Interview. Baudouin Bikoko : « Je vivais ma passion pour la photo de façon personnelle »

Jeudi 26 Septembre 2019 - 12:04

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« Congo talatala-Congo miroir » est l’exposition en cours à l’Institut français, ouverte depuis le 5 septembre pour prendre fin le 28 septembre. Elle met en lumière une partie de la collection du photographe qui a en fait « trois facettes dans la photographie ». Dans cette interview exclusive avec Le Courrier de Kinshasa où il raconte son parcours, se découvre un artiste passionné qui s’accommode bien de la triple dimension de son travail photographique.

Le collectionneur, photographe et animateur télé Baudouin Bikoko au vernissage de l’exposition Congo Talatala-Congo Miroir (Photo RFI)

Le Courrier de Kinshasa (L.C.K.) : Comment êtes-vous devenu collectionneur de photos et depuis quand avez-vous commencé à le faire ?

Baudouin Bikoko (B.B.) : Il y a vingt ans, j’ai eu la chance de tomber sur un lot de négatifs d’anciens photographes de Kinshasa. Je l’ai acheté sans trop savoir ce que j’allais en faire. Les collectionner, les mettre de côté ou les vendre… ? J’ai également acheté des petites photos, des tirages d’époque de toutes sortes de gens, dames, mama moziki, musiciens, etc. C’était pour mon plaisir, ma passion personnelle car j’ai deux facettes, je dirais même trois, dans la photographie. J’ai commencé par collectionner des photos et cela m’a donné envie de faire des photos, puis je suis devenu animateur de télévision. J’exploite la photo comme support pour nous relater l’actualité d’hier, l’histoire donc, mais aussi pour mettre en exergue la beauté de l’œuvre photographique. Je donne un coup de pouce aux jeunes photographes, je montre leurs photos et parle de leur démarche photographique.

L.C.K. : La majorité des photos de l’exposition est en noir et blanc. Y a-t-il une raison à cela ?

B.B. : Oui ! J’aime les photos en noir et blanc. Devant elles, j’ai les jambes coupées, le souffle court, je suis fou de tout ce qui est en noir et blanc. Mais, paradoxalement, je n’aime pas en faire car je pense que je ne serai pas à la hauteur. Je trouve que la photo en couleur est beaucoup plus facile à faire que celle en noir et blanc.

L.C.K. : Comment de collectionneur êtes-vous devenu photographe ?

B.B. : Lors d’un entretien, le photographe Simon Tshamala me conseille de faire des photos. Il me promet de m’apprendre les rudiments de la photographie. C’est alors que je commence à faire mes photos. En fait, tout a commencé avec une difficulté qui a surgi un jour : je voulais qu’il me fasse une certaine photo dont j’avais l’idée en tête. Mais quand je lui en parlais, il n’arrivait pas à la réaliser comme je l’attendais. Alors il m’a dit : Mais, fais-la toi-même cette photo ! C’est ainsi qu’il m’a appris à tenir un appareil photo et depuis là, je fais des photos.Vue du hall d’entrée de la salle d’exposition, un lot des premières photos visibles de l'exposition (Photo Adiac)

L.C.K. : Vos premières expositions étaient à domicile. Pourriez-vous nous dire dans quelles circonstances vous les aviez organisées ?

B.B. : Je vivais ma passion pour la photo de façon personnelle, intime. Puis, je me suis dit un jour que je pouvais me hasarder à montrer mes photos, partager ma passion avec d’autres personnes. Je me suis décidé d’organiser des expositions à domicile, à Kasa-Vubu. Curieusement, j’ai reçu du monde, un public composé des gens du quartier, des écoles, des diplomates, etc. J’ai même invité certains artistes plasticiens à qui j’ai offert un espace de travail, j’avais une grande maison avec une cour à l’arrière. Et donc, les gens ont afflué à la première édition tenue en 2006, je me demande bien ce qu’ils y trouvaient de si merveilleux… Cela a pour effet de m’encourager surtout que TV5 et RFI étaient présentes. Je pense que l’aventure vaut la peine d’être poursuivie de sorte qu’en 2007 je récidive. Mais cette fois, je fais un focus sur des photos de femmes et je l’intitule « Zoom sur la femme congolaise ». Sur les photos, l’on voit des femmes au travail en train de boire un verre dans un bistrot. Et rebelote, c’est une fois de plus un succès.

Baudouin Bikoko montrant une de ses photos personnelles (Photo Adiac)L.C.K. : En tant que photographe, vous avez une sorte de signature, dira-t-on. Pourriez-vous nous dire ce qu’il en est au juste ?

B.B. : Quand je me suis mis à la photographie, j’ai voulu faire une photo singulière, qui m’appartienne. Aujourd’hui, je me dis bien que si je fais ces photos-là, c’est parce qu’inconsciemment je voulais me faire remarquer. Je me devais donc de ne pas faire comme tout le monde car avec les milliers de photographes qui existent dans le monde, quand saurait-on que je fais des photos moi aussi ? Pour cela, il me fallait faire une photo particulière qui serait identifiée à ma personne. C’est ainsi que j’en suis arrivé à ce genre de photos-là, prendre des images de Kinshasa à travers le rétroviseur d’une voiture. Cela m’a conduit à voyager pour une première exposition à la première édition de Picha à Lubumbashi. Quand j’en suis revenu, j’ai reçu une invitation à participer au Festival panafricain d’Alger et j’ai exposé à la Halle en 2011. J’ai été associé à l’exposition « Frontières » de photographes venus des Rencontres de Bamako, la biennale africaine de la photo. Du fait que mes photos avec leurs ombres, couleurs et lumières offrent une juxtaposition du passé et du présent, l’on a trouvé que cela constituait aussi des frontières. Ainsi l’exposition de Kinshasa a-t-elle été baptisée « Frontières/ Ombres, couleurs et lumières  ». J’ai ensuite été en France et en Suisse.   

 

Propos recueillis par Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

1- Le collectionneur, photographe et animateur télé, Baudouin Bikoko, au vernissage de l’exposition "Congo talatala-Congo miroir /Photo RFI 2- Vue du hall d’entrée de la salle d’exposition, un lot des premières photos visibles de l'exposition/ Adiac 3-Baudouin Bikoko montrant une de ses photos personnelles / Adiac

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