Interview. Alain Kounoumono : " La natation est un patrimoine que nous n’arrivons pas à développer"

Mardi 8 Août 2023 - 17:15

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Le troisième vice-président de la Fédération congolaise de natation a fait le point de la participation des nageurs congolais aux championnats du monde qui se sont déroulés du 14 au 30 juillet à Fukuoka, au Japon, déplorant les conditions de préparation qui n’ont pas été à la hauteur de l’événement à cause du manque de piscines réglementaires.

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B) : Les nageurs congolais ont participé au Japon aux championnats du monde, que peut-on  retenir ?

Alain Kounoumono (A.K).  Nous sommes allés à Fukuoka, au Japon, pour les championnats du monde de natation. Dans la délégation, il y avait deux nageurs. Pour ce qui est du bilan, nous pouvons dire qu'il est positif par rapport au travail des enfants. La préparation a été très difficile mais nous retenons que cela a été du positif.

L .D.B ; Vous insistez sur la préparation qui  a été difficile, qu’est-ce qui a réellement  manqué ?

A.K.  Il y a beaucoup de choses à dire.  On a essayé de travailler bon gré mal gré. Nous n’avons pas de piscines réglementaires accessibles actuellement.  Les enfants travaillent sur des piscines que nous squattons ici et là non réglementaires et on fait avec.

L ;D.B. Quelles sont les leçons à tirer de cette participation ?

A.K . Il y a plusieurs leçons à tirer. On ne peut pas prétendre tirer les leçons sans voir comment nous nous sommes préparés. N’ayant pas de piscine réglementaire, nous sommes obligés de passer  par des piscines privées qui ne sont pas réglementaires.  Il faut des efforts pour la location de la piscine. Il faut trouver une piscine qui peut permettre aux enfants de bien travailler. Dans toute la ville, les piscines qui nous sont accessibles sont entre 12 et 15 m.  Le travail est difficile au point  où il arrivait pour faire la résistance et travailler de longues distances, nous y allons jusqu’au fleuve. Nous devons nous mettre au travail, condition sine qua non, pour faire mieux.  Mais comment se mettre au travail ? C’est la question, dans la mesure où la natation n’est pas comme le football. Elle est exigeante. Il faut un bassin. Nous  n’en avons pas.

L. D.B ; En marge de cette compétition, il y a eu le congrès de World Aquatic. Quelles sont les grandes décisions ?

A.K.  Le congrès avait trois volets. Il fallait changer la dénomination. La Fédération internationale de natation est devenue World Aquatic. Le président a été réélu. Le Sud-Africain est le vice-président. C’est une place qui revient d’office à l’Afrique. Le Sénégalais a été réelu secrétaire général.  La question de revoir la gouvernance au sein des fédérations nationales était le troisième point. On nous demande de beaucoup travailler. Chaque fédération doit avoir la commission des athlètes. Désormais l’athlète est comme l’acteur de son destin. On a aussi regardé comment donner un peu plus de chances  aux fédérations nationales d’Afrique  les plus démunies en créant un projet qu’on appelle piscine pour tous. Quand vous soumissionnez à ce projet tous les deux ans, vous devez demander à World Aquatic de vous aider à restructurer la piscine si elle est en désuétude, sinon comment obtenir la construction d’une piscine. Ce point nous intéresse beaucoup, nous les Congolais. On a déjà soumissionné mais attendons l’évolution du dossier. Il faut justifier d’un terrain avec un titre foncier au nom de la Fédération congolaise de natation. Dejà préparer les athlètes, c’est difficile. Nous sommes en discussion avec le ministère des Sports. S’il peut nous autoriser à réhabiliter la piscine olympique de Massamba-Débat, cela pourrait nous aider.

L .D.B ; Le congrès vous a-t-il permis  de multiplier les contacts avec d’autres fédérations sœurs pour appuyer le Congo dans l’organisation des stages et séminaires ?

A . K. Chaque fois, nous discutons avec les amis. Il y a plusieurs contacts. Nous avons eu la chance de rencontrer le président de World Aquatic avec le concours du président de la Confédération africaine. Nous sommes sortis de là satisfaits parce qu’on a pris beaucoup de contacts. On a été édifié sur comment aborder une demande de bourse d’un athlète

L.D.B. Quelles sont les perspectives pour la natation congolaise

A.K.  Il faut se mettre au travail et il n’y a pas de la magie.  Comment pouvons-nous nous mettre au travail avec les conditions qui sont les nôtres ? Vous attendrez quoi de nous. Le président d’Africa Aquatic ne cesse de vanter le mérite du Congo de par le Palais nautique que nous avons. Nous avons un avantage de nous faire ouvrir les portes. C’est à nous le Congo de savoir en exploiter. Ailleurs nous sommes vénérés mais pas chez nous. Nous sommes des riches qui ignorent que là où nous sommes assis nous avons une richesse et on se fait pauvre. On a pris le risque d’amener les enfants d’autrui jusqu’au fleuve, tout pouvait arriver. Quand nous avons consulté notre assureur en lui disant que nous avons des séquences parfois au niveau du fleuve, il a dit de ne pas les mettre dans le dossier d’assurance.

L.D.B. Un appel à lancer ?

A.K. Je me rends compte que les Congolais n’aiment pas la natation alors qu’elle est subtile. C’est un sport complet parce qu’il y a même de la natation thérapeutique. Mais c’est un patrimoine que nous n’arrivons pas à développer. Amenez vos enfants à la natation quand bien même nous avons les piscines non réglementaires. Les enfants qui sont partis avec nous ne nous ont pas déçus. Le garçon est le meilleur au niveau de l’Afrique centrale. En décembre, nous l’avons envoyé au Cameroun où il avait raflé des médailles. Dans ce pays, il y a bien des piscines réglementaires. Le président de la fédération camerounaise a demandé que nous lui envoyons notre garçon. Si nous les mettons en condition parfaite de travail, nous pouvons attendre quelque chose de bien d’eux. Les médailles africaines ne sont pas loin. Ce sont les mêmes qui étaient à Dakar, ils n’ont pas déçu. Au Japon, ils ont fait mieux  que le temps qu’ils ont réalisé à Dakar. Nous avons eu notre championnat national depuis 2014, jusqu’à nos jours nous n’arrivons pas à organiser notre championnat national. Nous sommes en train de tricher. Au lieu de faire un championnat national, on fait des regroupements pour déceler les meilleures. C’est une difficulté. Nous sommes presque abandonnés.

L.D.B : L’année prochaine, il y aura les Jeux olympiques à Paris. Peut- on compter sur les nageurs congolais ?

A.K.  Les Jeux olympiques de Tokyo, le Congo y a participé grâce à la natation et l’athlétisme. Toutes les fédérations n’ont pas pu se qualifier à Tokyo parce qu’on n’avait pas des minimas. Mais étant donné que la natation et l’athlétisme sont les disciplines mères des Jeux olympiques.  Il y a des prédispositions qu’on appelle les places d’universalité qui nous ont permis d’y participer mais à condition que vous en fassiez la demande. Le Comité olympique accepte de nous attribuer les places d’universalité mais à condition de ne pas amener les athlètes qu’on a plus vu depuis une longue durée. Nous devons amener les athlètes qui ont eu au moins deux apparitions avant les Jeux olympiques, peu importe le temps qu’ils réaliseront. C’est pourquoi nous avons tenu la main à World aquatic pour amener les enfants au Championnat du monde et nous avons déjà un pas  vers  Paris 2024. Sauf changement de dernière heure, la natation congolaise sera à Paris.

 

 

 

 

 

 

 

 

Propos recueillis par James Golden Eloué

Légendes et crédits photo : 

Alain Kounoumono faisant le point/Adiac

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