Publication : Victorine Rachel Taty signe L’unité de production informelle et la comptabilité : expérience du Congo

Samedi 18 Juin 2016 - 18:15

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Paru en avril 2016 aux éditions Cesbc Presses dans la collection ThèmA en France, cet ouvrage de 130 pages, disponible dans les librairies des Dépêches de Brazzaville et de l’indépendance, met en exergue la réalité socio-économique et institutionnelle de la République du Congo à partir d’un double constat.

 

D’entrée de jeu, le premier constat relève des institutions internationales pour lesquelles, la République du Congo ne s’aligne pas encore sur les standards internationaux qui caractérisent les pays performants ou émergents, du fait de l’environnement des affaires peu attractif pour les investisseurs étrangers d’une part, des faiblesses relevées en matière de normes et pratiques de la comptabilité et d’audit des entreprises privée et parapublique d’autre part.

Le deuxième, dénote par ailleurs que l’économie congolaise qui, étatisée durant plusieurs années, a progressivement évolué à partir des années 90 vers une économie libérale dominée par le secteur pétrolier. Mais en marge de cette croissance, s’est développée de manière concomitante l’économie informelle. D’où la répartition de l’activité économique entre le secteur formel et le secteur informel. Si dans le cas du secteur privé formel et parapublic l’on relève une insuffisance des pratiques en matière de comptabilité et d’audit financier avec pour corollaire l’absence de transparence financière, le secteur informel, quant à lui, se caractérise par l’absence totale des statistiques qui obère les comptes nationaux. C’est cette particularité du secteur informel qui interpelle l’auteure.

Par l’unité de production informelle (UPI) et la comptabilité, Victorine Rachel Taty n’entend pas étudier le secteur informel, encore moins à le formaliser. Elle propose plutôt des mécanismes d’une traçabilité de ces activités économiques tout en limitant les bouleversements qui pourraient impacter les usages de ce secteur informel et qui pourraient briser sa dynamique. En effet, en l’absence de la pratique de la comptabilité, certaines unités de production informelle engloutissent tous azimuts des finances dans des activités qui les conduisent à la perte. La comptabilité étant le recensement et la mesure économique de l’activité et du patrimoine d’une entité économique (entreprise, collectivité, association, Etat, administration publique et autres), la finance est quant à elle, l’art de la gestion des fonds.

Aussi, l’absence d’une pratique, qu’elle soit comptable ou financière expose l’entreprise à l’incertitude et à la précarité. Par la pratique de la comptabilité, l’auteur entend, l’acceptation progressive par les acteurs du secteur informel, d’une tenue de compte simplifiée de leurs activités économiques. Il s’agit de faire acquérir des réflexes comptables aux acteurs économiques et de les leur faire intérioriser comme valeur. Bien entendu, il ne s’agit pas d’un système qui soit applicable aussitôt, mais elle jette les bases d’un processus qui s’instrumentalisera de manière progressive dans l’espace et le temps, et qui impliquera l’ensemble des acteurs (UPI, l’administration, l’ordre des experts comptables, les centres de gestion agrées et tous les décideurs en la matière).

Les acteurs informels devraient suivre économiquement leurs activités

L’intérêt de cet ouvrage technique destiné aux professionnels, chercheurs et étudiants, porte principalement sur les objectifs ci-après que vise l’auteure : une grande partie des acteurs du secteur informel évoluent dans la précarité du fait du non suivi économique de leurs activités. Bien que certains opérateurs qui y œuvrent connaissent une prospérité, ils jouiraient d’une meilleure croissance avec les pratiques comptables. Aussi, l’objectif de cet ouvrage, est d’emmener les acteurs du secteur informel vers une maîtrise de leurs activités pour les faire sortir de la précarité et booster leur potentiel de développement ; pour la profession comptable, ce secteur se présente comme un marché potentiel qui donnerait de la matière aux experts comptables du fait de l’élargissement du portefeuille tant en nombre de clients que sur le plan des missions qui seraient de facto diversifiée. En effet, au-delà des services traditionnels, les experts comptables devront aussi s’investir en conseil pour aider ces acteurs du secteur informel à réussir dans leur métier ; au niveau institutionnel, ce travail contribuerait à réduire l’opacité du secteur informel du fait de l’absence des statistiques. En effet, l’assistance qu’apporteraient les professionnels de la comptabilité au secteur informel conduirait à la production des chiffres qui seraient repris dans les comptes nationaux. Ce qui constituerait une source d’information qui enrichirait les données de la comptabilité de la nation, qui de ce fait sont appauvries par manque d’information sur le secteur informel.

Notons que cet ouvrage est reparti en deux volet comprenant chacun deux chapitres. Le premier volet, en une prise de connaissance du contexte général du secteur informel. L’auteure identifie tout d’abord le secteur informel. Ensuite, à partir d’un échantillon des acteurs de ce secteur, elle recense les difficultés relatives à la tenue de la comptabilité. Cette prise de connaissance documentaire et pratique conduit l’auteure dans le deuxième volet à la distinction des activités du secteur informel structurables jusqu’aux mécanismes à mettre en œuvre pour leur traçabilité. L’auteure termine par l’appréciation des impacts des résultats de cette réflexion sur le plan comptable et institutionnel.

La compréhension de cet état de fait anime la volonté de Victorine Rachel Taty à œuvrer auprès des pouvoirs publics pour la reconnaissance d’un statut économique des acteurs du secteur informel. Parmi ses préconisations, certaines devront faire l’objet des résolutions et des textes d’application au niveau gouvernemental. Ce qui donnerait matière à la profession de l’expertise comptable. En effet, dans le cadre de la mise en œuvre des mesures qui seraient prises par l’Etat, il reviendra aux professionnels de la comptabilité de faire l’accompagnement des acteurs de l’informel par le biais du conseil et l'assistance.

Qui est l’auteure ?

Victorine Rachel Taty est diplômée de 3è cycle de finance et experte-comptable agréée par la communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac). Elle a fait carrière en cabinet d’audit et conseil, avant d’évoluer en entreprise comme manager en finance et comptabilité. Intervenant en milieu associatif et auprès des microentreprises et des petites et moyennes entreprises (PME), elle a acquis une solide expérience en accompagnement individuel et collectif des opérateurs économiques. Elle œuvre depuis 2013 pour la réduction du secteur informel et déploie, en même temps, auprès des pouvoirs publics un plaidoyer pour l’adoption de mesures institutionnelles destinées à favoriser l’évolution   des acteurs du secteur informel vers le secteur formel.

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo : Victorine Rachel Taty et son livre

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