Interview: Ahmmed Agargi parle de la fête du Trône et de la coopération entre Rabat et Brazzaville

Mardi 6 Août 2024 - 17:30

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Accrédité le 15 juin 2022 en qualité de chargé d’affaires en pied près l’ambassade du royaume du Maroc à Brazzaville, Ahmmed Agargi a saisi l’opportunité des 25 ans de l’accession de sa majesté le roi Mohammed VI au Trône pour organiser une réception le 30 juillet dernier. Un moment de partage auquel étaient conviés les membres de la communauté marocaine à Brazzaville, des officiels congolais et de nombreux invités. Dans un entretien exclusif, le diplomate explique l’importance de la fête du Trône pour le Maroc, évoque les réalisations du dernier quart de siècle, les projets et  parle des relations entre son pays et le Congo, dans la perspective de la tenue de la grande commission mixte sous-tendue par de nombreux projets d'accords.

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : Monsieur le chargé d’affaires, le 30 juillet dernier, vous avez célébré en compagnie de vos compatriotes, des officiels congolais et de nombreux invités les 25 ans de l’accession du roi Mohammed VI au Trône. Quelle signification votre pays donne-t-il à ces festivités ?

Ahmmed Agargi (A.A.):  La fête du Trône très profondément ancrée dans le cœur des Marocains représente un moment fort qui perpétue les liens d’allégeance qui unissent le roi à son peuple et incarne l’esprit fondateur de la nation marocaine, son unité, sa stabilité et son Histoire. Cet anniversaire de 2024 marque un quart de siècle de règne de sa majesté le roi. Son leadership et sa vision éclairée ont permis au royaume du Maroc un développement humain et territorial indéniable, et aussi de se positionner comme un État de droits et de libertés, régi par un islam malékite tolérant, qui réprouve toutes formes de racisme et d'exclusion.

Le Maroc, sous la conduite éclairée de sa majesté le roi Mohammed VI, a franchi des étapes significatives vers le développement et la modernisation, tout en préservant ses valeurs et son identité. Ce quart de siècle de leadership visionnaire a non seulement transformé le pays, mais a également positionné le royaume comme un acteur clé sur la scène régionale et internationale. La fête du Trône est l’occasion pour le peuple marocain de célébrer ces réalisations et de se préparer à relever les défis futurs avec confiance et détermination

L.D.B. : Pouvez-vous nous parler des acquis de ce quart de siècle passé sous le règne de Mohammed VI et des perspectives à court terme ?

A.A. : Sur le plan économique, le Maroc a renforcé ses infrastructures, véritables clef de voûte de sa stratégie sectorielle, ce qui a eu pour  effet de stimuler la croissance et se mettre au diapason des différents accords de libre-échange conclus avec différents pays.

Depuis son accession au Trône en juillet 1999, sa majesté le roi Mohammed VI a su conduire le pays dans une voie de transformation économique sans précédent. Des réformes importantes pour attirer les investissements à une véritable stratégie de diversification de l’économie en passant par de vastes projets d’infrastructures, permettant ainsi la modernisation de notre pays.

En un quart de siècle, le Maroc a connu une avancée sur tous les aspects. Son produit intérieur brut est passé de 46,27 milliards de dollars en 1999 à plus de 140 milliards de dollars en 2023, soit une progression globale de plus de 200% sur la période précitée.

Actuellement, le Maroc est le pays africain qui a le mieux réussi à transformer son économie entre 2000 et 2020. Sous la conduite de sa majesté le roi, le pays s’est aussi positionné comme l’un des plus grands hubs logistiques au monde. Le port Tanger Med s’est imposé comme l’un des plus grands acteurs du commerce maritime international et comme le port africain le plus performant de l’indice annuel de la Banque mondiale.

Les perspectives s’annoncent sous de bons auspices à l’horizon 2030, grâce à la mise en œuvre du nouveau modèle de développement et l’organisation de la Coupe du monde 2030, avec tout ce que cela suppose comme réalisation d’infrastructures et d’équipement à la hauteur de l’événement.

L.D.B. : Vous évoquez l’organisation conjointe par le Maroc, l’Espagne et le Portugal de la Coupe du monde de football 2030. Que représente ce rendez-vous pour votre pays ?

A.A. : Cette candidature d’organiser à trois la Coupe du monde 2030 a reçu l’appui du Comité exécutif de la Confédération africaine de football.

 Ce dernier a décidé à l’unanimité et au nom du football africain de la soutenir, après l’annonce faite lors du 73e congrès de la Fédération internationale de football association, qui s'est tenu à Kigali, au Rwanda.

Actuellement, un effort considérable est déployé pour mettre à niveau les infrastructures sportives existantes et en construire de nouvelles, afin d’assurer des installations conformes aux normes internationales.

La Coupe du monde 2030 s’annonce donc comme un moment historique où le Maroc ne se contentera pas d’accueillir un événement sportif mondial, mais offrira également une célébration de l’unité, de la diversité culturelle et de l’hospitalité. Grâce à des préparatifs ambitieux et à une mise en avant de sa richesse culturelle, le Maroc promet une édition mémorable qui dépassera les attentes, transformant le tournoi en une expérience inoubliable pour tous. Ce sera une occasion unique de témoigner de la capacité du football à unir les peuples et de découvrir le patrimoine exceptionnel d’un pays accueillant.

L.D.B. : La question de l’environnement et de l’économie verte préoccupe les autorités royales marocaines. Concrètement, quels sont les projets en cours dans votre pays en rapport avec cette problématique, et comment le Maroc entend-il s’investir aux côtés d’autres pays pour gagner la bataille de la transition énergétique ?

A.A. : Le royaume a élaboré un plan de transition énergétique dont l’objectif est d’assurer 52% de ses besoins en énergie renouvelable. Un chantier supervisé par le souverain en personne de par son importance et sa dimension est aujourd’hui cité comme l’un des plus grands programmes de développement durable dans le monde. 

Subissant les aléas du réchauffement climatique et l’impact négatif des périodes de sécheresse de plus en plus sévères à travers le territoire, le Maroc s'est lancé dans une politique de construction de barrages immédiatement après l'indépendance, pour être en mesure de gérer ses problèmes de pluviométrie.

Cette stratégie s'est avérée nécessaire et s'est révélée vitale pour un Maroc post indépendance, qui plaçait l'agriculture comme un des quatre piliers de son économie, à côté du tourisme, des phosphates, et des transferts de fonds des Marocains de l'étranger. 

Cette très bonne idée de poursuivre sur cette politique fait que grâce à cette prise de conscience, le nombre de barrages totalise maintenant les 56 unités. Autant d'ouvrages qui font du Maroc un précurseur et qui contribuent à  la distribution de l'eau via un réseau couvrant y compris les localités lointaines ;  l'irrigation à grande échelle des terres arables ; la production d'une électricité hydraulique verte.

Grâce aux initiatives royales dans ce domaine, ce dispositif a été renforcé par des projets structurants et d'autres en cours de réalisation, notamment en ce qui concerne le transfert des eaux d'une région à l'autre en cas de besoins via un réseau de canaux conducteurs.

L.D.B. : Le Maroc tient beaucoup à son histoire mais reste ouvert sur le monde. Au fond en quoi consiste la politique extérieure du royaume ?

A.A.: Dans le contexte des mutations accélérées que connaît le monde, sa majesté le roi Mohammed VI a veillé à ce que le modèle diplomatique marocain repose sur la confiance en soi, l’esprit d’initiative, le réalisme et l’efficacité, dans le respect de la légalité et dans un esprit d’ouverture, de modération et d’attachement aux valeurs universelles faisant de notre pays un partenaire efficient, écouté et jouissant d’un capital de confiance et de crédibilité.

Conformément à la vision de sa majesté le roi, la politique africaine du Maroc a atteint aujourd’hui un seuil sans précédent, au niveau de sa portée géographique, de son contenu, de la nature de ses projets et de sa dimension institutionnelle.

C'est dans l'esprit de cette politique africaine solidaire qu'il a mis en œuvre une stratégie audacieuse visant le développement économique et social, ayant pour base les principes de développement durable et la valorisation des ressources, dans une Afrique qui s'attend à devenir le continent le plus peuplé au monde d'ici à 2100.

Concrètement, avec 800 millions de dollars d’investissements directs en 2021 selon le ministère marocain des Finances (contre 100 millions de dollars en 2014), le royaume est devenu le plus grand investisseur africain en Afrique de l’Ouest.

L.B.D. : Parlons précisément des projets développés par le Maroc sur le continent africain

A.A. : Notre pays est passé à une politique dense et multidimensionnelle en nouant des partenariats multisectoriels, établis selon une démarche globale, intégrée et inclusive visant à promouvoir la paix et la stabilité, à favoriser le développement humain durable et à préserver l’identité culturelle et spirituelle des peuples africains.

Depuis son accession au Trône, le roi Mohammed VI a effectué des visites officielles dans différentes régions du continent, reflétant à bien des égards sa vision de hisser les relations de coopération du royaume avec les pays africains vers un partenariat stratégique agissant et solidaire.

En effet, depuis l’an 2000, le Maroc a conclu, dans différents domaines de coopération, plus de 1000 accords avec les pays africains, apportant ainsi son expertise et un partage de son savoir-faire avec ses pairs africains afin de concrétiser les ambitions d’un nouveau modèle de coopération Sud-Sud mutuellement bénéfique, impliquant des formules public/privé et une coopération triangulaire avec les partenaires du Nord.

Les visites royales sur le continent ont également abouti à la mise en place de projets d’envergure, dont le projet de Gazoduc Maroc-Nigeria qui bénéficiera à toute l’Afrique de l’Ouest  contribuant à structurer un marché régional de l’électricité, et constituera une source substantielle d’énergie au service du développement industriel, de l’amélioration de la compétitivité économique et de l’accélération du développement social.

L'initiative internationale du roi Mohammed VI visant à favoriser l'accès des pays du Sahel à l'océan Atlantique s’inscrit dans la continuité des efforts du royaume en faveur d'une Afrique prospère et offre des opportunités pour renforcer l'intégration et la coopération régionales, tout en assurant une transformation structurelle des économies des pays sahéliens.

L’implémentation de l’initiative royale privilégie une approche novatrice et intégrée avec pour objectif de renforcer la stabilité et la sécurité de toute la région et constitue une plateforme pour réaliser le décollage économique du royaume via sa façade atlantique, tout en prenant en considération le voisinage qui inclut non seulement la Mauritanie et le Sénégal, mais aussi les pays du Sahel qui ont pris part à la réunion ministérielle de coordination, tenue dernièrement à Marrakech, à savoir le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad.

L.D.B.: Que pensez-vous de la coopération entre votre pays et le Congo ?

A.A. Les relations d’amitié et de coopération maroco-congolaises ont connu une forte impulsion au lendemain des visites royales effectuées à Brazzaville, en février 2006 et en avril 2018. Ces relations sont confortées par l’excellence des liens fraternels et d’estime mutuelle entre les chefs d’Etat des deux pays, sa majesté le roi Mohammed VI et son frère, son excellence le président Denis Sassou N’Guesso.

La dernière visite royale a été marquée par la participation du roi, en tant qu’invité spécial, aux travaux du premier sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres du Fonds bleu tenu à Brazzaville, le 29 avril 2018, et la signature par la même occasion du protocole instituant la Commission climat du bassin du Congo.

Le royaume du Maroc salue la vision clairvoyante et pragmatique de son excellence le président Denis Sassou N’Guesso pour le développement et l’émergence de la République du Congo qui s’est dotée d’un Plan national de développement ambitieux pour la période 2022-2026, orienté vers le soutien de l’action du secteur privé.

Nous nous réjouissons également de la tenue à Brazzaville, du 20 au 23 novembre 2023, de la réunion préparatoire de la 3e session de la Grande commission mixte de coopération entre le royaume du Maroc et la République du Congo. Cette réunion s’est déroulée dans un climat très constructif traduisant l’excellence des relations de coopération existantes entre les deux pays et témoignant de leur volonté pour insuffler une nouvelle dynamique à ces relations dans tous les domaines. A cette occasion, pas moins de seize projets d'accords de coopération ont été finalisés dans la perspective de la tenue de la grande commission mixte entre nos deux pays.

Propos transcrits par Gankama N'Siah

Légendes et crédits photo : 

Le Chargé d'affaires de l'ambassade du Maroc au Congo, Ahmmed Agargi

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