Transition politique : l’opposition pro-dialogue s’offre la primature

Samedi 15 Octobre 2016 - 16:21

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La majorité présidentielle a obtenu de l’opposition, en échange du poste de Premier ministre, l’extension de la transition post-dialogue sur une durée de deux ans avec Joseph Kabila à la tête du pays et, en toile de fond, le report de la présidentielle en avril 2018.  

Après moult tergiversations, l’accord politique tant attendu devant consacrer la fin des travaux du dialogue de la Cité de l’Union africaine, entamés depuis le 1er septembre, est fin prêt. Plus que quelques heures et il sera signé en plénière par les parties prenantes. Majorité et opposition ont pu lever les derniers obstacles qui empêchaient jusqu’alors tout compromis politique. Des concessions majeures ont été faites de part et d‘autre, au nom de la paix sociale. Face à la pression de son autorité morale qui l’astreignait à conclure cet accord au plus vite, bien avant le sommet international sur la RDC prévu pour le 26 octobre à Luanda, les délégués de la majorité étaient dans l’obligation de jouer carte sur table en mettant en peu d’eau dans leur vin. Ce qui fut fait. Eux qui tenaient tant à la primature au nom de la Constitution qui attribue le poste de Premier ministre à la majorité dégagée au terme des scrutins législatifs, ont du se faire violence en accordant à l’opposition la latitude de tenir désormais le gouvernail de l'institution gouvernementale.

C’est en tout cas l’une des  grandes concessions majeures faites par la majorité et consignée dans l’accord politique de la Cité de l’Union africaine. Pour avoir accepté de remettre à l’opposition pro-dialogue les clés de la primature, la majorité obtient, en contre partie, l’extension sur une durée de deux ans de la transition post-dialogue. Concrètement, elle obtient le glissement de deux ans du mandat de son autorité morale, Joseph Kabila, qui restera en poste après le 19 décembre et ce, jusqu’à la prochaine élection. Ainsi donc, le gouvernement de large union nationale qui régentera le pays pendant les deux ans de transition aura la lourde charge de mener le pays vers l’organisation des élections générales dont les délais constitutionnels n'ont pu être respectés. Si aucun compromis n’a été trouvé sur le calendrier électoral avec des dates précises sur la tenue des scrutins, tâche qui incombe à la Céni, néanmoins, tout porte à croire que la présidentielle est repoussée jusqu’en avril 2018. Le dépôt des candidatures est prévu pour le 30 octobre 2017, et les différents scrutins devront théoriquement avoir lieu six mois après, donc fin avril 2018.  

Là-dessus, l’opposition, qui tenait mordicus à ce que le sort du chef de l'État après le 19 décembre soit clairement fixé, ne transige pas sur le principe de la non-éligibilité de Joseph Kabila à un troisième mandat au nom de l’alternance consacrée par la Constitution. En contrepartie du glissement du mandat présidentiel, l’opposition tient mordicus à voir figurer dans cet accord le respect strict de la Constitution. En clair, pas de troisième mandat pour Joseph Kabila. À ce sujet, des indiscrétions laissent entendre qu’aucune restriction n’est imposée à l’actuel chef de l’État pour ne pas prétendre à un nouveau mandat présidentiel pendant que l’opposition, elle, se félicite d’avoir inscrit dans ledit accord le respect de la Constitution comme précepte de base.

 L’opposition pro-dialogue qui s’adjuge ainsi la primature espère qu’avec ce positionnement, elle pourra bien contrôler l’action du président de la République et s’assurer que les élections auront effectivement lieu. Autre consensus trouvé entre les composantes au dialogue, c’est que la gestion de la période de transition sera placée sous la surveillance d'une commission composée de l'opposition, de la majorité et de la société civile. Cette commission sera elle-même assistée ou appuyée par des organisations partenaires de la RDC, parmi lesquelles l'ONU, l'Union européenne, l'Union africaine, la Cirgl, la Sadc.

Tout compte fait. Le dialogue de la Cité de l'Union africaine vient d’arriver à son dénouement, même s’il pêche par son caractère non inclusif. D’où les interrogations qui fusent de partout quant à l’opposabilité des résolutions qui en sont issues. Ce qui fait dire à maints observateurs que l’idée d’un deuxième round des pourparlers entre Congolais reste toujours de mise de sorte à impliquer le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement évoluant en marge du processus. Aussi, laisse-t-on entendre, le compromis politique issu du Forum de la cité de l’Union africaine devra servir de matrice à la poursuite de la deuxième phase du dialogue en vue d’un large consensus.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Des délégués de l'opposition au Dialogue

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