Présidentielle : l’opposition mal embarquée

Lundi 27 Août 2018 - 18:10

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Alors qu’elle était, jusqu’il y a peu, aux premières loges pour réclamer la tenue effective des élections jusqu’à en faire une de ses priorités, l’opposition congolaise paraît, curieusement, ne plus afficher la même ferveur à moins de quatre mois de ce grand rendez-vous historique...

C’est sur un ton mesuré et parfois hésitant que les leaders de l'opposition évoquent désormais la problématique électorale, laissant transparaître des ambivalences qui trahissent finalement leur peur à affronter les urnes. Cette perplexité est révélatrice de l’impréparation qui les a caractérisés tout au long d’un processus électoral auquel ils n’ont pas cru et qui, aujourd’hui, est en passe d’atteindre son épilogue. C’était sans savoir que le Congo s’était résolument engagé dans un processus politique irréversible censé déboucher sur la première alternance démocratique et historique via un troisième cycle électoral voulu crédible, transparent et inclusif. Un pari qui est en train d’être tenu.  

Plutôt que de se préparer en conséquence, de poser les bases d’un succès électoral futur à travers l’implantation de leurs forces politiques et la sensibilisation de leurs électeurs potentiels, les leaders de l'opposition ont passé leur temps à interférer dans le travail de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) dont les différentes propositions en rapport avec le processus électoral étaient souvent rejetées, sans commune mesure. De l’accord de la cité de l’Union africaine du 18 octobre 2016 à celui du Centre interdiocésain ayant prévu la mise en place d’une transition politique sous le mode de cogestion du pays (Pouvoir-Opposition), cette famille politique aura joué un rôle de sape en tentant, par toute sorte de subterfuges, de bloquer le processus politique qui était mis en branle.

Une opposition distraite

Après moult tergiversations sur le chronogramme électoral publié par la Céni, elle a fini par accepter l’échéance du 23 décembre pour la tenue des élections générales. Dans la foulée, les leaders de l'opposition ont réorienté leur lutte vers la limitation constitutionnelle du mandat du chef de l’Etat. Ils en ont fait un sujet de fixation au point d’oublier leurs engagements en tant que responsables des partis et regroupements politiques dont l’organisation à la base posait problème. Ils avaient, pour ainsi dire, mis toutes leurs énergies dans cette quête de refus d’un troisième mandat de Joseph Kabila, allant jusqu’à ameuter les puissances étrangères qui ont pris faits et cause pour eux. C'était sans compter avec Joseph Kabila qui, prenant tout le monde de court, renoncera à briguer un mandat supplémentaire à leur grande désillusion.

Face à cette nouvelle donne, il fallait vite se trouver de nouveaux repères, peaufiner de nouvelles stratégies en rapport avec l’acte inattendu posé par le président de la République qui s’est aussitôt choisi un dauphin. Trop tard pour l’opposition qui s’est laissé prendre au piège. Elle est tombée corps et biens dans les mailles des filets qui lui ont tendus par Joseph Kabila. Ce dernier, en bon stratège, les avait longtemps bercés dans l’illusion d’un troisième mandat pour y renoncer à la dernière seconde. Les opposants n’ont hélas pas su décoder l’énigme à temps, écartelés toujours entre deux avions, en quête des appuis extérieurs, oubliant de préparer leur électorat ni de réunir les moyens financiers requis en prévision d’une campagne électorale qui s’annonce âpres et rude.

Un refus poli…

A l’opposé, la majorité présidentielle s’était déjà, de longue date, mise au pas comme en témoignent les nombreuses campagnes de sensibilisation menées à la base par son parti-phare, le PPRD. Implantée dans presque tout le territoire national, la majorité présidentielle muée en Front commun pour le Congo dispose, par ailleurs, d’un aéronef acquis sur fonds propres destiné à faciliter le déploiement de ses cadres dans le Congo profond. Elle est quasiment prête à aller aux élections. Une posture qui ne sied pas aujourd’hui à l’opposition visiblement déboussolée et pas du tout disposée à affronter un tel challenge.

Sans une préparation de l’électorat en amont,  sans moyens  financiers conséquents, sans grande logistique, sans un programme commun ni un candidat consensuel, elle sait qu’elle part perdante de ces joutes électorales. « Qui veut aller loin, ménage sa monture », dit l’adage. Un précepte que les leaders de l’opposition n’ont hélas pas su intégrer dans leur agir politique. Et comme pour se dédouaner et se donner une bonne conscience, ils multiplient des stratagèmes subtilement concoctés pour chercher à boycotter les élections avec, à la clé, des préalables que certains analystes décryptent, d’ores et déjà, comme un refus poli d’aller aux urnes.

Alain Diasso

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