Note souveraine : le Congo dans la moyenne des États africains

Lundi 6 Octobre 2014 - 20:00

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L’agence de notation, Standards and Poors qui évalue les risques de défaut de paiement des États, publie deux fois par an une note pour les États souverains d’Afrique, d’Europe et du Moyen-Orient. La note du Congo vient d’être confirmée à B+/B avec des perspectives stables vendredi 3 octobre. Décryptage avec Patrick Raleigh, directeur associé pour les souverains et la finance publique internationale de la structure.

Avec son B+, le Congo figure-t’il parmi les « bons élèves » du continent ?
La note du Congo se trouve au milieu de la gamme africaine qui va de A- pour le Botswana à B- pour la République démocratique du Congo. Les notes africaines se répartissent sur 10 des 20 crans de l’échelle de notation qui va de triple AAA à D pour défaut. Les 18 États notés en Afrique subsaharienne se trouvent tous entre double B ou B, à l’exception de l’Afrique du Sud et du Botswana. Concernant l’Afrique centrale, le Gabon est BB-, le Cameroun  est B et la République démocratique est B-, le Congo se situe au milieu.

Vous releviez dans votre rapport du mois d’avril que les excédents budgétaires n’ont pas été placés à la BÉAC mais à l’Eximbank et que ces dépôts ne seraient pas assez liquides, en quoi cela représente une difficulté ?
Selon les informations dont nous disposons, une partie des excédents budgétaires des années précédentes à été placée en Chine surtout à l’EximBank. En Avril notre comité de notation a émis des interrogations sur la nature de ces fonds, en particulier leur liquidité. Si un gouvernement a des avoirs liquides, c’est-à-dire qui sont librement et rapidement disponibles pour payer ses dettes, cela constitue un avantage dans notre analyse car nous soustrayons ces avoirs de l’encours brut des dettes gouvernementales pour obtenir l’encours net, qui est le plus important pour ce volet de notre analyse. Nous avons un peu plus de visibilité aujourd’hui sur les avoirs congolais en Chine. Environ 20% des ces avoirs sont séquestrés pour des raisons contractuelles mais le reste est considéré comme liquide et donc disponible pour honorer les obligations du gouvernement s’il en avait besoin.

Selon votre rapport, contrairement aux autres États pétroliers africains, la balance des comptes congolaise devrait être en déficit pour la période 2014-2017.  Pourquoi cette mauvaise performance de l’économie congolaise ?
Un déficit n’est pas en soi la preuve d’une mauvaise performance de l’économie. Il doit bien entendu être financé soit par de l’investissement direct étranger, soit par des flux de portefeuille ou de la dette étrangère. Mais il faut avant tout analyser ce qu’il y a derrière ce déficit. Dans le cas du Congo, il y a un effort d’investissement de base important de l’État et du secteur privé dans les infrastructures, les mines, l’énergie et bien sûr le pétrole, qui vont probablement augmenter la capacité de croissance de l’économie dans le moyen et long terme. Ces investissements productifs nécessitent des importations de biens, de capital et de services étant donné l’offre locale limitée et c’est cela qui pèse sur le compte courant. Le même processus se passe pour les entreprises lorsqu’elles sont dans leur phase d’investissement, elles empruntent ou offrent plus d’actions pour financer une opération que l’on espère rentable. L’importance du choix et de la qualité des investissements est décisive pour gagner ce pari.

Les importants rapatriements de leurs dividendes par les sociétés étrangères opérant au Congo influent négativement sur les comptes du pays. Le Congo aurait-il intérêt à limiter les possibilités de rapatriement des bénéfices pour les sociétés étrangères?
Nous ne pouvons pas donner une position sur le niveau idéal de rapatriement des bénéfices des sociétés étrangères. Il appartiendrait au gouvernement de décider. Tous les gouvernements doivent peser les avantages et les risques de l’imposition de contrôles sur le rapatriement de dividendes.  Il faudrait considérer l’apport potentiel pour le secteur financier local, mais aussi le risque pour la réputation du pays auprès des investisseurs internationaux qui souhaiteraient plus de flexibilité.

Propos recueillis par Rose-Marie Bouboutou