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La révision de la Constitution : les vertus de l’onde de choc de la transition politique du Burkina Faso en AfriqueVendredi 7 Novembre 2014 - 13:15 La démission de Blaise Compaoré de la présidence de la République du Burkina Faso, le 31 octobre 2014, suite au mouvement insurrectionnel de la population, qui refusait que soient modifiées les dispositions de la Constitution empêchant le chef de l'État de briguer un cinquième mandat présidentiel, a provoqué une onde de choc dont l’écho se répand dans toute l’Afrique. La question qui se pose est celle de savoir si une Constitution est révisable et pourquoi on doit la réviser ? La révision constitutionnelle est généralement prévue dans les dispositions de la Constitution elle-même qui en fixent les modalités. Il s’agit d’un exercice de reformulation des règles qui régissent les rapports entre le peuple et ses dirigeants politiques, pour les adapter aux évolutions de la société. L’éthique politique exige que le chef d’État en exercice qui envisage une telle opération propose au peuple un nouveau contrat social porté par des nouveaux acteurs issus de toutes les forces vives de la nation, s’engage à entreprendre les ultimes chantiers de développement économique et social qu’il n’a pas terminés durant son mandat finissant, et qui sont susceptibles de mettre en harmonie son action avec les attentes légitimes du souverain peuple. Deux voies salutaires s’offrent au chef d'État : la révision par voie référendaire ou la révision par voie parlementaire. Par la première voie, la révision constitutionnelle tire sa légitimité directement du peuple qui appréciera, souverainement et lui-même, le bilan des mandats présidentiels précédents, le nouveau contrat social proposé et la qualité des acteurs qui le porteront. Par la deuxième voie, la révision constitutionnelle tire sa légitimité indirectement du peuple, car la majorité présidentielle coïncidant avec la majorité parlementaire, l’appréciation de la qualité du bilan des mandats précédents par les députés et les sénateurs réunis en Congrès, de la qualité du nouveau projet de contrat social et de celle des acteurs qui le porteront, ne posera aucun obstacle. Cette voie est la moins onéreuse. C’est d’ailleurs la plus utilisée en Afrique, quand le peuple est encore en harmonie avec l’action politique du chef de l’État et de sa majorité présidentielle au Parlement. Et surtout quand le peuple attend un nécessaire réajustement institutionnel pour continuer à progresser vers le développement économique et social de la Nation. Mais, lorsque le peuple n’est plus en phase avec l’action du chef d’État et de celle de sa majorité présidentielle au Parlement, et n’attend plus rien de l’action politique de ses représentants, la révision par voie parlementaire peut exacerber sa colère. Le peuple peut alors exercer son ultime droit : le retrait de sa confiance à ses représentants et agir directement par lui-même au moyen d’un mouvement insurrectionnel populaire afin de changer le régime politique. Même au prix d’un chaos institutionnel. Tels sont les enseignements qu’apporte le cas du Burkina Faso où le président Blaise Compaoré qui, par un subtil jeu de levée de la limitation de mandats présidentiels en 1997, puis de restauration de cette limitation en 2000, avait réussi à se maintenir au pouvoir, depuis son coup d’État de 1987, avant de se prendre à son propre jeu, le 28 octobre 2014, en reformulant au Parlement une deuxième demande de trop de levée de limitation des mandats présidentiels, sans contre partie acceptable par son souverain peuple. Ce dernier, exacerbé, a exercé son ultime droit et le chef de l’État "a tiré sa révérence". Bien que les contextes locaux ne soient pas toujours les mêmes, l’esprit du cas du Burkina Faso peut se reproduire ailleurs en Afrique où la résolution de l’équation de la révision constitutionnelle se pose. Surtout dans les pays dont les chefs d’État sortants, ou leurs représentants, ont déjà plus ou moins manifesté leur intention de briguer un nouveau mandat alors que la Constitution le leur interdit. Ainsi, l’onde de choc provoquée par la brutale transition politique au Burkina Faso donne de l’espoir aux peuples africains épris de paix et de justice. Mais aussi aux différents chefs d’État en exercice qui ont un bilan positif de leurs mandats, qui ont encore des projets à réaliser, qui cherchent à mieux harmoniser leur action politique avec les attentes de la population et qui sont confrontés à l’obstacle majeur du respect de la règle constitutionnelle. La maîtrise de la levée de cet obstacle dépend du degré de confiance que le chef d’État pourra regagner auprès du souverain peuple. Ce degré de confiance est fonction de la qualité du bilan des mandats précédents, du nouveau projet de contrat social proposé et des ministres rassemblés pour porter et terminer les importants chantiers inachevés. Par Emmanuel Okamba Maître de Conférences HDR en Sciences de Ge Edition:Édition Quotidienne (DB) |