Catherine Samba-Panza : "Je suis l’exemple même de l’intégration sous-régionale"

Lundi 3 Mars 2014 - 0:30

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Pour Les Dépêches de Brazzaville, Catherine Samba-Panza évoque son multiculturalisme, dresse l’état de son pays et s’engage pour une « Centrafrique nouvelle et unie » 

Catherine Samba-Panza, présidente de transition de la Centrafrique Je suis l’exemple même de l’intégration sous-régionale tant souhaitée dans la sous-région Cémac (Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale). Mon brassage culturel constitue un enrichissement qui me donne une ouverture d’esprit et m’interdit toute xénophobie. Au plan international, j’ai une longue expérience de l’observation électorale dans plusieurs pays de la sous-région, sous le label de la Cééac (Communauté économique des États de l’Afrique centrale).

La RCA, notre pays, traverse l’un des pires moments de son histoire, marqué par une insécurité généralisée, des actes de violence sans précédent sur fond de considérations interreligieuses, de violations massives des droits de l’homme et de milliers de déplacés internes et externes. Le pays est au bord du gouffre et de l’implosion. Face à cette situation catastrophique, la communauté internationale, notamment les Nations unies, l’Union européenne, l’Union africaine, la Cééac, et la France, sont venus à notre chevet. Mais nous, Centrafricains, devons assumer notre part de responsabilités en nous engageant corps et âme pour une sortie durable de la crise actuelle.

Aujourd’hui, plus que jamais, le pays a besoin d’un leader en mesure de rassembler et réconcilier les Centrafricains, de redonner espoir aux uns et aux autres, de répondre à l’urgence sécuritaire et humanitaire, de relancer la machine administrative et économique grippée et de redonner confiance à nos partenaires au développement.

J’ai vécu la crise de bout en bout, avec les populations. Cette situation chaotique qui interpelle toute sensibilité nationale, éprise de paix, de justice, de prospective m’a interpellée. C’est pourquoi je réitère solennellement mon engagement en tant que président de la République, chef de l’État de transition afin de jeter les bases de la création d’un mécanisme idoine pour l’inversion à terme des tristes tendances évoquées. Je sais que je suis capable d’assumer cette responsabilité, et ce à plusieurs titres. D’abord parce que des femmes, dans de pareilles circonstances de situation de crise et de postconflit en Afrique et ailleurs, ont fait la preuve de leur capacité à gérer ces situations. Ensuite parce que j’en ai les capacités, forte de mon expérience dans le domaine du dialogue et de la réconciliation, de la médiation, de la gouvernance démocratique et économique.

Je mesure à sa juste valeur la lourde responsabilité qui m’incombe en vue de mener à son terme cette transition. Pour relever les nombreux défis qui nous attendent, il nous faut absolument rompre avec le mode de gouvernance actuel. Notre plan d’action s’articule autour des principaux axes suivants : restaurer en urgence un climat de dialogue pour la paix et la cohésion sociale ; restaurer la sécurité et l’autorité de l’État ; répondre aux urgences humanitaires ; poursuivre tous les objectifs de la transition et particulièrement le retour a la légalité constitutionnelle ; relancer les activités économiques par l’instauration d’un partenariat public-privé plus actif. La mise en œuvre de ce plan d’action ne pourra se faire sans le concours de tous les Centrafricains sans exclusive.

En outre, je me dois de rendre compte de ma gestion à la fin de la transition qui sera ponctuée par l’organisation des élections présidentielle et législatives dont je m’emploierai à ce qu’elles soient justes, équitables et transparentes. Ce sera la victoire d’une Centrafrique nouvelle et unie qui se devra de panser ses plaies dans la cohésion sociale. 

 

La communauté internationale au chevet de la Centrafrique

Les dirigeants de l’Union Africaine ont promis 315 millions de dollars en faveur de leurs forces militaires présentes dans ce pays d’Afrique centrale à l’occasion du vingt-deuxième sommet de l’Union africaine (UA) qui s’est tenu les 6 et 7 février à Addis-Abeba (Éthiopie). Un montant en deçà des 410 millions de dollars pourtant jugés nécessaires par l’UA pour financer pendant une année supplémentaire la force africaine en Centrafrique (Misca).

Les pays de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Cééac) ont promis à eux seuls 100 millions de dollars. Le président congolais, Denis Sassou-N’Guesso, médiateur de la crise centrafricaine, a expliqué que « ces 100 millions de dollars serviront à soutenir les efforts de la Misca et à assister le gouvernement de la République centrafricaine dans le processus de relance de fonctionnement de l’État ». Il a ajouté, au nom de la Cééac : « Il nous faut absolument stabiliser ce pays pour démontrer les capacités du continent à relever ses défis. »

En réaction à cet élan de solidarité, le nouveau Premier ministre centrafricain, André Nzapayéké, a déclaré : « L’engagement pour la Centrafrique démontre une très forte mobilisation » pour ce pays plongé dans une spirale de violences interconfessionnelles qui ne cessent de faire des victimes en vies humaines, des déplacés et des réfugiés.

Le secrétaire général adjoint de l’ONU, Jan Eliasson, a lancé un appel pour « fournir à la Misca le soutien nécessaire pour empêcher de nouvelles atrocités ». Il a fait part de la requête de la nouvelle présidente de transition Catherine Samba-Panza, de pouvoir bénéficier des renforts nécessaires pour stabiliser le pays estimés par l’ONU à 10 000 soldats.

De son côté, l’Union européenne (UE) a promis 200 millions d’euros pour la sécurité et l’organisation élections d’ici 2015. Elle va y dépêcher 500 hommes dans un pays une fois et demi grand comme la France, et dont le sol attire aussi des convoitises qui ne disent pas toujours leur nom : diamant, uranium, pétrole, manganèse, bois, cobalt, coltan, etc.  

 

L’action française en Centrafrique

Forte de 1 600 hommes, la France a été le premier pays occidental à envoyer des troupes dans le cadre de l’opération Sangaris,  pour accompagner la Centrafrique dans ses efforts de sortie de crise. Elle entretient un dialogue suivi avec les nouvelles autorités locales, les encourageant à rétablir la sécurité et à renforcer leur légitimité. Sur le plan bilatéral, elle a accru son aide alimentaire et humanitaire au profit des populations locales, et assure la protection de l’aéroport. Elle apporte également son appui à l’action de la Cééac, au Conseil de sécurité des Nations unies comme au sein de l’Union européenne, et soutient le pays auprès des autres institutions internationales.  Grâce à l’action française, près de 1000 soldats d’Eufor-RCA vont contribuer aux opérations de sécurité et de protection des populations civiles.

Le président François Hollande,  a  souligné qu’il n’y aura pas d’impunité pour tous ceux qui auront commis des crimes » en Centrafrique.  Paris  a annoncé l’envoi de  400 hommes  supplémentaires en renfort à la Misca et à la force Sangaris qui arrivent dans les prochains jours.

La France devrait prolonger sa mission Sangaris à la demande de la présidente, Catherine Samba-Panza, jusqu’en 2015.  Une délégation de parlementaires français, conduite par Elisabeth Guigou,  vient de séjourner à Bangui pour mesure l’ampleur de la situation sécuritaire dans le pays avant le vote de sa  prolongation au-delà du mois d’avril.  

N.N.

Catherine Samba-Panza

Légendes et crédits photo : 

Catherine Samba-Panza, présidente de transition de la Centrafrique ©DR