Protection sociale : « Il faut créer une entité autonome pour réguler l’assurance maladie », estime Christian Maniongui

Mercredi 18 Mai 2016 - 19:15

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Le système de sécurité sociale actuellement en vigueur au Congo prend en charge uniquement les agents de l’Etat et les travailleurs du secteur privé. C’est ainsi que le gouvernement a pris l’engagement d’étendre la protection sociale dans ses aspects de base dans l’ensemble de la population. Dans une interview exclusive aux Dépêches de Brazzaville, l’Administrateur de MAD Invest, Christian Maniongui, revient sur les résultats des études menées par son cabinet sur l’assurance maladie et présentés récemment aux autorités congolaises.

Les Dépêches de Brazzaville (LDB) : Vous avez présenté récemment un projet appelé Assurance maladie au gouvernement. Sur quoi porte-t-il exactement ?

Christian Maniongui (CM) : Nous avons fait quelques propositions aux membres du gouvernement et aux représentants de la présidence de la République. En effet, depuis trois ans, nous travaillons sur la solution de mise en place des mécanismes pour rendre accessibles les soins de santé de qualité à tous les Congolais. Au fait, c’est un projet du chef de l’Etat qui consiste à offrir dans les hôpitaux les soins de santé à tout le monde. Mais, ceci se passe avec un certain nombre de mécanismes et de dispositions légales. Il y a des textes de lois qui ont été pris, et donc on a demandé à des cabinets comme le nôtre de réfléchir aux mécanismes à mettre en place en vue de la sécurité sociale. Notre travail était de mener les études à travers le pays, pour savoir si cela est possible et comment les mettre en place à travers différents mécanismes. Nous avons donc à cette occasion, rendu publics nos résultats en interne aux différents ministères.

LDB : Quel est l’état des lieux de la situation au Congo ?

CM : Déjà, mettre en place l’assurance maladie, c’est possible, cela n’est pas une surprise parce qu’avant nous. Aujourd’hui, le travail consistait à mettre en place une solution spécifique à la réalité congolaise et comment répondre aux attentes de la République. Il s’agit notamment de mettre en place une solution d’assurance maladie dès 2016 et de mettre en place une assurance maladie sur le plus long terme avec une loi fiscale qui tienne la route avec une contribution de tous les Congolais. Cela passe par un mécanisme consensuel de différents ministères et de toutes les parties prenantes. En l’état actuel, les textes de lois qui ont été mis en place en juin 2014 et août 2015, ne permettent pas de lancer l’assurance maladie en 2016. C’est ce que nous avons démontré, dans la mesure où les parties ne se sont pas rapprochées et n’ont pas sorti une solution consensuelle. Vu que le président veut avoir des résultats cette année, nous avons fait le montage en fonction des réalités congolaises de la solution d’urgence pour mettre en place l’assurance en 2016 avec une carte solidarisme. La deuxième proposition consiste à mettre en place une agence de régulation dont la mission sera de coordonner le rapprochement des différents textes de lois et des positions de chacun pour arriver à une solution plus consensuelle qui ne défavorise ni les entreprises ni les employeurs ni encore moins l’Etat.

LDB : Les deux caisses de sécurité sociale existantes sont-elles capables d’assurer ces tâches ?

CM : Le texte de loi de 2014 a prononcé la fin des services de la Caisse nationale de sécurité sociale (Cnss) et de la Caisse de retraite des fonctionnaires (CRF). Donc, ces deux structures n’existent en réalité plus. Mais, ces deux caisses qui ont été recréées sous la caisse des pensions des agents de l’Etat et ceux du privé, sont uniquement des caisses de retraire qui ne prennent pas en compte l’assurance maladie. On a créé une nouvelle caisse qui prend en compte l’assurance. Toutes ces trois caisses prennent leurs ressources dans les mêmes cotisations, 20,4% de prélèvement faits sur les salaires. Or ce taux ne permettant pas de payer toutes les retraites de tous les Congolais. L’Etat est obligé de compenser tous les mois, l’écart. Aujourd’hui on a mis une caisse en place sur les textes mais elle est inexistante. Et tout cela ne permet pas de lancer l’assurance maladie cette année. S’il faut que les Congolais aient l’accès aux soins gratuitement courant 2016, il faudrait un autre mécanisme, affecter à ces caisses les ressources qu’il faut.

LDB : Y’a-t-il une différence entre ces deux caisses et l’assurance maladie ?

CM : La différence entre le travail de la CNSS et la CRF est que ces structures garantissent un revenu à la retraite. Alors que l’assurance maladie permet à tous les Congolais de se faire soigner en grande partie sans avoir déboursé de l’argent de leur propre poche. Les hôpitaux publics et privés seront conventionnés pour permettre à la population de bénéficier de soins gratuits.

LDB : Selon les résultats de votre étude, le Congo répond-il aux caractéristiques de mise en place d’une telle politique ?

CM : Il y a un texte de loi qui le permet déjà, ensuite il fallait des éléments techniques. La fibre optique déployée sur l’ensemble du territoire est un avantage. Nous allons amener les outils technologiques (carte à puce) qui ne fonctionnent qu’à partir d’une liaison fibre optique. Nous avons informé le gouvernement du coût global d’une telle action. C’est à lui de nous dire qu’on commence par tel ou tel mécanisme.

LDB : Avez-vous un appel à lancer aux autorités congolaises ?

CM : Oui ! Elles doivent prendre rapidement la décision. Je pense que depuis 1960, il n’y a pas eu de grandes réformes dans ce secteur. Félicitations au chef de l’Etat d’avoir initié la plus grande réforme sociale à mon sens ! Seulement, il ne faudra pas que ce soit des réformes des textes de lois et de produits. Il faut rendre réel tout cela. Le Congolais l’attend. Il faut donc créer une entité autonome pour réguler l’assurance maladie.

 

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

Christian Maniongui présentant les résultats devant les membres du gouvernement

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