Bangui : un retour au calme teinté d’exactions et de violences

Samedi 25 Janvier 2014 - 16:43

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En dépit de quelques actes de violences et des tueries qui persistent dans les banlieues de Bangui et ses environs, le climat détendu dans la capitale fait naître auprès de la population une lueur d’espoir, surtout avec l’installation jeudi de la nouvelle présidente de transition, Catherine Samba-Panza

Circulation intense des véhicules et des personnes, bistros ouverts, petits et grands commerces fonctionnels, les Banguissois retrouvent peu à peu l’ambiance dont ils ont été privés des mois durant. « Les gens sont aujourd’hui très contents de voir la vie reprendre son cours à Bangui où il n’a plus fait bon vivre pendant quelque temps. Ce que nous vivons à l’heure actuelle nous donne de l’émotion après tant de privations de liberté à cause de l’insécurité », a déclaré aux Dépêches une Centrafricaine rencontrée jeudi à Bangui.

Le long de l’avenue Boganda qui mène dans le centre-ville, les va-et-vient des taxis, pousse-pousse, motocyclettes et même des piétons donnent l’image d’une ville pacifiée, bien que la peur demeure dans les esprits. Pour les Banguissois, l’espoir d’un retour à la normale reste permis avec l’arrivée de Catherine Samba-Panza à la tête du pays. Ceux qui le disent s’appuient sur les qualités de bonne gestionnaire reconnues à la femme en général.

« Nous sommes au centre ville dans le premier arrondissement de Bangui où les activités reprennent progressivement. Le rétablissement de la paix reste la première préoccupation de tous les Centrafricains. Sans la paix et la sécurité, aucune administration, aucune structure ne peut fonctionner », a précisé Valdie, une étudiante en économie et finances, regrettant le fait que les écoles et universités restent fermées.

Le secteur informel prêt à relancer l’économie

Si l’administration publique et les hôpitaux fonctionnent timidement ou pas du tout, le secteur informel par contre refait surface sur les principales artères du centre-ville et aux abords des rues et avenues. Vendeurs ambulants, tenanciers de bars et kiosques ou réparateurs de vélos et autres acteurs de l’informel essaient, à leur façon, de redonner de la joie de vivre à Bangui. Quant aux sociétés commerciales, détenues par des étrangers, la préoccupation première reste également la sécurité. Une condition pour espérer se refaire financièrement tant le manque à gagner pendant la période d’instabilité a lourdement fait chuter le chiffre d’affaires. De nationalité libanaise, le directeur général de la société CAM, spécialisée dans la vente de pièces détachées de véhicules, estime que « la première chose à laquelle nous nous attendons c’est le retour de la paix et de la sécurité pour faire tourner nos affaires ».

Contraints au chômage et à l’inactivité, les jeunes sont plus visibles par groupes le long des principales avenues sur lesquelles circulent essentiellement les véhicules de la Misca (Mission internationale de soutien à la Centrafrique), de l’opération Sangaris et ceux des humanitaires reconnaissables aux emblèmes dont ils sont tous estampillés. Afin de s’occuper et tenter de dissiper leur désœuvrement, ces jeunes s’adonnent au sport sur des espaces libres. C’est le cas de la petite aire de jeux située à la lisière de l’aéroport Mpoko de Bangui où l’on voit des jeunes tuer le temps en tapant dans le ballon. Certains, les yeux tournés vers le ciel, observent les rares atterrissages et décollages d’avions. Il est facile de deviner le fond de leur pensée. Dans ce même aéroport Mpoko, des milliers de Centrafricains sont réfugiés depuis quelque mois, non sans tendre l’oreille à l’évolution de la situation dans le pays. Malgré l’appel réitéré de la présidente de transition, Catherine Samba-Panza, de regagner leurs domiciles, de nombreux Centrafricains affichent encore leur réticence. Et pour cause !

Des efforts supplémentaires attendus de la Misca

Face à la situation sécuritaire encore précaire à Bangui et ses environs, des efforts supplémentaires sont attendus de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique qui, malgré tout, travaille pour améliorer la situation. « Je suis tout à fait satisfait du travail abattu par la Misca et l’opération Sangaris. La sécurité revient petit-à-petit bien sûr, mais un effort supplémentaire reste à faire dans les bas-fonds de la capitale où se cachent encore quelques éléments incontrôlés et prêts pour des règlements de compte », a déclaré le chef de la Misca, le général Jean-Marie Michel Mokoko.

 En ce qui concerne le travail sur le terrain, il a estimé que les choses se déroulaient bien et les violences observées dès le premier jour de la prise de commandement ont été circonscrites. « La vie reprend son cours normal. Seulement lorsqu’un peuple a été traumatisé comme il l’a été, il faut lui donner le temps de digérer et voir comment les choses se déroulent sur le terrain », a-t-il souligné, ajoutant que « la Misca arrivera, conformément à l’attente des nouvelles autorités centrafricaines, à stabiliser la situation à Bangui d’ici à quelques jours ».

Née des cendres la Micopax, la Misca est essentiellement composée de troupes d’Afrique centrale. La force constituée de contingents congolais, camerounais, gabonais, tchadien, rwandais, burundais et de RDC, donnent satisfaction au peuple centrafricain. « Tous les contingents se comportent de façon assez intéressante dans la mesure où la mission est la fois complexe et difficile sur le terrain. Je pense donc que le contingent congolais donne satisfaction au commandement », a précisé le général Jean-Marie Michel Mokoko.

Guy-Gervais Kitina

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : L'ambiance sur l'avenue Boganda à Bangui le jeudi 23 janvier. (© Adiac) ; Photo 2 : Le général Jean-Marie Michel Mokoko, chef de la Misca. (© Adiac) ; Photo 3 : Une vue du contingent congolais de la Misca. (© Adiac)