Opinion
- Éditorial - Les Dépêches de Brazzaville
- Réflexion - Jean-Paul Pigasse
- Le fait du jour - Gankama N'Siah
- Humeur - Faustin Akono
- Chronique - Boris Kharl Ebaka
- Brin d’histoire - Mfumu
- Tribune libre - Sergueï Lavrov
- Idées-forces - Les Dépêches de Brazzaville
- Analyse - Xinhua
Brazzaville, 134 ansVendredi 7 Novembre 2014 - 13:11 Brazzaville, 134 ans. C’était, il y a quelques semaines. C’est l’occasion de revenir sur un texte d’André Davesne de 1937, qui a marqué de nombreuses générations d’écoliers congolais, intitulé : Croquis de brousse. « À sa sortie du « couloir » (un étranglement de 800 m de large), le Congo s’étale en une sorte de lac, le Stanley Pool. […] Sur la rive droite, c’est Brazzaville. Étirée tout en longueur, Brazzaville comprend trois quartiers qui se superposent en marches d’escalier : le « Plateau », quartier administratif ; le « Tchad », quartier militaire ; la « Plaine », quartier commerçant, auquel fait suite le malsain « MPila ». De la première à la dernière maison, il y a plus de 8 kilomètres… et Brazzaville compte à peine 2.000 habitants ! Les chefs qui ont présidé à la naissance des villes de l’Aef – et notamment de Brazzaville, Pointe-Noire, Fort-Archambault – ont manifestement été hantés du désir d’échapper à la critique qu’ont méritée beaucoup de coloniaux : ils se sont refusés à bâtir des villes étriquées, ils ont vu « grand ». Mais ils sont tombés dans un autre travers. Voir grand aurait dû consister dans l’établissement permettant une extension progressive de la ville, mais limitant le développement actuel aux nécessités présentes. Or, ils ont, dès l’abord, fixé les limites de la cité future et amorcé la construction de cette cité en semant ça et là, sur toute la superficie prévue, des bâtiments de toute nature, administratifs ou autres ; ici, la douane ; puis à vingt minutes de marche, la gare ; trois kilomètres plus loin, la poste ; ailleurs, les bureaux du Gouvernement général ; ailleurs encore, les habitations du personnel ; tandis que les commerçants s’installaient loin de tout le monde, sur la berge même du fleuve. Acheter un timbre devient, dans ces conditions, une véritable expédition ; faire son marché est une marche d’épreuve ; et, pour peu qu’on doive passer dans plusieurs administrations différentes, on parcourt vingt kilomètres dans la journée ! Pour relier entre elles ces maisons éparpillées, il a fallu des dizaines et des dizaines de kilomètres de routes, de canalisations d’eau, de fils électriques et téléphoniques ; on dut, en outre, organiser des services de transport pour conduire les fonctionnaires de leur logement à leur bureau et vice-versa, et pour assurer le « ramassage » des élèves de l’école européenne. Tout cela coûte un prix fou ! Un autre inconvénient de cette absurde dispersion est que les îlots habités se trouvent séparés les uns des autres par de vastes étendues inoccupées qu’envahissent la brousse et les eaux stagnantes. Jusqu’à des temps plus proches, Brazzaville était ainsi coupée de fondrières, de marais, de fourrés, qui devenaient des gîtes à moustiques et reptiles ou des foyers de pestilence. 1937-1938, le Gouverneur général Reste la fit assainir et fit aménager, dans tous les terrains vagues, des pelouses et des parterres. À dire vrai, Brazzaville, malgré son titre de capitale, ressemble davantage à un grand village qu’à une ville moderne. Pas de monuments grandioses, ni de constructions imposantes, mais de petites villas sans prétention ; le « palais » du chef de la colonie est lui-même une très modeste demeure et les bureaux de ses chefs de service sont d’humbles baraques. On y voit que fort peu de ces mornes rues de nos villes européennes où les maisons revêches s’alignent coude à coude ; par contre, elle est sillonnée de belles et larges avenues bordées de jardins dans lesquels les maisons se dissimulent sans alignement, en désordre sympathique. L’impression d’ensemble est celle d’un vaste parc : partout, des pelouses de « paspallum », un tenace chiendent qui résiste à des mois de sécheresse ; des pergolas qu’escaladent des plantes grimpantes ; des arbres magnifiques : palmiers aux élégants panaches, manguiers couverts de fruits qui pendent au bout de longs pédoncules, « arbres de fer » aux voûtes harmonieuses d’où tombent de lourdes grappes violettes qui ressemblent à la glycine, acacias de toutes espèces, au feuillage dentelé, délicat et mobile, et surtout flamboyants (arbres portant de magnifiques bouquets de fleurs d’un rouge vif), qui sèment dans « Brazzaville la Verte » la splendeur pourpre de leurs bouquets. […] » À l’évidence, André Davesne ne s’est guère « aventuré » dans les « Brazzavilles Noires », Bacongo et Poto-Poto. S’il revenait aujourd’hui à Brazzaville, il s’y perdrait, tant la ville a changé. Et, Brazzaville poursuit sa mutation. Un vœu tout de même à Hugues Ngouélondélé, maire fraîchement réélu de Brazzaville : un planting à grande échelle de flamboyants, ces arbres qui conféraient à la ville un charme singulier. Mfumu Edition:Édition Quotidienne (DB) |