Nord-Kivu : un massacre de trop à Beni

Mardi 16 Août 2016 - 19:48

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Au moins quarante-deux  civils ont été tués le week-end à Beni (Nord-Kivu), un massacre attribué aux rebelles musulmans ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF).

Alors qu’une dynamique de paix tendait à s’installer progressivement dans la région à la suite de la visite du président Joseph Kabila à Gisenyi (Rwanda) ainsi qu’à Kasese (Ouganda) où il était question de scruter les voies et moyens de neutraliser les forces négatives sévissant à l’est du pays, la ville de Beni au Nord-Kivu vient, pour la énième fois, d’être le théâtre d’une nouvelle tragédie. Les rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF) opposés au président ougandais, Yoweri Museveni ont, de nouveau frappé en tuant près de quarante-deux civils et incendiant trente-quatre maisons dans ce territoire congolais qui, depuis octobre 2014, n’a pas encore fini de compter ses morts.

Les faits,  à en croire les témoignages, se sont déroulés dans la nuit de 13 et 14 août entre 19h00 et 23h00 (heure locale). Les présumés ADF auraient, d’après une source militaire, « contourné » les positions de l'armée congolaise « pour venir massacrer la population en guise de représailles » à des opérations militaires en cours dans la zone. Cette recrudescence de la violence devenue cyclique à Béni est décryptée par ses habitants comme résultant d’un déficit sécuritaire criant, preuve de l’incapacité notoire des gouvernants à leur garantir une paix durable. Excédés, les habitants des quartiers nord de la ville sont descendus, au lendemain de ces tueries, dans la rue en brûlant des pneus en signe de protestation contre les autorités de qui ils attendent des réponses idoines aux revendications d’ordre sécuritaire qui sont les leur.

Intervenant après une succession de massacres ayant déjà fait plusieurs centaines de morts en moins de deux ans, celui de ce week-end apparaît comme de trop pour une population réduite à l’expectative et assistant toujours impuissante à la folie meurtrière des groupes armés locaux et étrangers. À ce jour, à en croire la coordination des sociétés civiles des territoires de Beni, Butembo et Lubero (Nord-Kivu), le décompte avoisinerait déjà quelques mille personnes tuées en un an et demi, plus de mille quatre cents kidnappings et des centaines de maisons incendiées. Une provocation vis-à-vis des autorités congolaises ? En tout cas, nombreux sont ceux qui accréditent de plus en plus cette thèse, étant entendu que ces tueries attribuées aux ADF, présents dans l'est de la RDC depuis 1995, surviennent seulement 72 heures après que Joseph Kabila a promis, à partir de l’Ouganda où il était en visite de travail, de tout mettre en œuvre pour « imposer » la paix et la sécurité dans la région en mettant un point d’honneur sur la traque des forces négatives qui y pullulent.

Loin de verser dans le scepticisme et d’être gagnées par le découragement, les Fardc continuent de maintenir la dragée haute concernant la traque lancée depuis le 14 mai contre l’ADF à travers l’opération Usalama (sécurité, en swahili). Il s’agit d’une opération de grande envergure avec pour objectif de neutraliser complètement la rébellion ougandaise de l’ADF par la destruction de toutes les positions utilisées par ce groupe armé pour attaquer les civils à Beni. L’opération bénéficie de l’appui de la Monusco qui intervient avec ses  troupes au sol, son artillerie, ses hélicoptères d’attaque tout en mettant en contribution son dispositif technique en matière de renseignements.

D’aucuns relativisent cependant quant au succès de cette nouvelle traque lancée contre les ADF et en appellent plutôt au déploiement d’une opération militaire internationale d’envergure à l’instar d’Artemis menée par l’Union européenne en 2003 en Ituri au nord-est de la RDC et ayant abouti à la neutralisation, en un temps record, des miliciens Hema et Lendu. À signaler que le gouvernement a décrété un deuil national de trois jours prenant effet à partir du 15 août.

Alain Diasso

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