Les peintres de l’école de Poto-Poto s’insurgent contre le ministère de la Culture et des Arts

Lundi 7 Novembre 2016 - 11:44

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Les artistes de la prestigieuse Ecole de peinture de Poto-Poto réclament leur autonomie vis-à-vis du ministère de la Culture et des arts qu’ils accusent de mener des activités dépravantes dans l’enceinte de leur établissement. Dans une interview exclusive accordée aux Dépêches de Brazzaville, ils soutiennent cette position et refusent dorénavant d’être sous tutelle de ce ministère.

Les Dépêches de Brazzaville. Que se passe-t-il à l’École de peinture de Poto-Poto ?

Les peintres de Poto-Poto. Il se passe de grandes dérives ici à l’école de peinture de Poto-Poto. Ces dérives sont orchestrées par le ministère de la Culture et des Arts qui organise des activités dépravantes dans notre enceinte. Nous donnons raison à celui qui a dit « chassez le naturel, il revient toujours au galop ». Ce n’est pas la première fois que l’école se trouve envahie par des vendeurs de fortune au travers d’une kermesse.  Nous ne voulons plus que soient organisées ici de telles. Que le ministère aille faire de l’argent ailleurs et non sur notre dos. D’ailleurs, à un certain moment, nous nous demandons, si le ministère en amassant ces énormes moyens par semaine auprès des Brasseries du Congo (Brasco) le fait pour le compte de l’État.

LDB. Que voulez-vous insinuer par-là ?

LPPP. Nous n’insinuons rien. Tout ce que nous voulons, c’est que le ministère arrête avec les kermesses chez nous. Dans le même temps qu’il libère notre bâtiment annexe réservé pour la salle informatique. Le ministère a transformé ce bâtiment en petit bureau pour placer des décisionnaires pris çà et là afin de se servir copieusement de notre subvention. Nous ne voulons plus voir quelqu’un ici. Et cette fois-ci nous ne sommes pas prêts à  nous laisser faire. C’est pour cela que nous demandons l’intervention du président de la République. Il est pour la rupture et nous souhaitons donc qu’il ne laisse pas certains membres du gouvernement annihiler ses efforts dans ce sens.

LDB. L’école est sous tutelle du ministère de la Culture et des Arts, ce qui sous-entend que le ministère peut créer une direction pour vous gérer

LPPP. C’est faux ! L’École de peinture de Poto-Poto appartient aux artistes. Si le ministère pense que cette école lui appartient qu’il nous montre les documents juridiques qui l’attestent. Nous avons des artistes peintres qui travaillent ici pour certains depuis trente-cinq ans,  pourquoi ne bénéficient-ils pas de salaires de l’État? Nous ne voulons plus entretenir ce flou de tutelle.  Le ministère de la Culture et des Arts est notre partenaire et non notre tutelle. Ceci étant, il doit respecter ce partenariat et nous laisse gérer notre école nous-mêmes comme par le passé. Pourquoi vouloir toujours nous réduire alors que nous faisons la fierté du pays à l’étranger ? Que les gens cessent de nous réduire à rien pour des intérêts cupides.

LDB. L’espace appartient-il à l’État ou aux peintres ?

LPPP. Lorsque Pierre Lods  a quitté le Congo, les quatre États de l’Afrique équatoriale française (AEF) ont légué gracieusement cet espace à l’École de peinture de Poto-Poto, qui s’appelait autrefois l’Atelier d’art africain. Donc c’est notre espace. Nous ne voulons plus que soient organisées des kermesses ici. À moins bien sûr que ce soit des manifestations conformes à ce que nous faisons.

LDB. Quel est l’impact de ces kermesses sur le travail que vous faites ?

LPPP. Ces kermesses à répétition, non seulement  nous empêchent de travailler, de réfléchir, mais aussi d’écouler nos tableaux. Pour preuve, pendant qu’il y avait la kermesse ici, le ministre congolais des Affaires étrangères recevait son homologue rwandaise. Il a envoyé son protocole en précurseur ici à l’école parce que la ministre rwandaise voulait bien visiter notre établissement et bien entendu acheter les tableaux. Malheureusement, comme il y avait la kermesse, les deux hommes d’État ne sont pas venus. Cela fut une perte pour l’école tant en notoriété qu’en finances mais ce n’est pas l’unique cas. À cela s'ajoute celui de la Première dame qui devait passer ici avec cinq  premières dames d’Afrique qu’elle recevait au Congo. Nous avons  aussi perdu six  tableaux durant la kermesse organisée par la société de téléphonie mobile MTN qui a duré deux  mois, à l'initiative du ministère de la Culture et des Arts. Qui va les payer ? En outre, ils sont partis  en laissant derrière eux des tas d’immondices. Présentement, nous sommes en train de souffrir pour les déblayer.

LDB. Quel message lancez-vous ?

LPPP. Nous ne voulons plus que le ministère de la Culture et des Arts affecte notre espace aux activités telles les kermesses. J’en profite aussi pour informer nos partenaires que cette année l’école de peinture de Poto-Poto va célébrer ses 65 ans au mois de décembre.

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Le président de l'association des peintres de l’École de peinture de Poto-Poto, Sylvestre Mangouandza devant les immondices laissées par la Kermesse Photo 2 : Les peintres de Poto-Poto montrant les tas d’immondices abandonnés après la Kermesse Photo 3 : L’École de peinture de Poto-Poto

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