Ruth Saya-Maba : « Aujourd’hui on ne peut plus tout attendre de l’homme »

Samedi 8 Mars 2014 - 3:45

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Ruth Saya-Maba a roulé sa bosse à Lina Congo comme hôtesse d’accueil à partir de 1982. Elle a été chef d’agence de 2004 à 2009, jusqu’à ce que la société ferme. Elle dirige aujourd’hui la société Dove’s Travel

Vêtue de cette nouvelle cape, le chef d’entreprise a quelque cinq personnes à sa charge. C’est elle qui prend les décisions, organise le travail. « Je me suis retrouvée dans cette activité de promotrice d’une agence de voyage parce que c’est une passion pour moi. J’ai évolué dans une compagnie aérienne. À sa fermeture, j’ai décidé de m’occuper, n’étant pas habituée à rester à la maison. Je n’ai pas voulu affronter les vicissitudes de la vie que peut rencontrer une femme considérée par la société comme un être faible. J’ai décidé de créer mon business personnel. C’est cette expérience qui m’a permis de me prendre en charge », nous a-t-elle confié.

Ruth Saya-Maba a déjà plus de cinq ans d’expérience dans ce métier. Elle se bat le mieux qu’elle le peut à faire la différence car la République du Congo regorge d’une multitude d’agences de voyage. Sa structure est représentée aussi à Pointe-Noire et Dolisie, les grandes villes du Congo. Elle a l’ambition de s’identifier aux grandes agences internationales en sortant hors des frontières.

Consciente de la condition féminine au Congo, cette opératrice économique, peu connue du grand public fait du chemin. Elle  encourage les femmes à être entreprenantes en ayant le goût du risque. « Ce que les hommes font, nous aussi pouvons le faire. En plus, lorsque c’est la femme qui le réalise, c’est mieux qu’un homme car nous avons un cœur de mère. Si nous arrivons à gérer nos ménages, c’est que nous sommes capables de gérer nos administrations », s’est-elle exclamée.

S’agissant de son personnel, son regard est tourné vers les femmes. Son recrutement est porté vers elle, car Ruth considère que la femme se met en position de faiblesse. Aussi en apportant sa pierre à ce combat, elle insiste sur la liberté que procure le travail et le respect qui se dégage dans les relations avec la gent masculine. « Cette faiblesse se fait sentir parce que nous le voulons ainsi. Le monde professionnel n’est pas facile, mais il faut se battre pour se faire une place parmi les hommes », a-t-elle déclaré, confiante.

Prenant appui sur son expérience de mère, épouse et travailleuse, elle est épanouie car elle a à ses côtés un mari qui accepte qu’elle travaille et l’aide à évoluer. Déjà, elle avait commencé à gagner de l’argent avant qu’elle ne se marie, et son compagnon avait accepté, à l’époque, de cheminer avec une femme qui est toujours absente, car partie tôt pour rentrer tard. Mme Saya-Maba vit très bien sa vie familiale, car elle sait comment la concilier avec son travail. Il est question de tout mettre ensemble. Le repas pour la famille est concocté par elle-même. Il est impérieux pour cette femme de surveiller la nourriture que mangent son mari et ses enfants. « L’idéal serait que les hommes puissent nous aider, on doit s’entraider, surtout lorsque l’on s’engage dans une vie où il faudrait faire des enfants et que l’on n’a pas de moyens ; c’est un problème de responsabilité partagée », a-t-elle émis.

Le 8 mars de cette année est placée sur le thème « L'égalité pour les femmes, c’est le progrès pour toutes et tous ». La responsable de l’agence de voyage et de tourisme interprète ce thème par l’absence de différence. Dans sa compréhension, il est accordé les mêmes chances à tout être humain. En évoquant cette journée, cette chef d’entreprise dans le tourisme salue la mémoire de celles qui ont donné la possibilité à la femme de s’exprimer. « Dans certaines familles, il était dit quand vous êtes femmes, vous êtes là pour procréer et servir le mari et non contribuer financièrement. Cette date permet à la femme de s’exprimer », s’est-t-elle émue.

Révoltée dans son fort intérieur, elle confie qu’il n’est plus question de considérer la femme comme une chose. Elle a le droit qu’on lui accorde de l’importance, car cette dernière peut s’organiser et prendre en charge une bonne partie de la vie sociale d’un pays. « On ne peut plus à ce jour attendre tout de l’homme. Parfois, ce qu’il apporte ne suffit pas. On travaille pour améliorer ses conditions de vie ainsi que celles des enfants et se prendre en charge. On reconnaît que le mari est le chef de la maison, mais seul aussi, il ne peut pas, il a toujours besoin de l’apport de sa femme », a-t-elle conclu.

Nancy-France Loutoumba

Légendes et crédits photo : 

Photo : Ruth Saya-Maba. (© Adiac)