Justice: un procès-fleuve contre l’ancien président Nicolas Sarkozy

Lundi 6 Janvier 2025 - 15:30

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L’ancien président français, Nicolas Sarkozy, et douze autres personnes sont jugés par le tribunal correctionnel de Paris dans l'affaire dite du financement libyen de la campagne présidentielle de 2007.

C'est une affaire titanesque, à rebondissements. Le dossier de soupçons de financement illégal de la campagne présidentielle de 2007 par des fonds libyens arrive le 6 janvier devant le tribunal correctionnel de Paris. Un procès qui marque le retour de Nicolas Sarkozy devant les juges, où il sera jugé pour "financement illégal de campagne électorale", "corruption passive", "recel de détournement de fonds publics" et "association de malfaiteurs". Dans les 557 pages de l’ordonnance de renvoi, les juges relèvent "le pacte de corruption noué entre Nicolas Sarkozy et Mouammar Kadhafi" le 6 octobre 2005, sans aucun intermédiaire, et considèrent que le premier était parfaitement informé des "agissements qui, la plupart du temps, étaient initiés par (ses) proches". Agissements qui ne pouvaient "être engagés sans l'aval et la parfaite connaissance de cause" du principal intéressé. Des accusations que l’ancien président rejette en bloc. Il ne reconnaît pas avoir reçu un seul centime du régime libyen pour financer sa campagne victorieuse de 2007, et se présente « déterminé » devant les juges pour un procès-fleuve qui durera quatre mois. "Le tribunal doit s'attacher à la réalité des faits et se détacher de cette théorie fumeuse", déclare l'avocat de Nicolas Sarkozy, Me Christophe Ingrain.

Des valises de billets et des virements

Treize ans après  les révélations de Mediapart,  et dix années d'enquête plus tard, ce sont treize personnes qui sont renvoyées devant le tribunal correctionnel de Paris. En 2012, le média d'investigation en ligne publie une note des services secrets libyens tendant à prouver que le régime a versé 50 millions d'euros au camp Sarkozy peu avant le début de la campagne. Une affirmation qui s'ajoute aux déclarations du fils de Kadhafi. En 2013, la justice française se saisit de l'affaire et ouvre une information judiciaire le 19 avril pour, notamment, "corruption" et "trafic d'influence". Les juges s'appuient également sur les déclarations de l’homme d'affaires franco-libanais, Ziad Takkiedine, qui affirmait détenir la preuve de ce financement, expliquant avoir remis trois valises de billets au ministère de l'Intérieur, occupé alors par Nicolas Sarkozy. Dans ce dossier, des très proches de l'intéressé, à commencer par Claude Guéant, son directeur de cabinet et directeur de campagne en 2007, sont mis en cause.

Contreparties diplomatiques

D'autres éléments sont venus appuyer les soupçons de la justice qui tente de déterminer si  l’ancien président était au courant de ces versements. Dans  un carnet appartenant à un ancien dignitaire libyen mort en avril 2012 ont été retrouvées des inscriptions recensant plusieurs versements occultes au bénéfice du candidat pour une somme de 6,5 millions d'euros. Des soutiens financiers qui se faisaient en échange de "contreparties à la fois diplomatiques, économiques et judiciaires" au bénéfice du régime libyen, une « entreprise de réhabilitation » de Mouammar Kadhafi accueilli en grande pompe en France après l'élection de Nicolas Sarkozy.

"Association de malfaiteurs"

Nicolas Sarkozy a enchaîné les recours pour faire annuler l’enquête et cette mise en examen. En octobre 2024, ses avocats ont demandé un supplément d’information sur la base de documents découverts dans une autre procédure judiciaire, à savoir une note de la Direction générale de la sécurité intérieure mettant en doute la véracité de la première "note libyenne" à l'origine de l'affaire.  "On a un dossier de financement libyen avec aucune trace de financement libyen pour la campagne présidentielle, et pour cause, il n’y pas de financement libyen ", dénonce Me Christophe Ingrain, pour cette enquête longue de dix ans qui n'a pas permis de déterminer  le montant de ce financement ou la monnaie permettant ces transactions. Les juges d'instruction s'en sont défendus. " Il existe des flux qu'il convient de resituer dans un contexte à l'aide de témoignages et d'analyses documentaires. (...) Et en matière de corruption, il n'existe pas de preuve absolue ", ont-ils soutenu. Nicolas Sarkozy, Claude Guéant et Brice Hortefeux encourent jusqu'à dix ans de prison, une lourde amende et une interdiction des droits civiques, parmi lesquels le droit de vote ou l’éligibilité, et d’exercer une fonction publique.

 

Noël Ndong

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