Samuel Yamungu : « On peut servir son pays sans être politique ou officiel »

Jeudi 27 Septembre 2018 - 12:30

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Le jeune entrepreneur congolais est auteur d’une œuvre unique, singulière. Il a très récemment réalisé le plus grand drapeau de l’Afrique centrale et australe qui flotte depuis peu devant le nouveau bâtiment du gouvernorat de Lubumbashi, inauguré par le président de la République, Joseph Kabila, et aussi devant le Palais du peuple à Kinshasa.

L'artiste de formation émerge du lot avec son œuvre. Il s’agit d’une étoffe de 150 m2 (de 15 m x  10) sur un mât grand de 40 m de hauteur d’une structure de près de 20 m3 de béton pour un poids total soutenu allant d’une tonne huit cents à deux tonnes. Impressionnant. C’est sa façon de servir le pays, lui qui n’est pas politique ou officiel. « Je crois qu’on peut servir son pays tout en n’étant pas forcément un officiel. Mère Theresa n’était pas membre du gouvernement ou député en Inde. Mais elle a encore plus aidé les gens et son nom est resté indélébile et éternel, plus qu’un officiel. Parfois, des gens cherchent à accéder à des fonctions officielles juste pour des buts mercantiles et vénales, de moins en moins par rapport à un besoin de servir », confie Samuel Yamungu au "Courrier de Kinshasa", lorsqu’on lui demande pourquoi il n’a pas daigné postuler aux législatives nationales ou intégré un parti politique.

« Ma préoccupation ou ma vision de la vie, c’est de ne pas exister pour rien, je vais mourir avec des hommages, après un legs, faire en sorte que mes enfants, demain, puissent bénéficier non pas des maisons que leur père leur aura laissées mais des œuvres qu'il aura laissées pour des gens, de sorte que mon capital soit dans les mains de tout le monde et que mes enfants, partout où ils passeront, parce qu’ils porteront mon nom, tout le monde aura quelque chose à leur rapporter. Et ça je crois, c’est beaucoup plus fort que des biens qu’on aurait pris méchamment ou de manière subtile aux autres pour en faire sa propriété », lâche-t-il.

Et il note : « Et dans cette vision, je me dis qu’il est important de se demander qu’est-ce qu’on laissera après sa mort ? Si je peux laisser un puits dans un village qui va être utile trente ou quarante ans après ma mort, là, je me dis que je suis un mort-vif. Servir son peuple aujourd’hui, ce n’est pas avoir les gains de son peuple mais peut-être juste recevoir des autorités une reconnaissance, une ouverture ou la facilité d’exprimer son talent, c’est aussi cela servir son peuple, au lieu de se mettre dans la posture de vouloir être comptable du peuple, recevoir de lui pour exister. On n’existe pas parce qu’on a, on existe parce qu’on donne, c’est ça ma vision ».

Grâce à cette œuvre exceptionnelle, Samuel Yamungu a pu avoir des contacts à l’étranger. « Ce que je fais aujourd’hui donne une révélation différente de servir mon pays. Et demain, je peux partir dans plusieurs autres pays africains, parce que ma vision, c’est l’Afrique. Je partirai sans couleur politique mais totalement avec les couleurs nationales, c’est une fierté. Des contacts existent avec d’autres pays », indique-t-il, affirmant être très attaché à son pays : « Dans tous les cas, je resterai toujours reconnaissant vis-à-vis de mon pays qui a permis que je sois reconnu. On dit nul n’est prophète chez soi, certes. Mais Dieu a permis que cela soit différent en ce qui me concerne. J’ai été  révélé et reconnu d’abord chez moi, avant de l’être par d’autres. Je serai donc reconnaissant toute ma vie envers mon pays, et même ma descendance, parce que c’est mon pays, c’est ma nation, mon drapeau », conclut-il.

Situation politique…

À propos de la situation politique au pays, Samuel Yamungu indique que le Congo est une terre fraîche sur le plan de la démocratie, on ne devrait même pas nous mettre en comparaison avec d’autres en disant que le Congo est en trouble ou dans une situation inconfortable. « Je pense qu’on est mieux loti dans ce désordre que les autres pays qui ont trois cents ans de démocratie. Vers les années 1900 en France, on sacrifiait des groupes de personnes qui réfléchissaient différemment des conformistes. Aujourd’hui, ils ont pu consolider les acquis démocratiques en trois cents ans ».

Et de conclure : « Nous n’avons que 58 ans, mais déjà les pas franchis sont très importants. Car, nous commençons déjà à faire ressortir une identité congolaise, et pourquoi pas dégager demain un genre congolais de démocratie, car la réalité de la RDC n’est pas similaire que celle du Congo Brazzaville, du Tchad, de la Côte d’Ivoire, etc., nous avons quatre cent cinquante tribus, et notre démocratie doit prendre cette donne en compte. Aujourd’hui, nous sommes dans une sorte d’émulation, dans la création d’un style congolais démocratique, on est juste en travail. Et moi je crois en un avenir meilleur pour le Congo ».

Martin Enyimo

Légendes et crédits photo : 

Samuel Yamungu à côté du grand drapeau devant le nouveau bâtiment du gouvernorat à Lubumbashi

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