Brazzaville à l’approche de la fin du ramadan

Samedi 19 Juillet 2014 - 0:45

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À l'approche de la fin du jeûne du ramadan, les musulmans de Brazzaville se mobilisent comme ceux du monde entier pour célébrer pleinement cet événement synonyme de retrouvailles, de partage, de pardon et bien évidement de réjouissances. Rencontre avec Sow Allasane, Djibril, Aissatou, Nafi... Ils nous parlent de cet instant tant attendu

« Cette année, il n’y a pas de grandes bousculades dans les marchés et magasins de la place, idem pour les couturiers et traiteurs », indique Sow Allasane, commerçant sénégalais habitant le quartier Moungali. Une attitude qu’il explique comme suit : « Les prix des marchandises sont fort élevés, et cela ne permet pas aux familles de faire correctement les courses pour la fête. Mais inch’Allah, nous prions pour que la fête soit belle ! »

La fin du ramadan, généralement synonyme de dépenses dans les ménages, n’a pas la même résonnance que les années antérieures à Brazzaville. Un manque d’engouement que Diabaté, commerçant malien, met sur le compte des finances, car, dit-il, « même si certains ont commencé à faire les courses, ils restent néanmoins modestes et sobres. Mais en ce qui me concerne, ma situation économique actuelle ne me permet pas de faire des dépenses démesurées. S’il fallait penser aux parents, habiller son épouse et ses enfants, je ne m’en sortirais pas. Cette année, je table tout sur le repas et je sais que mon monde n’appréciera pas, mais je ne peux pas faire autrement… »

Si les hommes sont peu dépensiers, les femmes, elles, trouvent en cette fête malgré la crise financière le moment rêvé d’exhiber leurs toilettes. « J’ai déjà acheté ma robe Bazin et les chaussures, il ne me manque plus que le sac et le foulard. Mais si je ne peux pas les avoir, ce n’est pas grave, car il faut aussi que je pense à habiller mes enfants », a fait savoir Rockya Kondé, femme au foyer et mère de quatre enfants.

Aissatou Cissé, également femme au foyer, mère de cinq enfants et vivant avec se trois nièces, ne se plaint pas. Pour elle, chaque ramadan est un nouveau départ, et les soucis financiers bien que présents n’entament pas son moral. Quant aux préparatifs, elle s’y attelle petit à petit. « Pour moi, les habits sont secondaires. Je suis plutôt en train de réfléchir comment décorer ma maison. Je dois faire un grand ménage et sortir ma plus belle vaisselle, décorer le salon en installant les téra–téra, les tapis au mur, de nouveaux rideaux. Bref, j’espère que toutes les pièces de la maison seront joliment décorées et embaumées par de l’encens », a expliqué Aissatou, qui attend avec impatience cet événement pour servir les mets qu’elle aura concoctés et offrir du thé dans ses nouvelles tasses achetées pour l’occasion.

Mais si certains hésitent encore à faire de grandes dépenses, beaucoup sont prêts à faire des sacrifices. « C’est quand même une grande fête musulmane, c’est l’occasion de se retrouver avec la famille, de se faire beau et de faire en sorte que les enfants gardent un beau souvenir de ce jour qui pour moi est comme le Noël des chrétiens. Pour mes six enfants, je vais leur acheter les plus beaux boubous. Pour ma femme et ma jeune fille, je voudrais qu’elles se parent de la tête aux pieds », a fait savoir Djibril, commerçant habitant le quartier Kinsoudi.

Nafi, jeune fille d’à peine vingt ans qui vient de rejoindre son époux à Brazzaville, est nostalgique. Elle se sent un peu perdue : « Je ne retrouve pas cette effervescence que j’ai connue à Saint-Louis à l’approche du ramadan. Mais l’essentiel est que je sois auprès de mon mari et que je puisse me faire belle pour lui. » En effet, les femmes et les jeunes filles ne ménagent pas leurs efforts pour être parmi les plus belles : tatouages des mains et des pieds ornés de jolis motifs au henné, des habits en Bazin, des chaussures et des accessoires assortis.

Loin d’être une fête opulente où les femmes exhibent leurs richesses vestimentaires, « le ramadan est aussi l’occasion de se faire de l’argent grâce à la tradition qui veut que les aînés donnent des sous aux plus jeunes », a expliqué Sow, qui espère se retrouver avec toute sa famille, car, dit-il, « la fête du ramadan est une occasion de rendre visite à tous les parents et amis. C’est aussi et surtout une fête de pardon et de réconciliation. »

Enfin, au-delà des festivités du ramadan, Sow Allasane, Rockya Kanda Djibril, Nafi et Aissatou Cissé reconnaissent que cette fête est avant tout le moment de se rapprocher de Dieu en lisant le coran, d’aller prier à la mosquée, de partager ce que l’on possède avec les voisins et de respecter la parole d’Allah.

Annette Kouamba-Matondo