Florent Mahoukou : passionné de danse contemporaine

Samedi 13 Septembre 2014 - 5:45

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Florent Mahoukou, la trentaine, est devenue au fil des ans l’une des figures emblématiques de la danse congolaise, à l’instar de DeLaVallet Bidienfono, Orchi Nzaba, Boris Bouetoumoussa, Chrysogone Diangouaya…

En effet, après avoir longtemps travaillé sur le thème de l’environnement, notamment lors des dernières éditions de son festival nommé Rue Dance, l’artiste se lance dans un projet plutôt intimiste et rétrospectif sur son parcours. Intitulée Là où j'en suis aujourd'hui, sa dernière création retrace l’histoire de la danse créative au Congo à travers sa propre histoire.

Danseur, performeur, interprète de théâtre et chorégraphe, Forent Mahoukou entre dans le monde de la danse très jeune. À 12 ans, il crée un groupe de danse à Brazzaville, nommé Bana 16e. Puis, chemin faisant, le jeune artiste fait la connaissance du groupe Les Tambours de Brazza, compagnie de danse et de percussions qui le fascine et raffermit son désir de monter sur scène.

En 1998, son rêve est momentanément interrompu à cause du conflit sociopolitique qui pousse beaucoup de Brazzavillois, dont Florent, à s’installer à Pointe-Noire. Loin de ses parents, Florent apprend au jour le jour à se débrouiller. Après quelques mois d’errance, il rencontre une bande d’amis qui s’adonnent à la danse à leurs heures perdues. « Cette rencontre m’a permis d’extérioriser mes peines, ma douleur et de retrouver un semblant d’équilibre, surtout que j’étais éloigné de mes parents. Dès lors, je me suis laissé emporter par le mouvement jusqu'à ce jour », déclare le chorégraphe.

En partant du bricolage sur les plages de Pointe-Noire avec son ami affectueusement nommé Mochristo (qui est devenu une vedette du coupé-décalé au Congo-Brazzaville), l’artiste, qui se plaît de plus en plus dans cette discipline, décide de se professionnaliser en adhérant au stage d’initiation à la danse contemporaine avec Chrysogone Diangouaya qui sortait à son tour d’une formation à l’École des sables au Sénégal. « Suite à ce stage, en 1999, j’ai intégré la Cie Bina-Ngoua dirigée par le chorégraphe Serge Bissadissi, au sein de laquelle j'ai acquis mes premières expériences scéniques », confie-t-il.  

En 2000, l’artiste se forge peu à peu sa propre démarche artistique en se nourrissant de son entourage, de sa vie. « J'aime observer les gens. C'est aussi ma manière de revenir sur ce que j’ai vécu, d’y réfléchir et de le dépasser. C’est ma façon d’être », a expliqué Florent dont les créations sont alimentées par ses pensées, ses sensations ainsi que ses émotions. Se définissant comme un danseur qui cherche à briser la projection que l'Occident a de l'artiste africain et plus précisément du danseur africain, il dit : « J’aime danser avec ce qu’il y a dans ma tête et le transmettre à mon corps, le laisser exprimer ce qu’il s’y passe… »

En 2002, il se sent prêt à prendre son envol en solo et crée le Studio Maho ainsi que sa première pièce, Corps en transe, en août 2002. Mais Florent veut partager sa passion avec les plus jeunes. Entre 2003 et 2006, il enseigne la danse traditionnelle congolaise au lycée français de Pointe-Noire et, en parallèle, il multiplie les stages aux côtés des grands noms de cette discipline. Il travaille avec Sara Orselie, Salia Sanou, Seydou Boro, Amadou Bouro, Kettly Noël, Éric Lamoureux, Jean-Pierre Amiel, Françoise Dupuy, Laurent Longa-Fo dans Racines, David Bobee et Ronan Cheneau dans Nos Enfants, My Brazza, Dieudonné Niangouna, Andreya Ouamba dans Sac au dos, et Gregory Maqoma dans Wake Up

Mais sa rencontre avec Carolyn Carlson lors d’un stage qu’elle anime à La Termitière (France) va dénouer la créativité et la capacité à l’écriture chorégraphique de Florent, qui depuis s’est lancé dans cette démarche qui consiste à chercher ce qui anime le mouvement, « sa manière d’orienter les danseurs, de trouver la matière pour le mouvement m’a révélé comment faire prendre forme à un univers ». Dès lors, l’artiste n’a pas cessé d’approfondir son travail corporel et de diversifier ses expériences.

En 2007, Florent Mahoukou devient directeur artistique de l’événement Rue Dance Congo, ou encore balades chorégraphiques dans les rues congolaises, il collabore la même année au spectacle Ndjila na Ndjila de la Compagnie Baninga du chorégraphe DeLaVallet Bidienfono, et en 2008 il interprète Sacre du printemps de Heddy Maalem et Nos enfants nous font peur avec le Groupe Rictus de David Bobee. Des efforts qui ne restent pas inaperçus, car le chorégraphe prolonge l’affirmation de sa personnalité artistique avec sa pièce On The Steps, qui recevra le prix Puma Creative et Danse l’Afrique Danse 2010 à Bamako.

Depuis 2012, Florent Mahoukou élargit sa vision et ses ambitions en initiant et implantant Rue Danse dans différents pays d’Afrique dans le but de mettre en place un réseau culturel panafricain, le Réseau Rue Dance. On y compte pour le moment Rue Danse Niger, Rue Danse Bénin, Rue Danse Cameroun…

Fort de son expérience, Florent Mahoukou développe aujourd’hui une écriture chorégraphique (installation – performance) qui lui est propre. « Pour mieux trouver mon chemin dans la danse, pour mieux me situer, je fais une sorte de feed-back dans mon passé en y alliant mon travail actuel. Aussi le spectacle qui verra le jour parlera à la fois de l’histoire de la danse au Congo et de mon rapport à la danse », explique le chorégraphe qui, visiblement, n’a pas dit son dernier mot.

Annette Kouamba-Matondo