Massacre de Yumbi : la communauté Banunu-Bobangi réclame justice avant réconciliation

Samedi 21 Décembre 2019 - 13:02

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Les ressortissants de la communauté à Kinshasa ont organisé, le 18 décembre à la paroisse Saint-Anne, dans la commune de Gombe, une messe de suffrage en mémoire des leurs tués dans la province de Mai-Ndombe.

Diverses personnalités et ressortissants de Yumbi ont pris part à la messe dite par l’abbé Koko. Durant l'homélie, l'abbé a donné la parole à Fiyou Ndondoboni, porte-parole de la communauté de Banunu-Bobangi, qui a eu des mots émouvants pour rappeler la tragédie vécue. « Une année après, jour après jour, dans la douleur, nous célébrons la mémoire de nos enfants, parents, frères et sœurs tombés dans les circonstances inhumaines dans les cités de Yumbi, Bongende, Nkolo et alentours. Cette célébration est une opportunité pour porter haut la voix de ceux qui ne pourront plus jamais parler pour que justice soit faite, mais aussi une responsabilité pour définir ce que nous sommes censés bâtir demain », a-t-il d’emblée souligner. 

Fiyou Ndondoboni a parlé de Banunu-Bobangi, un peuple riverain s’étendant le long du fleuve Congo, indiquant que « c’est l’une des rares communautés qui se retrouve dans plusieurs provinces (Kinshasa, Mai-Ndombe, Equateur…) parce qu’elle est identifiée à l’eau. C’est un peuple pacifique, fier de son identité et dont la culture a pour base le fondement de l’évangile à cause de l’influence des missionnaires britanniques qui ont installé dans les années 1878 à Bolobo leur état-major, une cité Banunu Bobangi ». Il a rappelé qu'au lendemain des événements tristes de Yumbi, Bongende et Nkolo du 17 et 18 décembre 2018, un comité de crise avait été mis en place, avec les notables de Kinshasa, pour suivre les actions telles que définies par le président de la République, Félix Tshisekedi, en vue d’une prise en charge de ces communautés locales.

L’on apprend que plusieurs réunions ont été organisées et abouti à la définition de Yumbi comme une zone opérationnelle qui dépendrait de Kinshasa et non d’Inongo, l’envoi de deux cents éléments de Kinshasa pour la sécurité supplémentaire, le maintien de l’administrateur du territoire actuel afin de garantir la sécurité, l’envoi d’une mission de génie militaire en vue de reconstruire les maisons détruites, l’arrestation des personnes soupçonnées d’être impliquées dans le massacre, etc. Il y a eu aussi l’élaboration du rapport officiel du massacre de Yumbi par le ministère des Droits humains et l’exigence officielle de connaître la vérité, d’obtenir la justice et ce, avant de procéder à une réconciliation, car il n’y a pas de paix sans justice et pas de justice sans réparation. 

Par ailleurs, Fiyou Ndondoboni s'est interrogé sur le retard pris pour organiser le procès contre les auteurs de cet acte ignoble, « commis à découvert, en pleine journée et plein XXIe siècle alors qu’une dizaine des présumés coupables de ces tueries sont aux arrêts depuis des mois ». Tout en gardant espoir en la Justice, le porte-parole des Banunu-Bobangi a loué les actions de construction des maisons par le gouvernement, sollicitant la poursuite des travaux de ce projet avec plus de visibilité et d’impacts populaires.

Dans sa brève intervention, l’ambassadeur Lucien Igor Bomina N’Çoni Longange, président général des Nunu-Bobangi, a rappelé ce qu’il appelle le pogrome abject qui s’est produit les 16, 17 et 18 décembre 2018 à Yumbi, Bongende et Nkolo-Yoka. « Plus de cinq cents Nunu-Bobangi ainsi qu’un nombre non négligeable des riverains, confondus avec les Nunu-Bobangi, seront suppliciés et exécutés de sang-froid. En dehors de machettes, des armes de guerre auraient été utilisées par une horde crapuleuse et sadique des tueurs. Je m’interdis ici dans la maison du Seigneur et ce, rigoureusement, de vous relater ce qu’ont subi nos femmes, dont certaines étaient enceintes, et nos fillettes et nos filles nubiles. En ces jours horribles, un exode de plus de sept mille personnes s’ensuivra en direction de Makotimpoko au Congo Brazzaville, exode ponctué des noyades et des brimades atroces, car leurs bourreaux leur courraient desssus », s’est souvenu avec émoi l’ambassadeur dans ses mots.

Notons que pendant ces trois jours, les attaques perpétrées par la communauté de la tribu Batende sur les Banunu-Bobangi ont eu lieu alors que Gentiny Ngobila, actuel gouverneur de la ville-province de Kinshasa, était gouverneur de la province de Mai-Ndombe, lui qui fait partie de la tribu Batende. Il y a eu des doigts pointés en son encontre comme responsable, mais la communauté Banunu-Bobangi attend vivement le procès afin que des responsabilités soient clairement établies sur ce massacre aux allures d’épuration ethnique et que justice soit faite avant toute action visant la réconciliation entre Banunu-Bobangi et la communauté de Batende.

Martin Enyimo

Légendes et crédits photo : 

Le bureau de la Céni brûlé lors des attaques

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