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1997, une année de triste mémoire

Samedi 14 Février 2015 - 11:24

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Janvier 1997, retour triomphal de Denis Sassou Nguesso à Brazzaville après un séjour à Paris. La population l’a reçu en libérateur. À la foule nombreuse massée devant son domicile de Mpila, Denis Sassou Nguesso lança quelques petites piques, dont celle-ci, pleine de sous-entendus : « alors, mes frères, êtes-vous mieux maintenant que sous mon règne ? »

 Pendant quasiment cinq ans le pouvoir en place l’a poursuivi d’une haine et d’une vindicte implacables et tenaces. Mais en 1997, les sondages commandés par ce pouvoir donnaient Lissouba perdant dans l’hypothèse d’une éventuelle confrontation électorale face à Sassou Nguesso. À l’évidence, après cette expérimentation hasardeuse et catastrophique de la démocratie, le peuple avait compris, hélas bien trop tard, que son salut viendrait de cet homme. Le passé doit éclairer l’avenir.

En effet, la « démocratie de l’intimidation » avait enveloppé le pays dans une véritable chape de plomb. Prisonniers en plein air, les Brazzavillois et les Congolais d’une manière générale, étaient médusés par la transformation de la « petite Suisse » en Golgotha. Le retour aux affaires de Denis Sassou Nguesso a permis au Congo d’arrêter sa fulgurante descente aux enfers. Il l’a remis sur les rails. En témoignent, les performances économiques enregistrées par le pays. Nous venons de loin. Il faut qu’on s’en souvienne.

 Après une entrée désastreuse, les Congolais aspiraient à une vraie démocratie. Résultat, comme je  le dis souvent,  depuis 1997, la démocratie est en marche mutatis mutandis ; la paix, ébranlée par l’amateurisme d’un pouvoir haineux, a été restaurée. Le pays  connaît une incontestable modernisation qui implique celle de ses institutions, en relation avec les enjeux actuels et futurs.

La mauvaise gouvernance, le tribalisme, le régionalisme, la dictature, le favoritisme, toutes ces dérives anti démocratiques, dénoncées à cor et à cri par des aigris, le peuple congolais les a vécues au sortir de la Conférence nationale. Elles ont été à l’origine du recul de nos libertés mises sous l’éteignoir par des politiciens qui, visiblement, n’avaient rien compris. Les mêmes reviennent aujourd’hui en donneurs de leçons. L’étendue de leur cynisme nous rappellent leurs méfaits.  Ils ne sont étouffés ni par la modestie ni par l’humilité.

 Usant d’un discours belliqueux consubstantiel à leur démarche politique fondée sur une violence spectrale, ils s’ingénient à nous faire peur depuis que le débat sur le changement de la Constitution du 20 janvier 2002 a commencé. La rénovation de la République résultera inévitablement d’une évolution endogène de nos institutions et non de la pression d’une prétendue opinion internationale, dont les méfaits ne se comptent plus en Afrique. La déliquescence de la Lybie et ses conséquences collatérales, parmi lesquelles le terrorisme, dont Boko Haram est le parangon, doit nous faire réfléchir.

  Le dialogue constituant vise cette modernisation par des réponses appropriées et consensuelles sur la manière de changer la gouvernance, d’assurer l’équilibre des pouvoirs, de combattre les dérives népotiques, de remettre, par la loi, de l’ordre dans l’espace politique en constitutionnalisant le nombre de partis à 3 ou quatre, de réinstaurer d’une part, la motion de censure et, d’autre part la dissolution ; celle-ci constitue un rouage indispensable à tout régime démocratique. Elle est la contrepartie normale du pouvoir de l’Assemblée de renverser le gouvernement. C’est à ce prix que d’une assemblée caisse de résonnance, on passera à une assemblée responsable ; envisager l’élection du président de la République à un tour et à la majorité simple, pour des raisons financières évidentes, quand on parle de bonne gouvernance, etc. Il faut éviter le ravalement de façade, soutenu par certains, pour envisager une modification profonde qui permette l’émergence de cette nouvelle république souhaitée par tous, même si, pour des raisons inavouables et des considérations personnelles, certains freinent des quatre fers.

Le vrai combat est d’assurer, enfin, au Congo un avenir constitutionnel. Depuis la fin de la Conférence nationale souveraine, aucune constitution n’a connu une exécution effective. On se souvient, et je l’ai écrit ici, celle de 1992, sophistiquée, selon le mot du Pr Pascal Lissouba, a vécu sans avoir  servi. Elle a conduit à l’immobilisme des institutions et débouché sur la guerre. Celle de 2002 a connu un meilleur sort, en dépit des faiblesses rédhibitoires. Elle a permis de mettre fin aux violences post conférence nationale. Elle a fait son temps, comme toutes les autres avant elle. Vivement une nouvelle Constitution.

Cette  nouvelle Constitution, peu importe qui sera candidat ou non, doit annihiler, à la fois dans sa conception consensuelle et son  contenu novateur, ce halo guerrier qui nimbe encore notre vie nationale. Le pays a besoin, au-delà, des conjectures et des soupçons, d’un nouveau pacte républicain.

 

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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