Couleurs de chez nous : « Bipage »

Mardi 30 Mai 2017 - 10:40

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Voici un néologisme qui nous vient de l’usage des téléphones portables. Il vient du verbe « biper ». En effet, au Congo, et ailleurs aussi, lorsque l’on ne dispose pas d’assez de crédits ou d’unités, on lance l’appel sans attendre que le correspondant décroche. Pourvu qu’il sente l’appel. Ainsi, on a l’espoir d’être rappelé.

Une pratique bien courante chez les jeunes qui, faute de moyens, essaient par ce procédé, d’économiser  le peu de crédits dont ils disposent. Les enfants peuvent aussi « biper » leurs parents avec le ferme espoir d’être rappelés. Au fur et à mesure, la pratique prend diverses formes. Pour certains, c’est une manière de solliciter le crédit. Le correspondant comprend son « bipeur » et crédite le compte de ce dernier.

Mais le mot et la pratique se retrouvent aussi dans le domaine de la séduction. Les premières à en faire usage sont les femmes à travers leurs attitudes, présentation et autres accessoires. Une démarche nonchalante par une femme dotée d’«un arrière-train proéminent» est vite interprétée par des hommes comme un appel de pied, une provocation. Donc, un « bipage ». Une poitrine garnie est aussi considérée comme une forme de « bipage ». 

Bien plus, il y a des gestes forts. Se courber devant les hommes en exposant l’arrière central n’est pas moins synonyme de « bipage ». Ces femmes autrement appelées « bipeuses » sont de véritables allumeuses  dont tout l’art repose sur la mise en feu des sens de la gent masculine. Telles des félines, elles connaissent  leurs proies parmi les hommes même si dans cette chasse qui ne dit pas son nom, n’importe quel homme peut se faire prendre dans le filet.

En retournant notre objectif, on s’apercevra que nombre d’hommes sont aussi des « bipeurs ». Ceux-ci ont aussi mille manières pour faire tomber ou attirer. Il n’est pas rare de voir un homme au volant ralentir à la vue d’une belle créature. Ou descendre en inventant une panne. Tout ceci a un nom : « le bipage ». Les femmes averties et rodées à l’épreuve savent réagir. Ou échapper.

Terminons par une scène de « bipage » spécial. Celle de cette femme qui, bien que frôlant la cinquantaine, a tout pour donner le tournis à un assermenté de Dieu. Ce jour-là, elle sortit dans la rue, comme savent le faire les Congolaises, avec un pagne noué à la poitrine (liputa na tolo). Sa mission est simple : renverser l’eau contenue dans la cuvette. Hélas ! Le temps de prendre l’élan et accomplir le geste, le pagne céda pour laisser voir aux passants l’essentiel qu’elle avait hérité de Vénus. Bipage ou accident ?

A chacun de comprendre et d’en tirer la leçon.

Van Francis NTALOUBI

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