Recyclage : le commerce de la ferraille au CongoVendredi 23 Août 2024 - 15:00 Tous les jours de la semaine dans les grandes artères de Brazzaville et Pointe-Noire, des jeunes gens sillonnent les rues en vue d’acquérir de la ferraille de toute sorte en provenance des ménages.
« C’est une activité difficile car il faut se lever tôt, se balader dans presque tous les quartiers de la ville. En plus, il faut s’y adonner sous la chaleur et la pluie, sous le froid et la poussière en cette saison sèche. Il faut aussi noter que tout le monde ne regarde pas cette activité d’un bon œil », a reconnu Ousmane Ouédraogo, un ressortissant nigérian d’une trentaine d’années. La méfiance naît du fait que la plupart des gens qui exercent cette activité sont moins bien vêtus et moins bien coiffés. A cause de cette apparence, ils sont considérés comme des malfaiteurs. Qu'à cela ne tienne, c'est un gagne-pain pour bon nombre de ces collecteurs. « D’un côté, il y a des acheteurs ou des grossistes, de l’autre, des intermédiaires ou dépositaires et de l’autre encore, des marcheurs ou des détaillants », a expliqué Jean Philippe, un ressortissant de la République démocratique du Congo avoisinant la quarantaine. La plupart du temps, les grossistes sont des Asiatiques, notamment des Malaisiens, des Chinois, des Indiens, des Pakistanais, etc. Ils disposent des entrepôts vastes pour accueillir et stockés tout type de ferraille, en l’occurrence des appareils électroménagers, des carcasses de voitures et des appareils industriels désuets. Les intermédiaires, quant à eux, sont pour la plupart des fils du pays. Ils disposent des entrepôts pour accueillir et stocker la ferraille. Ce sont eux qui travaillent directement avec les détaillants, c’est-à-dire ceux qui sillonnent les rues et avenues de tous les quartiers à la quête de la ferraille, criant à haute voix: « Ferraille, kissengo, mabende, muke na sumba ou na so somba », selon que l’on se trouve à Brazzaville ou à Pointe-Noire. De façon générale, les intermédiaires s’entourent de plusieurs détaillants dont le nombre peut aller à 30. L’effectif varie en fonction de sa force financière et de la taille de son entrepôt. Ils disposent, le plus souvent, des pousse-pousse qu'ils mettent à la disposition des détaillants. « Chaque matin, les détaillants se présentent chez moi pour prendre les pousse- pousse et une certaine somme. Cet argent leur permet d’acquérir la ferraille auprès des riverains, tout au long de la journée », a admis Bosco Makosso, un intermédiaire . Munis d’un pousse-pousse, les détaillants, en binôme, se baladent à travers les différents quartiers à la recherche des personnes voulant se débarrasser d’un certain nombre d’appareils, à l’instar des fers à repasser, de vieux splits ou de vieux frigos. « Ce sont généralement les riverains qui liquident un vieux appareil ou objet métallique qui proposent les prix de vente aux collecteurs de ferraille. Après, s’ensuit une négociation qui se solde souvent par une entente. L’activité se poursuit ainsi jusqu’à la fin de la journée », a expliqué Brice Malanda, un détaillant. Les choses deviennent intéressantes pour le détaillant en fin de journée quand il va à la rencontre de l’intermédiaire muni de ferraille. L’intermédiaire, avec sa balance, se lance dans le pesage de la marchandise. Le kilo coûte 100 F CFA. Donc si le détaillant a bien travaillé, il devra rapporter, en moyenne, 100 kilos de ferraille en fin de journée s'il s’était vu remettre 10 000 F CFA par l’intermédiaire. Par contre, s'il réussit à ramener plus de 100 kilos de ferraille, tout le surplus constitue son bénéfice. La règle étant celle de bien débattre le coût de ferraille avec les riverains. Les intermédiaires, à leur tour, après avoir collecté une grande quantité de ferraille, se rendent auprès des grossistes pour effectuer la vente. Les grossistes, quant à eux, font le kilo à 250 F CFA. Pour se rendre compte du revenu moyen d’un détaillant, d’un intermédiaire ou d’un grossiste de ferraille, il suffit de multiplier le nombre de kilos récoltés ou vendus par le prix fixé. « Je me moque éperdument du fait que les gens tournent en dérision mon travail. Je suis persuadé que récolter et vendre la ferraille est une activité moins valorisante, mais lucrative. Demandez-vous, pourquoi autant de gens, en particulier les jeunes, se lancent dans cette activité ? La réponse est simple : elle est très lucrative. Laissez-moi vous dire que parfois, je me fais 100 000 F CFA en une seule semaine. Je vous dis que cela en vaut la peine », a reconnu Bienvenu Bantsimba, un détaillant épanoui.
Chris Louzany Légendes et crédits photo :Un collecteur de ferraille /DR Notification:Non |