Gouvernance : l’Église catholique demande des sanctions contre les opérateurs économiques véreux

Jeudi 21 Novembre 2013 - 18:15

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Dans un rapport publié le 19 novembre à Brazzaville, sur le suivi budgétaire des investissements de l’État dans les domaines prioritaires, la Commission épiscopale Justice et paix (CEJP) a demandé aux pouvoirs publics de punir les actes de corruption ainsi que les opérateurs économiques véreux qui détournent de l’argent débloqué au Trésor public pour la construction de nouvelles écoles

Le document qui est le résultat des enquêtes des commissions Justice et paix à travers le pays, fait état d’une situation catastrophique. « Les infrastructures scolaires publiques sont dans un état de délabrement avancé au point où l’école publique devient l’école des familles démunies », stipule ce texte. Après avoir parcouru le territoire national, la CEJP a constaté, entre autres, le faible niveau d’exécution du budget dans tous les départements, et les incohérences dans les investissements dans l’éducation nationale. Il s’agit parfois d’équiper des écoles qui n’existent pas en réalité. Le taux de financement est très faible pour les infrastructures de l’Enseignement dans les budgets d’investissement (4% du budget d’investissement). « Dans tous les départements, il y a des investissements qui se répètent durant les deux années budgétaires concernées par le suivi budgétaire, 2010 et 2011. Pour 2010, il s’agit de 53,54% et pour 2011, de 49,28% de l’ensemble des investissements dans le secteur de l’enseignement », poursuit le rapport.  

Doubles investissements

Pour s’acquérir des résultats du suivi budgétaire 2010, les commissions Justice et paix ont fait des enquêtes sur cinquante-sept investissements dans dix départements, entre février et août 2012. Selon elles, quarante-deux actions n’ont pas été réalisées en 2010, soit un pourcentage de 75%, quatre ont été achevées complètement pour un taux de 7,14%. La CEJP a également noté des actions évaluées à « rien n’a été fait » mais qui en fait, ont reçu un financement. À Kingoué, dans le département de la Bouenza, souligne la CEJP, il était prévu la réhabilitation et l’équipement des salles de classe du CEG pour une somme de 73 millions FCFA. Il y a juste eu une visite du site par l’entrepreneur. « Cependant, une somme de 67 millions FCFA avait déjà été décaissée au titre de cette action en 2010. Il convient de mentionner que cette action figure parmi les actions reprogrammées dans le budget d’investissement de 2011. » La construction de l’Institut technique et professionnel de Notre-Dame de la Namibie à Loudima, dans la Bouenza, était prévue en 2010 pour une somme de 150 millions FCFA ; elle a été complètement décaissée. « Aujourd’hui, cet institut est presque achevé, mais le début des travaux date de fin 2011. Selon les données mises à disposition par le ministère du Plan, une somme importante a été utilisée pour faire une étude sur la création de ce même institut. »

Dans la partie septentrionale du pays, la situation est presque la même, à lire ce rapport. À Ouesso, il était prévu d’équiper le Lycée technique agricole pour une somme de 150 millions FCFA. Or 145 millions FCFA ont été décaissés en 2010, et le lycée n’a pas été équipé en 2010. À Gamboma, dans le département des Plateaux, la construction des salles de classe, de la salle des professeurs et du bloc administratif du CEFA, pour un montant de 100 millions FCFA prévu, n’a pas été réalisée.Pourtant, 90 millions FCFA ont été décaissés en 2010.

La CEJP s’est également intéressée à certaines actions programmées en 2010, reprogrammées en 2011, ayant reçu un financement en 2010. Et la CEJP de citer par exemple, la construction d'un CEFA des métiers agricoles pour une somme de 118 millions FCFA, dont 98 millions FCFA ont été décaissés au titre de cette action. Il était prévu aussi la réhabilitation et l’équipement des écoles paramédicales de Brazzaville, Pointe-Noire, Dolisie et Owando pour une somme totale de 400 millions FCFA.

En 2011, par exemple, parmi les cinquante-cinq investissements, trente-cinq n’ont pas été réalisés (63,64%), et quatre ont été achevés complètement (7,27%). « Les sommes débloquées pour ces investissements sans résultat s’élèvent à 1,541 milliard FCFA. L’investissement le plus coûteux, parmi ces investissements sans résultats, est celui de la construction de l’école de pêche et d’économie fluviale, dans le département de la Cuvette. Sur 2,5 milliards FCFA, 957,3 millions FCFA, soit un pourcentage de 38%, ont déjà été décaissés pour la construction de cette école », conclut le document.

Quelques recommandations
Au regard de ce tableau un peu sombre, l’Église catholique recommande, entre autres, l’augmentation des budgets alloués aux ministères en charge de l’Éducation nationale et l’accélération de la mise en place de la fonction publique territoriale, en vue d’une répartition équitable des enseignants. Elle suggère ensuite la dotation de l’Université Marien-Ngouabi des structures adéquates et l’ouverture des nouvelles universités ou des branches au niveau de cet établissement public dans certains départements du pays. Aux députés, elle recommande des visites régulières dans leurs circonscriptions pour s’assurer du bon avancement des projets d’investissements, discuter régulièrement avec les responsables de l’enseignement sur les actions programmées dans le budget dans ce secteur, et les informer dans leurs circonscriptions sur les investissements prévus après le vote du budget.

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

photo 1 : Mgr Louis Portella Mbuyu, président de la Conférence des évêques du Congo. photo 2 : Les membres de la CEJP lors de la publication du rapport. crédit photo Adiac