Nouvel An : les Kinois ont festoyé dans l'angoisse

Samedi 4 Janvier 2014 - 12:53

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Le spectre de la peur de l'inconnu aura rythmé les rejouissances tant à Kinshasa, à Kindu, qu'à Lubumbashi, Kolwezi et ailleurs.

C’est dans la frayeur que de nombreux Kinois ont passé leur réveillon de Nouvel An. Les évènements tragiques survenus le 30 décembre étaient encore frais dans les esprits à telle enseigne que beaucoup d’entre eux ont préféré ne pas quitter leur domicile. La propension à s’éclater et à jouir pleinement qui avait gagné plusieurs au départ a cédé à la prudence. D’où l’ambiance plutôt mitigée qu’avait connue la capitale dans la nuit du 31 décembre 2013 au 1er janvier 2014. Les plus téméraires, eux, ne se sont pas faits prier pour investir les sites d’ambiance tels que le couloir Madiakoko ou alors la place Victoire dans la commune de Kalamu. La bière a coulé à flot sur fond des sons stridents du dernier Ferré Gola ou de Fally Ipupa. A la place BKTF dans la commune de Masina ou encore au rond-point Ngaba, les bars n’ont pas fermé quoique l’ambiance fût loin d’atteindre son zénith comme autrefois. Le passage des patrouilles mixtes Fardc-police  nationale sur diverses artères de la ville avait dissuadé de nombreux Kinois à se terrer chez eux. Certains ont dû renoncer à sortir en se faisant raconter, par des voies informelles, le film des événements du 30 décembre. La rumeur publique a avancé des chiffres au-delà du bilan officiel. Ce qui avait rajouté à la psychose générale. Certaines sources ont parlé d’un « carnage » à l’aéroport de Ndjili et d’autres ont témoigné avoir vu de nombreux blessés être évacués dans des hôpitaux.
 

Cependant, les veillées de fin d’année qu’organisent généralement les églises de réveil n’avaient pas connu leur affluence de grand jour. Tout le monde était pour ainsi dire sur le qui-vive bien que l’appel du gouvernement ait exhorté la population à vaquer normalement à ses activités. Les concerts de musique n’étaient plus le centre d’intérêt. La cherté des produits alimentaires occasionnée par les fêtes, mais aussi le délestage du courant électrique, absent dans plusieurs quartiers, avaient également estompé les ardeurs des Kinois à festoyer dignement.
 

Dans d’autres coins du pays, l’ambiance était tout aussi délétère à l’instar de la ville de Matadi (Bas-Congo) où des nombreux agents et fonctionnaires de l’Etat ont continué à attendre désespérément leur salaire du mois jusqu’au 31 décembre. Fauchés, ils ne savaient comment festoyer avec leurs familles. Dans d’autres parties du pays, telles qu’à Lubumbashi, la population s’est réveillée le 1er janvier sous les coups de feu nourris créant une panique généralisée. Un militaire en état d’ivresse a ouvert le feu à la Grande Place de la poste sans que l’on ne sache pourquoi provoquant un échange de tirs avec des militaires d’une autre unité en faction. On dénombre plusieurs blessés parmi les militaires plus un mort et quatre civils blessés, indiquent des sources militaires. Même scène également dans la ville de Kisangani où un militaire intercepté dans une cabine au quartier Mangobo et soupçonné de vol a été passé à tabac par des jeunes hystériques. Ces derniers craignant les représailles des militaires de la garde républicaine qui tenaient à venger leur compagnon ont, par dizaines, fui la cité pour gagner la brousse.
 

D’une manière générale, les fêtes de Nouvel An n’ont pas été à la hauteur des attentes. Le spectre de la peur aura rythmé les festivités tant à Kinshasa, Lubumbashi, Kolwezi et Kindu. Timidement, les Kinois tentent d’oublier ce qui s’était passé pour normaliser leur vie de tous les jours. Au lendemain des fêtes, les activités tournent encore au ralenti. Le centre-ville est quasi déserté. Personne n’ose prendre le risque de s’y hasarder par ces temps qui courent. De nombreux services tant de l’Etat que des particuliers tardent à reprendre. Une morosité ambiante s’est installée dans le vécu des kinois. Peut-être que demain serait mieux….

 

 

Alain Diasso