Sambou Tati : « le jeu de Paul, c’est ça : la spontanéité »

Vendredi 8 Juillet 2016 - 23:15

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Sambou Tati, alias « Bijou », a été l’entraîneur de Paul Pogba lorsque l’international français évoluait à Roissy-en-Brie. Devenu président du club francilien, le Franco-Congolais est resté proche du milieu de la Juventus. Et suit sa carrière avec attention et bienveillance.

Les Dépêches de Brazzaville (LDB): Président, on imagine que vous avez suivi le match France-Allemagne avec une attention particulière, comme tous les matchs de votre ancien joueur, Paul Pogba…

Sambou Tati (ST) : Bien entendu. J’ai eu la chance d’être l’entraîneur de Paul Pogba à Roissy-en-Brie lorsqu’il avait 13 ans. C’était déjà le même joueur et il produisait déjà le même jeu. C’est un garçon qui est resté très attaché à la ville et au club où il a grandi et débuté. Et nous restons très attaché à lui.

LDB : Jeudi soir, on a vu le « vrai » Pogba après un début d’Euro parfois compliqué ?

S.T : Il y avait une grosse attente autour de Paul et le public attendait de lui qu’il soit le maillon dort de l’équipe. Mais comme ses coéquipiers Paul est monté en puissance au fil du tournoi, c’est indéniable. C’est vrai que sur les premières rencontres, il n’était pas à son meilleur niveau. Mais après son but en quart, sa prestation d’hier était très aboutie.

LDB : N’y-a-t-il pas un paradoxe autour de Pogba auquel les experts conseillent souvent de simplifier son jeu, alors, qu’à l’image de son action sur le second but des Bleus, il brille lorsqu’il lâche la bride, qu’il joue à l’instinct ?

S.T : Je me pose souvent la question : demande-t-on à Messi ou Ronaldo de simplifier leur jeu ? Le jeu de Paul, c’est ça : la spontanéité. Sa feinte, sur le deuxième but, il la faisait déjà à 13 ans. Et j’avoue que ça m’énervait. Parfois, il me dit : « Je veux jouer simple, mais une fois que j’ai effacé un joueur, ça passe pour le deuxième, alors pourquoi ne pas essayer le troisième ? ». Si on lui demande de jouer simple, il va le faire. Mais s’il voit qu’il peut faire un geste technique, il va le faire.

LDB : A 23 ans, Paul Pogba est l’une des stars du football européen et mondial. Mais il vise les sommets et le Ballon d’or. Pensez-vous qu’il y arrivera ?

S.T : Vous savez, Paul a toujours rêvé de devenir professionnel. Gamin, il s’est donné les moyens de partir au centre de formation du Havre. Après, il a dit : « un jour, j’irai dans un grand club » et rapidement, il est parti du Havre pour Manchester United. Quand il a signé à la Juventus, je lui ai dit : « Paul, reste à Manchester. A la Juventus, ça sera compliqué de te faire une place ». Il m’a dit : « Bijou, si je vais à la Juventus, je jouerai ». Et il s’y est imposé, à force de travail. Ensuite, il a dit : « J’irai au Mondial brésilien ». Les gens ont dit que le petit parlait beaucoup. Il est allé et a été désigné meilleur Espoir. Maintenant, il dit qu’il veut être Ballon d’or. Eh bien je peux vous dire qu’il fera le maximum pour le gagner. Pour cela, il sait qu’il faut gagner l’Euro, la Ligue des champions : il fera tout pour les remporter.

LDB : Bon, comme vous nous avez amené sur le sujet des clubs, on se risque à une question « piège » : où jouera Paul Pogba la saison prochaine ?

S.T : (rires) Oh là là. Je n’ai aucune idée. Sauf que beaucoup de clubs le veulent comme Manchester United, le Bayern, le Real, le Barça…

LDB : On reparle beaucoup de Manchester United depuis l’arrivée de Mourinho.

S.T : C’est vrai. Mais aujourd’hui, qui ne veut pas de Paul Pogba ?

LDB : Mais qui peut le payer, car on évoque un transfert entre 80 et 100 millions d’euros ? Probablement pas le Barça, les clubs anglais oui, le PSG oui, le Real oui.

S.T : C’est vrai que sur le plan financier, le Barça semble hors course. Après, ils sont trois ou quatre à pouvoir le payer et l’intéresser sportivement. Il n’y a que lui qui sait aujourd’hui et je pense que ça dépendra surtout des échanges qu’il aura avec les différents coaches. Tout ce que je peux vous dire, c’est que j’aimerais bien le recruter à Roissy-en-Brie, mais il est vraiment trop cher pour nous.

LDB : Où suivrez-vous la finale dimanche soir ?

S.T : Dimanche, je suis invité au Stade de France, comme au match d’ouverture. Je n’y étais pas allé, car j’ai un petit blocage (ndlr : il était présent lors du match France-Allemagne du 13 novembre, visé par des attaques kamikazes). Mais c’est surtout par superstition que j’hésite à y aller. Depuis le début de la compétition, je suis les matchs avec les amis du club de Roissy-en-Brie et ça a porté chance aux Bleus. J’ai peur de briser la dynamique si je sors du groupe. Donc ce sera devant un écran géant avec tout Roissy-en-Brie. Et je sais déjà que l’ambiance sera énorme.

LDB : Un petit pronostique ?

S.T : La France va gagner 2-1.

LDB : Avec Pogba buteur ?

S.T : ça serait merveilleux que Paul marque. Mais bon, lui ou un autre, ce qui compte, c’est que la France gagne. Allez les Bleus.

 

Camille Delourme

Légendes et crédits photo : 

Sambou Tati et Paul Pogba en marge d'un match de la Juventus (droits réservés)

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