Où sont passées les troupes et compagnies de théâtre de Pointe-Noire ?

Mercredi 5 Mars 2014 - 17:34

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L’art est dans une mauvaise passe à Pointe-Noire. Cela n’est plus un secret, mais le théâtre se meurt encore plus dans la ville océane où les troupes de théâtre se cherchent depuis quelque temps comme une aiguille dans un tas de foin

 Jadis creuset de l’art de Molière avec des troupes aussi réputées que Kulunsi, Punta Negra, Bivelas, Saka Saka Théâtre, l’Arche de Ngoujel, Autopsie, le théâtre des Coulisses, l'atelier Bobatu, Handi-Arts, etc. Aujourd’hui, toutes ces troupes ou compagnies de théâtre ont disparu ou presque, même si certaines essaient de faire des apparitions ponctuelles lors de certaines cérémonies.

Les raisons du déclin du théâtre à Pointe-Noire sont multiples. Les festivals de théâtre dignes de ce nom sont quasiment inexistants. Le Festival de théâtre en campagne (Jouthec), baromètre du théâtre pontenégrin dans les années 2000,  le Fedar, le Festival du théâtre chrétien, le Temps des effusions culturelles pour l’éducation et la jeunesse ont quasiment disparu. Seul le Festival du théâtre scolaire essai de surnager dans ce déluge collectif de l’art théâtral à Pointe-Noire. À qui la faute ?

Les metteurs en scène ou acteurs de talent se font de plus en plus rares. Les quelques comédiens, qui hier encore faisaient la pluie et le beau temps du théâtre pontenégrin, ont rejoint la capitale pour certains ; d’autres ont préféré l’exil. Les plus pessimistes ont préféré jeter l’éponge pour se consacrer à des activités plus lucratives. Sorel Boulingui, de la compagnie Saka-Saka Théâtre est actuellement à Brazzaville, et  Richard Mahoungou, ex-sociétaire de Bivelas, est aujourd’hui en France, par exemple.

Les salles de spectacles sont actuellement inexistantes depuis la démolition de la salle de la pagode du Centre culturel français il y a pratiquement dix ans. Les amphithéâtres de Sueco au centre-ville  ou Sur le Chemin de Damas à Siafoumou dans le cinquième arrondissement Mongo-Mpoukou, censées pallier cette carence présentent trop d’incommodités pour la pratique de l’art théâtral. Les artiste-comédiens sont alors obligés de faire des représentations dans des espaces ouverts et parfois dans la rue. Un comble ! Les mécènes et producteurs de spectacle de théâtre font également cruellement défaut à Pointe-Noire, une ville où les producteurs préfèrent financer à coût de millions des spectacles de musique d'artistes et de groupes étrangers.

Ce désintérêt pour le théâtre, à n’en point douter, est sans conséquence dans la société. L’éducation par le théâtre devient presque impossible. Il est loin le temps où les pièces de théâtre étaient prises en exemple pour moraliser la société. Le théâtre, art par excellence qui permet d’améliorer son élocution, de vaincre le trac en affrontant le public, est aujourd’hui relégué aux oubliettes comme la cinquième roue de la charrette. Les rares troupes et compagnies de théâtre qui existent encore doivent faire face à une kyrielle de contingences, tel le financement des spectacles, la prise en charge des comédiens, la location de salles… Les plus audacieux essaient de tenir la route en y laissant souvent des plumes après chaque representation.

En l’absence d’un théâtre digne de ce nom, ce sont des groupes de sketchs qui prolifèrent dans la ville océane ces derniers temps, sans pour autant remplacer les compagnies de théâtre professionnelles. Le langage souvent trivial et le manque de professionnalisme, ajouté à un humour souvent de mauvais goût de ces pseudos comédiens sont loin de contenter un public habitué à suivre les représentations de pièces classiques ou autres de nos auteurs.

Hervé-Brice Mampouya

Légendes et crédits photo : 

Photo : Une pièce de théâtre jouée par des comédiens lycéens. (© Adiac)