Enjeux politiques : Paris, Luanda et Kigali appellent au respect de l’accord de la Saint-Sylvestre

Mardi 29 Mai 2018 - 16:45

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Tout en insistant sur l’impérieuse nécessité de préserver un climat de paix sur le territoire congolais, les chefs d’État français, angolais et rwandais ont, au cours de leurs derniers entretiens à l’Élysée, exigé tout simplement à la République démocratique du Congo (RDC) l’application des engagements pris le 31 décembre 2016, gage, selon eux, de la stabilité de ce pays et de l’Afrique centrale.

Les déclarations pompeuses du porte-parole du gouvernement, faites le 28 mai à la faveur d’un point de presse au sujet d’un complot que négocieraient l’Angola et le Rwanda avec la bénédiction de la France, continuent à alimenter la chronique. Exprimés sans doute sous l’effet de la colère, il va sans dire que les propos de Lambert Mende avaient fait tâche d’huile. Une certaine opinion nationale qui n’avait pas l'autre son de cloche, celui des États incriminés, avait naturellement accordé foi aux allégations du porte-parole du gouvernement, sans discernement. 

À présent, avec un peu de recul, l’on s’aperçoit que les faits tels que présentés ne sont pas proches de la réalité. Kinshasa, à en croire certains analystes, s'était juste appesanti sur les déclarations du président français, dans la foulée de l’audience qu’il a accordée, le 25 mai, à son homologue rwandais, Paul Kagame. Le fait pour Emmanuel Macron d’avoir fait état du soutien de la France à une initiative du Rwanda et de l’Angola sur la RDC avait suffi pour entraîner une levée de boucliers à Kinshasa.

De quelle initiative voudrait parler le président français sans associer la RDC ? s’interrogeait-on dans les milieux diplomatiques congolais. La mise en garde faite en début de semaine contre le Rwanda et l'Angola à qui l’on prête déjà des visées déstabilisatrices sur la RDC sans disposer de tous les contours d’un tel projet laisse penser que Kinshasa redoute une éventuelle rébellion à ses portes. Surtout que le ballet diplomatique effectué à l’Élysée par Paul Kagame et Joao Lourenço coïncide avec l’intense activité politique que mène Moïse Katumbi tant dans la région des Grands lacs qu’en Occident.

Le démenti est venu du chef de l'État angolais qui, après l’audience que lui a accordée Emmanuel Macron, s’est confié à la presse. « La RDC est un pays qui a environ  cent millions d’habitants et qui fait frontière avec au moins neuf pays africains. Ceci, c’est pour dire qu’aucun d’entre nous ne veut voir l’instabilité en RDC, tenant compte des conséquences qui peuvent advenir dans toute la région de l’Afrique centrale, dans la région de Grands lacs et même de la région de la Sadc », a-t-il laissé entendre, tout en insistant sur l’impérieuse nécessité de préserver un climat de paix en RDC.  

Le président angolais a précisé que les questions personnelles du président Kabila n’ont pas été abordées au cours de leur rencontre. « On n'a pas le droit de dire au président Kabila de quitter » le pouvoir, a-t-il affirmé, ajoutant que cette prérogative revient au peuple congolais. Contrairement à ce qui est avancé par la RDC officielle, Emmanuel Macron et son homologue Joao Lourenço avaient réaffirmé, le 28 mai, leur attachement à l’accord conclu le 31 décembre 2016 en RDC, qui prévoit des « élections libres, démocratiques et sincères auxquelles le président Kabila n’aurait pas à participer ».  

Évoquant cet accord, le chef de l’État angolais a indiqué qu’il a été béni par l’Église et, par conséquent, doit être respecté. « Le président Kabila doit respecter cet accord qui lui interdit de se représenter à l’élection de décembre 2018 », a-t-il lâché. Même credo de la part d’Emmanuel Macron pour qui « la valeur ajoutée de la France » n’est pas de se substituer aux pays de la région dans le règlement des crises. Une manière d’écarter toute thèse d’ingérence brandie par Kinshasa qui croit dur comme fer que Paris est derrière un projet de rébellion contre les institutions congolaises.    

Alain Diasso

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