourrit de sa truelle, le bon menuisier de son rabot et un bel artiste de son art. Je suis donc condamné à l’excellence. Je me rappelle un jour, mon grand Ngampika Mpéré, mon précurseur que je voyais sur scène couvert de raphia, je me disais si je pouvais faire comme lui, ce serait bien. Donc je ne suis pas en train de réinventer la roue, je fais ce que les aînés ont fait avant moi mais qui est différent de ce que je fais.

Propos recueillis par Achille Tchikabaka

Légendes et crédits photo : 

Bertin Nzangué, artiste congolais multidisciplinaire/DR

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