Alimentation : déjà 700 000 morts en l’espace de quatre ans à cause de la faim

Samedi 8 Juillet 2017 - 17:45

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Le lancement du dernier rapport de l’étude sur le coût de la faim en RDC promet de susciter un grand débat pour ses révélations. Entre 2010 et 2014, au moins 729 000 décès d’enfants sont signalés pour cause de sous-nutrition sur l’étendue du territoire national. Ce chiffre représente au moins 30 % de tous les cas de mortalité des enfants de moins de cinq ans au cours de cette période. Une situation qui semble contredire la vocation agricole du pays sans cesse réaffirmé par le gouvernement. En RDC, on meurt encore de faim. Au niveau de leurs conclusions, les enquêteurs ont mis en garde sur l'urgence pour le pays de s'investir totalement dans la lutte contre ce fléau qui risque de plomber le développement économique faute d'une main d'oeuvre apte à exécuter les nombreux chantiers nationaux.

Parler d'une telle ampleur de sous-alimentation paraît quelque peu déplacée dans un pays présenté historiquement comme un grenier agricole. Pourtant, la question a mobilisé en début de week-end l’équipe gouvernementale sous la conduite de son Premier ministre, Bruno Tshibala Nzenzhe. En effet, les autorités congolaises ont lancé solennellement le rapport de l’étude sur le coût de la faim en RDC, une étape importante avant la mise en place dans les meilleurs délais, espère-t-on, d'une véritable politique nationale de lutte contre la faim. La cérémonie officielle a connu la participation des représentants des agences du Système des Nations unies et d’autres partenaires au développement dont les techniciens et financiers. Sur le terrain, le projet est exécuté par le Programme alimentaire mondial (PAM). Toutefois, il s’agit d’une initiative régionale menée par la Commission de l’Union africaine et la Commission économique pour l’Afrique.

D'emblée, l'idée est d’aider la RDC à se doter d’une base fiable de données sur l’impact social et économique de la sous-nutrition chez l’enfant pour une année donnée. Aussi l’enquête a-t-elle confirmé les craintes de départ. La situation de malnutrition infantile n’est plus un secret dans le pays. Au-delà, l'on sait mieux à présent les effets sur d'autres secteurs dont la santé, l’éducation, la productivité et même l’économie nationale. Les enquêteurs en sont arrivés à appuyer sans détour une approche politique multisectorielle dans le but d'agir plus efficacement au retard de croissance de l'enfant. Lors de sa prise de parole, Bruno Tshibala a réaffirmé la détermination tant du chef de l’État que de son gouvernement à mener une lutte acharnée contre ce fléau très dévastateur. Son principal objectif est bien entendu d’arriver à réduire la mortalité infantile dans le pays.

Pistes de solutions

Pour y parvenir, la stratégie gouvernementale privilégie à ce stade la redynamisation de la structure productive du monde rural. Elle intègre ainsi le développement de la production agro-industrielle et le renforcement des petits exploitants. Au-delà, elle appuie les efforts d'optimisation des potentialités du pays dans les domaines aussi divers que l’élevage et la pêche. La nécessité de maintenir une politique très forte dans cette matière est justifiée pour juguler les effets dévastateurs signalés sur les résultats scolaires des enfants victimes de la malnutrition chronique. Ventre affamé n’a point d’oreilles, dit-on. Et cela se vérifie dans le constat d'une montée des risques de redoublement, d’abandon et même de réduction des capacités productives de l’enfant avec des conséquences néfastes plus tard à l’âge adulte.

En intervenant de manière plus efficace, le pays devrait arriver à agir sur au moins 48 % de la mortalité infantile actuellement recensée. Ce qui n’est pas rien. Il n’est pas exagéré d’affirmer également que la malnutrition représente aujourd’hui l'un des défis majeurs du développement, à côté des infrastructures et de l’énergie. En validant les résultats du rapport, les autorités congolaises et le PAM pourront initier à présent un véritable plaidoyer en faveur d'une augmentation indispensable des investissements tant nationaux qu'étrangers pour prévenir et lutter plus efficacement contre la faim en RDC. Il faut classer ce défi comme la priorité des priorités en mettant en œuvre une politique nationale multisectorielle de nutrition, suggère le PAM. Ce qui explique la présence à cette cérémonie de plusieurs ministères sectoriels qui ont fourni, chacun à son niveau, des efforts considérables pour réunir et finaliser la collecte des données nécessaires pour assurer au pays une meilleure visibilité de l’ampleur de la malnutrition et donc d'une meilleure prise en charge de la faim dans le futur.

Laurent Essolomwa

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