Vatileaks : un procès inédit au Vatican

Vendredi 8 Juillet 2016 - 19:01

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Le Vatican a tenu un procès public, où les questions d’éthique professionnelle et de liberté de la presse se sont bousculées sans se mélanger.

Le Vatican n’est pas coutumier des audiences publiques de sa justice, au point que beaucoup dans l’opinion ne savaient pas qu’il existe un tribunal du Vatican. Une justice constituée sur les bases « normales » de fonctionnement de toute juridiction, jugeant et statuant à charge et à décharge. D’ordinaire, la justice vaticane est occupée à des cas de nullité de mariage. Pourtant, en 2012, une première affaire a fait du bruit lorsque le majordome du pape émérite Benoît XVI, l’Italien Paolo Gabrielle avait été traduit en justice et condamné pour vol de documents du Souverain pontife.

La bourrasque que représente la personnalité du pape actuel indique qu’on ne devra pas en rester là. En novembre dernier a été ouvert au Vatican le procès  impliquant deux journalistes, Emiliano Fittipaldi et Gianluigi Nuzzi auteurs de deux ouvrages sulfureux sur les coulisses du Vatican et les jeux de pouvoirs que s’y livrent les hauts-prélats, sur le dos du pape et parfois contre lui. Le Vatican affirme aujourd’hui qu’il n’entend pas nier aux journalistes leur droit d’expression, mais tordre le coup à la dangereuse tendance de subtiliser des documents secrets du Saint-Siège et de les répandre sur la place publique.

Ouvert le 24 novembre auprès du Tribunal du Vatican, le procès de cinq personnes : un haut-prélat espagnol, une experte italienne, deux journalistes et un secrétaire tous italiens, s’est clôturé jeudi soir. Tous étaient, à des degrés divers, impliqués dans le vol de « documents réservés », avec à leur tête un prélat espagnol, Mgr Angel Lucio Vallejo Balda qui a été condamné à 18 mois de réclusion. L’Italienne Francesca Chaouqui a écopé de 10 mois de prison avec sursis.

Par contre Nicola Maio, assistant du prélat espagnol, a été acquitté. Et la cour s’est déclarée incompétente à juger les deux journalistes italiens Emiliano Fittipaldi et Gianluigi Nuzzi auteurs des ouvrages ayant révélé cette affaire connue dans les médias sous la désignation de Vatileaks2 (Vatileaks 1 étant l’affaire ayant éclaté autour du majordome de Benoît XVI en 2012).

Au cours d’une conférence de presse après le verdict, le père Federico Lombardi, porte-parole du pape, a estimé qu’il fallait tenir ce procès, pour « démontrer la volonté de combattre, avec des décisions, les manifestations et les conséquences des tensions et des polémiques internes au Vatican ». Ces tensions se reflètent, a insisté le Père Lombardi, « trop souvent aussi à l'extérieur par des fuites ou des divulgations de documents aux médias, créant un cercle et un contexte ambigu et négatif dans les discussions internes », mais aussi « avec des conséquences négatives dans l'opinion publique, qui a droit à une information objective et sereine ».

Le porte-parole du pape a affirmé la volonté du pape François, cette « maladie » des fuites qu’il faut « combattre avec détermination ». Mais en aucune manière, Vatileaks 2 n’a été un procès contre la liberté de la presse. « Pour connaître et évaluer les différents aspects de cette situation, il était juste d’aborder également le rôle et la responsabilité réelle ou non des journalistes dans l'affaire, malgré la polémique prévisible à propos du respect de la liberté de la presse » qui doit « certainement être protégée ».

Lucien Mpama

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