Projet de loi électorale : Le bras de fer s’installe dans la rue

Samedi 17 Janvier 2015 - 12:57

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Le déplacement du débat des plateaux des télévisions vers les artères de la ville de Kinshasa aurait des conséquences fâcheuses sur la suite du processus électoral.

L’examen du projet de loi modifiant et complétant la loi électorale au Parlement a suscité des réactions au sein de l’opposition politique congolaise. La tendance semble désormais être celle des manifestations hebdomadaires pour crier haut et fort sa désapprobation. C’est sans compter avec la volonté de la majorité présidentielle (MP) d’aller jusqu’au bout de la logique en adoptant la loi électorale revue. Cela, dit-on, apporterait la preuve de l’engagement de la plate-forme présidentielle à respecter la Constitution.

Les débats politiques sont de plus en plus houleux et les quolibets deviennent omniprésents dans les discours. Cela était déjà le cas à l’Assemblée nationale où une élue de la majorité s’était plainte en direct à la télévision nationale d’avoir fait l’objet des injures de ses collègues de l’opposition. Le président de la chambre basse, Aubin Minaku, a également ajouté du piquant en se moquant du haut de la tribune, de l’action ratée de l’opposition. Pour une fois, le speaker de la chambre basse n’a pas eu besoin de mettre des gants pour s’exprimer à la population congolaise. Son message a été clair !

Ce bras de fer longtemps perçu au sein de la classe politique congolaise sort des plateaux de la télévision pour s’installer confortablement dans la rue ou des messages contradictoires sont mis à la disposition de la population. Face à un appel de l’opposition à manifester ce 19 janvier, des tracts ramassés dans la ville de Kinshasa appellerait les Kinois à vaquer calmement à leurs occupations sans se laisser distraire. Ce document rallierait le point de vue de la MP sans présenter un seul lien probant avec ladite plate-forme politique.

L’opposition congolaise en décidant de transposer son mécontentement dans la rue s’expose à un discrédit au cas où elle ne parviendrait pas à drainer du monde comme par le passé. Notons que depuis les élections de 2011, cette opposition a eu du mal à faire ses preuves sur le terrain. Au contraire, elle s’est toujours illustrée par des scissions justifiées par le positionnement. La MP qui fait face à une grave crise interne avec l’affaire Katumbi court le risque d’être indexé à nouveau comme le bourreau. À ce point de vue, les actions de Vital Kamerhe et autres constituent en soi un piège contre la plate-forme qui tient les rênes du pouvoir dans les différentes instances politiques.

Le décor qui prend forme progressivement sur la scène politique congolaise rassure moins l’opinion nationale et internationale sur la suite des évènements liés aux élections. La tension semble monter d’un cran alors que l’on s’attendait à l’effet contraire, au lendemain de la publication du gouvernement de cohésion nationale. Ce passage brutal, de la communication politique à la communication électorale, est de nature à nuire à la cohésion nationale et à annihiler les acquis des dernières années.

L’issue de cette crise qui gagne du terrain dépend énormément du comportement des acteurs politiques investis des pouvoirs publics et de leur capacité à se défaire de l’emprise de leur famille politique pour répondre avec objectivité aux desiderata des uns et des autres. Le contraire ne ferait qu’embraser une situation qui est de plus en plus bouillonnante. 

Jeannot Kayuba

Légendes et crédits photo : 

Des opposants congolais devant le siège de l'Union pour la Nation