Ralentissement de l’économie : le spectre d’un crash financier

Samedi 2 Avril 2016 - 17:46

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Après quatre années de stabilité ininterrompue, l’économie congolaise présente des signaux de faiblesse. Selon les analystes avertis, la RDC ne pouvait pas sortir de cette longue exposition à un choc minier sans des séquelles. La crise mondiale surtout chinoise, avec ses effets directs dont la baisse des cours des matières premières, a eu des effets terribles sur les exportations minières congolaises et même de l’ensemble de la région. À présent, le doute s’empare du secteur financier.

Plusieurs signaux ont révélé un profond malaise de l’économie congolaise tant à la fin de 2015 qu’en ce début 2016. L’année dernière, la RDC a revu à la baisse à deux reprises ses projections de croissance, passant de 10 à 7%. Cet ajustement successif est consécutif à la baisse des cours des matières premières. Mais aucune reprise durable du secteur n’est en vue malgré la légère décrispation actuelle. En effet, le tout dernier rapport publié le 28 mars 2016 (étude intitulée Buffalo Jump) par Barclays reste très pessimiste. Selon la banque britannique, il faut s’attendre à une lourde rechute des cours des matières premières qui pourrait être provoquée par une vague de prise de bénéfices. Actuellement, martèle la banque, les investisseurs cherchent à liquider leurs actifs rapidement et à l’unisson en pariant sur des gains, avec des conséquences potentiellement négatives. Preuve d’une situation jugée sérieuse par la RDC, le gouvernement devrait présenter prochainement un collectif budgétaire pour ajuster les prévisions des recettes du pays. Un secteur comme le pétrole, par exemple, ne pourra même pas rapporter le huitième des recettes projetées en 2016 à la suite de la baisse des cours mondiaux. D’où les coupes budgétaires qui ne manqueront pas certainement dans le train de vie de l’État dans le budget aménagé.

2016, année de confirmation de l’alerte

Autre signal préoccupant, il y a eu un début de surchauffe au niveau du marché de change à la fin de 2015. Cette situation s’est poursuivie au cours du premier trimestre 2016. À l’origine de la surchauffe, certains analystes soupçonnent les effets combinés de plusieurs développements. D’abord, il y aurait eu un retrait des devises à la suite de  la fermeture de certaines entreprises minières dans le Katanga et la mise en chômage du personnel. Cela a conduit forcément à une baisse du niveau de circulation de la devise américaine. Pour y faire face, le gouvernement a pris des mesures d’accompagnement. Il faut signaler également un autre phénomène responsable de la surchauffe. Une masse de devises étrangères quitte le pays par le canal du commerce, un secteur d’ailleurs en explosion au pays. À Lufu, près de la frontière angolaise, ou ailleurs dans le monde, la devise américaine sert de monnaie d’échange à l’achat des produits de base et autres articles revendus localement. La RDC ayant une économie « dollarisée », la montée du commerce est une occasion de sortie d’une masse incontrôlée de devises étrangères. Là également, le gouvernement a arrêté des mesures pour mieux réguler la sortie des devises étrangères.

Effet de contagion

Avec ces principaux indicateurs en difficulté, il y a le doute qui s’installe car l’économie congolaise n’affiche pas une résilience face au choc externe, du moins au stade actuel de son développement. Et en perdurant, cette situation va avoir des effets sur la totalité des autres secteurs et agrégats macro-économiques pour la simple raison que la croissance est tributaire de la production nationale, elle-même dépendante de plusieurs facteurs comme l’énergie mais également et surtout les conditions du marché. Dès lors, on craint que le choc finisse par entraîner des effets néfastes sur le secteur financier.

En effet, il y a un lien très étroit entre ce dernier et le secteur économique. Les changements même mineurs de l’environnement économique se répercutent parfois violemment sur le secteur financier. Et les soubresauts de fin d’année 2015 ont eu des effets sur des indicateurs vitaux pour le secteur financier. Le cas de l’inflation qui continue de monter au premier trimestre 2016. Même si une certaine opinion fait prévaloir le fait que la monnaie locale est restée stable une bonne partie de l’année 2015, elle continue malgré tout à afficher une fragilité. Et l’année 2016 connaît toute sorte de pression notamment politique, avec un processus électoral très chaud. Dès lors, le secteur financier doit être plus attentif, mettent en garde les analystes. Il faut une meilleure surveillance des risques dans les actes quotidiens des institutions financières. Certainement, celles-ci ne lanceront plus des projets trop ambitieux pour se concentrer davantage à la solidité de l’organisation et du système de gestion des risques, au grand dam du développement économique de la RDC. En effet, on craint plus que tout un repli stratégique des banques et institutions de micro-finance. Au regard de l’évolution de la vie politico-économique de la RDC, les perspectives d’avenir du secteur financier restent assez sombres.

Laurent Essolomwa

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