Veille autour de la tombe vide d’un migrant « parti en voyage »

Samedi 28 Mai 2016 - 12:34

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En collaboration avec l’Italie, la Commission internationale pour les personnes disparues, tente de donner un nom à des milliers de cadavres dans le monde.

Il existe à La Haye, la ville hollandaise où siège la Cour pénale internationale, une commission internationale à la mission ingrate. La CIPD ( Commission internationale des personnes disparues) est chargée de dégager un peu d’humanité des milliers de charniers dans le monde, des morgues d’hôpital et des chambres frigorifiques où s’entassent des centaines de corps sans identités. Beaucoup d’entre eux ont été ramassés sur les plages d’Italie ; des restes (dans tous les sens du mot) de migrants ayant fait naufrage en Méditerranée.

Car il faut donner une réponse aux nombreuses familles qui attendent le retour ou des nouvelles d’un fils, une fille, un parent quelconque « parti en voyage » et dont on n’a plus de nouvelles; ou encore, dont les dernières nouvelles disent, terriblement, qu’il est mort dans le chavirage d’un bateau, des violences policières à une frontière, la férocité de trafiquants. Les familles attendent littéralement au bord d’une fosse creusée pour ensevelir dans la dignité un corps qu’ils ne recevront sans doute jamais.

Les morts sont de tous les continents. Ils sont la résultante d’un conflit armé, de l’emballement d’une situation de tensions, d’une catastrophe naturelle : des milliers de vies soudainement emportées. Et qui se transforment en seuls chiffres : 10.000 morts ; 1000 « victimes » ; 1000 « disparus ». Des disparus qui le resteront tant qu’aucune identité ne sera mise sur un squelette, une momie retrouvée parfois longtemps après les faits et dont ne sait absolument rien. La Commission applique la méthode scientifique réputée du moment: le test ADN, pour tenter de retrouver des personnes qui ont leur propre ADN identique.

Encore faut-il savoir qu’un de ses parents est mort dans les nombreuses catastrophes maritimes qu’on a pris l’habitude de suivre pratiquement en direct à la télé. L’Afrique est particulièrement démunie dans ce genre de situations. Elle qui, paradoxalement, met un point d’honneur à donner une sépulture digne, presque de riche, à ses morts se retrouve souvent avec des morts inconnus éparpillés de par le monde sans lien avec personne et dont on n’a pas conscience. Parfois la famille à Pointe-Noire ne savait même pas que l’enfant que l’on croyait à Brazzaville était en fait dans le désert de Libye, ou dans les Balkans, entrain de « tenter l’aventure », entrer illégalement en Europe. Et y mourir.

Lucien Mpama

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