Report des élections à Beni, Butembo et Yumbi : une décision infondée, selon l'IRDH

Jeudi 27 Décembre 2018 - 17:30

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L'association estime que la volonté de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) semble s’inscrire dans une logique de violer les droits garantis aux citoyens, d’irriter l’opposition et d’inciter la population à la violence.

Les chercheurs du Projet d’application des droits civils et politiques (PAD-Cipo) de l’Institut de recherche en droits humains (IRDH) ont relevé que les dispositions des articles 1 et 2 de la décision de la Céni du 26 décembre 2018 portant réaménagement du calendrier électoral et le report des élections au mois de mars 2019, dans les circonscriptions de Beni, Beni ville, Butembo ville et Yumbi, sont infondées, confuses et contraires à la Constitution. Selon ces scientifiques et activistes des droits de l’homme, le fait de prendre des décisions importantes, sans permettre aux personnes qui s’estimeraient lésées d’interjeter appel devant les instances compétentes, relève de l’intention délibérée de violer le droit au recours formel garanti par la Constitution.

De l’avis de ces chercheurs, en effet, « les décisions intempestives, confuses et non motivées » de la Céni semblent s’inscrire dans une logique de violation des droits garantis aux citoyens, d’irriter l’opposition et d’inciter la population à la violence. « L’article 21 de la Constitution de la République veut que tout jugement, y compris les actes administratifs à l’instar des décisions de la Céni, soit écrit et suffisamment motivé. Et que le droit de former un recours contre ledit jugement ou décision soit garanti à tous », ont-ils soutenu.

Dans son bulletin électronique du 27 décembre, qui relève ce constat, l’IRDH recommande à quiconque se sentirait lésé de s’associer à la protestation pacifique, afin de recouvrer son droit de recourir contre la décision injuste de la Centrale électorale. Le vote, note cette association, est une prérogative qu’aucune personne ou groupe de personnes ne peut arracher.

Cet institut pense, en outre, que les partis politiques, qui ont la mission constitutionnelle d’encadrer politiquement la population, devraient secourir urgemment les électeurs désemparés dans les zones écartées, avec des messages clairement pacifiques, au lieu de les inciter à la violence tant attendue par le pouvoir en place. La communauté internationale, l’ONU, l’Union africaine, la Communauté de développement d'Afrique australe  et l’Union européenne sont sollicitées par cette association pour faire pression sur le gouvernement et la Céni qui inscrivent le pays dans la logique de la violence, exposant la sous-région au risque d’interruption de la paix et la sécurité.

Carence de motivation et confusion dans la décision

Pour l’IRDH, dans la décision incriminée, la Céni ne pouvait pas utiliser, à la date du 26 décembre, la lettre du vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la sécurité, qui était déjà à sa disposition, le 17 décembre, et supposée être examinée lors de la prise de la décision numéro 050/CéniI/BUR/2018, du 20 décembre, « après concertation avec les institutions de la République, évaluation en tripartite avec le gouvernement et le Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral et consultation de toutes les parties prenantes au processus ». Aussi, les chercheurs de cet institut estiment qu’un rapport du ministère de la Santé publique détaillant la situation sanitaire dans les zones visées informerait mieux la décision de la Céni, à la place d’une simple lettre du ministre chargé de l’Intérieur et Sécurité. L’IRDH souligne, par ailleurs, que le « bulletin d’information sur les flambées épidémiques » en RDC, du 13 décembre 2018 (OMS : https://www.who.int/csr/don/13-December-2018-ebola-drc/fr/) informe que « des progrès considérables ont été accomplis sur des multiples fronts pour remédier à la situation et des succès quotidiens sont observés dans la mise en œuvre de mesures de santé publique à l’efficacité avérée, en plus des nouveaux outils comme la vaccination et les nouveaux traitements ». Par contre, relève cet institut, l’OMS déconseille d’instaurer toute restriction aux voyages ou aux échanges commerciaux avec la RDC, si ce n’est sur recommandion du médecin. « En somme, la décision de la Céni de reporter le vote ne peut évoquer que des motifs protégeant l’intérêt public, bien documentés et publiés. Nul ne peut alléguer des raisons contre des intérêts des citoyens, si celles-ci sont inexistantes », a souligné l’IRDH.

Notant la confusion entre les articles 1 et 2 de la décision de la Céni, cette association fait observer que l’article premier de la décision 055/Céni/BUR/2018 du 26 décembre 2018 donne les nouvelles dates du 15 et 18 janvier 2019, comme celles de la publication des résultats définitifs de l’élection présidentielle et de la prestation de serment du président de la République élu. Bizarrement, s’etonne-t-elle, le deuxième article de la même décision renvoie les élections dans les circonscriptions de Beni, Butembo et Yumbi à une date incertaine du mois de mars 2019. Pour l’IRDH donc, la Céni qui a été capable de projeter des élections de décembre 2018, depuis le 5 novembre 2017, ne devrait pas entretenir une confusion autour du report partiel du scrutin.

Lucien Dianzenza

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